....Dominique Venner ...

Dossiers : France  Europe   la Vie

                                                                                             

 

DOMINIQUE VENNER Un an déjà !

Pierre Le Vigan*

le 18/05/2014

La considérable affluence au colloque Dominique Venner (plus de 500 personnes à la Maison de la Chimie ce 17 mai) et la qualité des interventions à la tribune laissent entrevoir un mouvement de sursum corda mais aussi de sursum ratio. « Elévation des cœurs, et élévation de notre raison ».

Par un acte en apparence irrationnel, mais en fait logique, Dominique Venner a ouvert une voie : celle du sacré, celle, aussi, de la hauteur de vue. La hauteur de vue n’est pas l’indifférence , elle n’est pas le refus de s’engager, elle est la froideur dans la perception des enjeux, qui va volontiers avec la chaleur de la camaraderie. La mort sacrificielle de Dominique Venner, il y a un an, à Notre-Dame de Paris, a précisément ce sens précis : ouvrir un espace du sacré. Ce que croyait précieux Dominique Venner ce n’était ni la droite ni la gauche, c’était la France et l’Europe comme civilisation, c’était le sens même de ce que patrie veut dire, et de ce qu’honneur veut dire. Car l’honneur, en un sens, c’est toujours filiation et transmission.

Or, c’est tout cela, avec l’effacement du sens, avec le relativisme généralisé, avec le changement de peuple par l’immigration de masse, qui est mis à bat par la modernité ravageuse. Et par une politique criminelle, celle du mondialisme comme système à tuer les peuples. Changer notre peuple dans sa composition ethnique et culturelle pour tuer toute notion de peuple, dépolitiser tout pour ne laisser que la table rase du turbocapitalisme se déployant sur fond de grand marché universel, avec des hommes interchangeables, et d’ailleurs interchangés et inter-échangés, sans passé, sans héritage, sans histoire, et donc sans avenir. Avec un seul présent : celui de consommateur et de producteur. Avec des femmes louant leur ventre, et des hommes vendant leur sperme. Voilà le monde dont Venner ne voulait pas. Sain refus. Mais aussi portait-il une grande espérance, la lueur d’un autre monde possible, poétique, fort, tragique, noble, plein des exemples héroïques qui agrandissent nos petites vies pour leur donner un souffle, une ampleur, une dimension mythique. Nous ne guérirons jamais de Dominique Venner, et c’est pour cela que nous resterons vivants.

*Pierre Le Vigan, écrivain, philosophe, vient de publier L’effacement du politique. La philosophie politique et la genèse de l’impuissance de l’Europe, la barque d’or, labarquedor@hotmail.fr, 15 €.

 

      

mise à jour le 25.08.2013

classement par l'homnocoques dans une vision en COQcoques. voir à ce propos son texte sur la triade d'Homère mise à jour >>>>

"Seule la conscience de la mort ouvre la possibilité d’être ici et maintenant " Françoise DASTUR

 

ainsi que : Rêves endormis contre rêves éveillés

 

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« Il faut être soi-même jusqu’au dernier instant. C’est en décidant soi-même, en voulant vraiment son destin que l’on est vainqueur du néant. Et il n’y a pas d’échappatoire à cette exigence puisque nous n’avons que cette vie dans laquelle il nous appartient d’être entièrement nous-mêmes ou de n’être rien. »,

 

Sa dernière lettre

   

"Je suis sain de corps et d’esprit, et suis comblé d’amour par ma femme et mes enfants. J’aime la vie et n’attends rien au-delà, sinon la perpétuation de ma race et de mon esprit. Pourtant, au soir de cette vie, devant des périls immenses pour ma patrie française et européenne, je me sens le devoir d’agir tant que j’en ai encore la force. Je crois nécessaire de me sacrifier pour rompre la léthargie qui nous accable. J’offre ce qui me reste de vie dans une intention de protestation et de fondation. Je choisis un lieu hautement symbolique, la cathédrale Notre-Dame de Paris que je respecte et admire, elle qui fut édifiée par le génie de mes aïeux sur des lieux de cultes plus anciens, rappelant nos origines immémoriales.

Alors que tant d’hommes se font les esclaves de leur vie, mon geste incarne une éthique de la volonté. Je me donne la mort afin de réveiller les consciences assoupies. Je m’insurge contre la fatalité. Je m’insurge contre les poisons de l’âme et contre les désirs individuels envahissants qui détruisent nos ancrages identitaires et notamment la famille, socle intime de notre civilisation multimillénaire. Alors que je défends l’identité de tous les peuples chez eux, je m’insurge aussi contre le crime visant au remplacement de nos populations.

Le discours dominant ne pouvant sortir de ses ambiguïtés toxiques, il appartient aux Européens d’en tirer les conséquences. À défaut de posséder une religion identitaire à laquelle nous amarrer, nous avons en partage depuis Homère une mémoire propre, dépôt de toutes les valeurs sur lesquelles refonder notre future renaissance en rupture avec la métaphysique de l’illimité, source néfaste de toutes les dérives modernes.

Je demande pardon par avance à tous ceux que ma mort fera souffrir, et d’abord à ma femme, à mes enfants et petits-enfants, ainsi qu’à mes amis et fidèles. Mais, une fois estompé le choc de la douleur, je ne doute pas que les uns et les autres comprendront le sens de mon geste et transcenderont leur peine en fierté. Je souhaite que ceux-là se concertent pour durer. Ils trouveront dans mes écrits récents la préfiguration et l’explication de mon geste."

 

 

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http://gaelle.hautetfort.com/archive/2013/05/22/la-derniere-lettre-de-dominique-venner.html

 

 

 

 

 

La cérémonie d'hommage rendue à Dominique Venner

Vidéo

http://fr.altermedia.info/politique/la-ceremonie-dhommage-rendue-a-dominique-venner_49177.html

 

le chevalier, la mort et le diable

 

Hommage à Dominique Venner, par Alain de Benoist

http://gaelle.hautetfort.com/archive/2013/06/21/les-raisons-de-vivre-et-les-raisons-de-mourir-sont-bien-souv.html

l'Europe... en dormition ...éveiller les consciences endormies ... Chevallier au cœur rebelle ...

 

...aux Tartuffes, Trissotin et Torquemada ...

 

Homère déifié, à ses pieds deux allégories, l’Illiade et l’Odyssée, Ingres (1855) Le Louvre

quelle part d'  1  visible ???

le mythe du héros

 

 

 

 

..en proche relation ...

NOUVELLES DE FRANCE

....DEFENDONS NOTRE CIVILISATION ....

 

Simone Weil  ..l'esprit de vérité

Au lieu de parler d'amour de la vérité, il vaut mieux parler d'un esprit de vérité dans l'amour. L'amour réel et pur désire toujours avant tout demeurer tout entier dans la vérité, quelle qu'elle puisse être, inconditionnellement. Toute autre espèce d'amour désire avant tout des satisfactions, et de ce fait est principe d'erreur et de mensonge. >>>>

Nos Metaxu ...Nos Nous ...

« Toutes les choses crées refusent pour moi d’être des fins. » [...] Les choses crées ont pour essence d’être des intermédiaires. Elles sont des intermédiaires les unes vers les autres, et cela n’a pas de fin. Elles sont des intermédiaires vers Dieu. Les éprouver comme telles. [...] Seul celui qui aime Dieu peut regarder les moyens seulement comme des moyens. [...] LA PUISSANCE (et l’argent, ce passe-partout de la puissance) EST LE MOYEN PUR. PAR LA MÊME, C’EST LA FIN SUPRÊME POUR TOUS CEUX QUI N’ONT PAS COMPRIS. [...] NE PRIVER AUCUN ÊTRE HUMAIN DE SES METAXU, C’est-à-dire de ces bien relatifs et mélangés (FOYER, PATRIE, TRADITION, CULTURE, etc...) QUI RECHAUFFENT ET NOURRISSENT L’ÂME et sans lesquels, en dehors de la sainteté, une vie humaine n’est pas possible. [...] Pour respecter par exemple les patries étrangères, IL FAUT FAIRE DE SA PROPRE PATRIE, NON PAS UNE IDOLE, MAIS UN ECHELON VERS DIEU. [...] »  Simone Weil

 

 Heidegger.. Être c'est vouloir  ..

Toute œuvre d’art est un resurgissement, une transfiguration de la terre ; celle-ci est l’élément primordial à partir duquel toute création (Schaffen) devient un "puiser" (Schöpfen). Dans L’origine de l’œuvre d’art (texte repris dans le recueil intitulé Holzwege) [3], Heidegger écrit que l’art fait jaillir la vérité. Si l’œuvre sauvegarde une vérité, c’est celle de l’étant : l’art est la "conclusion" de l’étant. Mais l’art ne se manifeste aussi que par la médiation de l’artiste, c'est-à-dire de l'homme.

« L'existence humaine, ce lieu de ressourcement poétique, est essentiellement tragique, parce qu’elle est tendue entre un donné irréductible (la terre) et une exigence de dépassement jamais satisfaite, déchirée entre l'appel de la terre et celui du monde… L'homme humanise la terre avant de la dominer, et l'horizon qu'il déploie pour la pénétrer, c’est le monde. La réflexion philosophique est précisément la mise en dialogue de ces 2 pôles complémentaires de l’existence qui, dans une expérience unique, se découvre à la fois enracinée dans la terre et dépassée vers le monde » (Resweber, op. cit.).

C’est ce double jeu de l’enracinement et de la désinstallation que Heidegger nomme la transcendance. Le rôle de l’homme sera d’amener sa terre à l’éclosion d’un monde. >>>>>

Hannah Arendt  .....la vie de l'esprit

La philosophie ... il lui incombait de créer des catégories conceptuelles, pour transformer ces expériences en récits, ce qui est la manière humaine de rendre intelligibles les faits qui arrivent aux hommes.....il y a un lien étroit entre la pensée et la conduite morale, ...cet effet de prévention du mal, en dépit de l'importance qu'il a pour les affaires humaines, n'est qu'un effet accessoire (by product) de la pensée et non sa finalité propre ....Hannah Arendt croit même qu'avant d'être un monopole de la philosophie, la pensée était partie intégrante de la vie de l'homme du commun et de plus, que les questions métaphysiques que la philosophie a toujours discutées, surgissent, en vérité, d'expériences de l'homme du commun.... elle manifeste une autre potentialité politique: celle de permettre la communication entre les générations humaines sur la terre. Dans une situation politique critique, nous avons vu, la pensée a le pouvoir de prévenir les fausses valeurs et fausses croyances et, par suite, celui de nous préparer à la faculté du jugement, ce qui est la plus politique des activités mentales.

.....la pensée n'est pas quiétude absolue et solitude comme le voulait la tradition, mais est pleine d'activité et de compagnie.

 "Toute l’histoire de la philosophie, qui en dit tant sur l’objet, et si peu sur le processus de pensée et ce que traverse le moi"

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Théorie critique   >>>>...

Eric Fromm

le réification

l'art de vivre

Benoît XVI  >>>Benoît XVI>>

« Aimer l'amour humain »

l'homocoques >>>>

les droits et devoirs des coques !  

sortir de la nuit sexuelle >>>>

 

 

  .....des mots relevés à l'écoute des médias....

21/05/2013 23h50

http://fr.novopress.info/137829/mort-dun-europeen/

PARIS (NOVOpress Breizh) - -  Dominique Venner s’est donné la mort aujourd’hui au cœur de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Novopress Breizh a publié a plusieurs reprises – la dernière fois remonte a quatre jours – des textes de cet historien et essayiste qui fut, pour notre équipe, un maître à penser et un modèle.

Le dernier texte de Dominique Venner à Novo press

La manif du 26 mai et Heidegger

Les manifestants du 26 mai auront raison de crier leur impatience et leur colère. Une loi infâme, une fois votée, peut toujours être abrogée.

Je viens d’écouter un blogueur algérien : « De tout façon, disait-il, dans quinze ans les islamistes seront au pouvoir en France et il supprimeront cette loi ». Non pour nous faire plaisir, on s’en doute, mais parce qu’elle est contraire à la charia (loi islamique).

C’est bien le seul point commun, superficiellement, entre la tradition européenne (qui respecte la femme) et l’islam (qui ne la respecte pas). Mais l’affirmation péremptoire de cet Algérien fait froid dans le dos. Ses conséquences seraient autrement géantes et catastrophiques que la détestable loi Taubira.

Il faut bien voir qu’une France tombée au pouvoir des islamistes fait partie des probabilités. Depuis 40 ans, les politiciens et gouvernements de tous les partis (sauf le FN), ainsi que le patronat et l’Église, y ont travaillé activement, en accélérant par tous les moyens l’immigration afro-maghrébine.

Depuis longtemps, de grands écrivains ont sonné l’alarme, à commencer par Jean Raspail dans son prophétique Camp des Saints (Robert Laffont), dont la nouvelle édition connait des tirages record.

Les manifestants du 26 mai ne peuvent ignorer cette réalité. Leur combat ne peut se limiter au refus du mariage gay. Le « grand remplacement » de population de la France et de l’Europe, dénoncé par l’écrivain Renaud Camus, est un péril autrement catastrophique pour l’avenir.

Il ne suffira pas d’organiser de gentilles manifestations de rue pour l’empêcher. C’est à une véritable « réforme intellectuelle et morale », comme disait Renan, qu’il faudrait d’abord procéder. Elle devrait permettre une reconquête de la mémoire identitaire française et européenne, dont le besoin n’est pas encore nettement perçu.

Il faudra certainement des geste nouveaux, spectaculaires et symboliques pour ébranler les somnolences, secouer les consciences anesthésiées et réveiller la mémoire de nos origines. Nous entrons dans un temps où les paroles doivent être authentifiées par des actes.

Il faudrait nous souvenir aussi, comme l’a génialement formulé Heidegger (Être et Temps) que l’essence de l’homme est dans son existence et non dans un « autre monde ». C’est ici et maintenant que se joue notre destin jusqu’à la dernière seconde. Et cette seconde ultime a autant d’importance que le reste d’une vie. C’est pourquoi il faut être soi-même jusqu’au dernier instant. C’est en décidant soi-même, en voulant vraiment son destin que l’on est vainqueur du néant. Et il n’y a pas d’échappatoire à cette exigence puisque nous n’avons que cette vie dans laquelle il nous appartient d’être entièrement nous-mêmes ou de n’être rien.

Dominique Venner

entendu par ailleurs ... vivant ces derniers temps auprès d'une grande forêt en France ..aimant les cathédrales gothiques à l'image de nos forêts d'Europe à hautes futaies ...chasseurs... 5 enfants ..sa mère très chrétienne  meure ...Dominique avait 10 ans ...

 

texte de Domique Venner annoté :

« Il faut être soi-même (nous-même) jusqu’au dernier instant. C’est en décidant soi-même ( nous-même), en voulant vraiment son( Notre ) destin que l’on est vainqueur du néant. Et il n’y a pas d’échappatoire à cette exigence puisque nous n’avons que cette vie dans laquelle il nous appartient d’être entièrement nous-mêmes ou de n’être rien. »,

 

Le dernier texte de Dominique Venner

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La manif du 26 mai et Heidegger

 

Les manifestants du 26 mai auront raison de crier leur impatience et leur colère. Une loi infâme, une fois votée, peut toujours être abrogée.

Je viens d’écouter un blogueur algérien : « De tout façon, disait-il, dans quinze ans les islamistes seront au pouvoir en France et il supprimeront cette loi ». Non pour nous faire plaisir, on s’en doute, mais parce qu’elle est contraire à la charia (loi islamique).

C’est bien le seul point commun, superficiellement, entre la tradition européenne (qui respecte la femme) et l’islam (qui ne la respecte pas). Mais l’affirmation péremptoire de cet Algérien fait froid dans le dos. Ses conséquences seraient autrement géantes et catastrophiques que la détestable loi Taubira.

Il faut bien voir qu’une France tombée au pouvoir des islamistes fait partie des probabilités. Depuis 40 ans, les politiciens et gouvernements de tous les partis (sauf le FN), ainsi que le patronat et l’Église, y ont travaillé activement, en accélérant par tous les moyens l’immigration afro-maghrébine.

Depuis longtemps, de grands écrivains ont sonné l’alarme, à commencer par Jean Raspail dans son prophétique Camp des Saints (Robert Laffont), dont la nouvelle édition connait des tirages record.

Les manifestants du 26 mai ne peuvent ignorer cette réalité. Leur combat ne peut se limiter au refus du mariage gay. Le « grand remplacement » de population de la France et de l’Europe, dénoncé par l’écrivain Renaud Camus, est un péril autrement catastrophique pour l’avenir.

Il ne suffira pas d’organiser de gentilles manifestations de rue pour l’empêcher. C’est à une véritable « réforme intellectuelle et morale », comme disait Renan, qu’il faudrait d’abord procéder. Elle devrait permettre une reconquête de la ( notre) mémoire identitaire française et européenne, dont le besoin n’est pas encore nettement perçu.

Il faudra certainement des geste nouveaux, spectaculaires et symboliques pour ébranler les somnolences, secouer les consciences anesthésiées et réveiller la mémoire de nos origines. Nous entrons dans un temps où les paroles doivent être authentifiées par des actes.

Il faudrait nous souvenir aussi, comme l’a génialement formulé Heidegger (Être et Temps) que l’essence de l’homme est dans son existence (En Couple H&F ...ou saint ..) et non dans un « autre monde ». C’est ici et maintenant que se joue notre destin jusqu’à la dernière seconde. Et cette seconde ultime a autant d’importance que le reste d’une vie. C’est pourquoi il faut être soi-même ( nous même ..ou saint) jusqu’au dernier instant. C’est en décidant soi-même ( nous-même), en voulant vraiment son ( notre) destin que l’on est vainqueur ( nous sommes vainqueurs) du néant. Et il n’y a pas d’échappatoire à cette exigence puisque nous n’avons que cette vie dans laquelle il nous appartient d’être entièrement nous-mêmes ou de n’être rien.

 

Dominique Venner ( merci Dominique )

 

« La relationnalité conjugale trinitaire incarnée EN la vie humaine. C’est notre fin ; la voie de la vérité de la vie se définit ainsi. » plagiat de Simone Weil « L'ordre de l’Univers incarné EN la pensée humaine. C’est notre fin ; Le vrai se définit ainsi. »

 

..Et alors ? ...après le 26 mai ?  par Trémolet de Villers

le Figaro avec vidéo

le Monde  +

 

Renaud Camus

Avant de se donner la mort, Dominique Venner s’est expliqué : « Je me donne la mort afin de réveiller les consciences assoupies. Je m’insurge contre la fatalité. »

La mort de Dominique Venner est, en effet, parfaitement claire, lumineuse, éblouissante, et je m’insurge contre ceux qui viennent prétendre qu’elle est obscure et qu’il y a dans tout suicide une part d’inexplicable. Cet homme a donné sa vie pour essayer de réveiller notre peuple endormi, ou plutôt hébété, par l’enseignement de l’oubli, le matraquage idéologique permanent, la « ruquiérisation » des esprits, tout ce que j’appelle justement l’industrie de l’hébétude. Ainsi que je ne me lasse pas de le répéter, un peuple qui connaît ses classiques et sait ce qu’il se doit ne se laisse pas mener sans protester, comme le fait le nôtre sous nos yeux, dans les poubelles de l’histoire. Le geste de Venner est un cri d’horreur et de désespoir mais aussi et surtout un cri d’avertissement, une tentative ultime pour réveiller le dormeur, pour tirer de son abrutissement l’hébété, pour ouvrir les yeux de l’aveugle volontaire, ou du moins consentant à son aveuglement. Il s’inscrit dans la lignée des immolations de Prague, jadis, ou plus récemment du Tibet. La mort de Venner est la mort d’un bonze, et la situation de la France ressemble beaucoup, en effet, à celle du Tibet où la conquête est consacrée, comme elle s’accomplit chez nous, par le truchement du changement de peuple, garant du changement de civilisation. « Le changement, c’est maintenant », ainsi que nous en avertissent cyniquement nos maîtres. « La France d’après », pour parler comme les précédents, la France d’après la France, c’est également maintenant. Venner non plus que moi n’a pu supporter cette abomination. Mais moi, j’ai la faiblesse de crier vivant. Son cri à lui fut une balle dans le crâne, au pied des autels.

..... Je suis, faut-il le dire, absolument d’accord avec lui. Il faisait allusion en l’occurrence aux manifestations contre ledit « mariage pour tous », et particulièrement à celle qui doit se tenir dimanche. Je découvre à cette occasion que nos positions sont exactement les mêmes. Venner déplore comme moi que nos compatriotes, et d’abord les chrétiens, et même l’Église, soient capables de se mobiliser en masse à propos de cette ridicule affaire du « mariage pour tous » mais soient indifférents à ce dont elle n’est que l’indice, le changement de civilisation, tel que l’entraîne nécessairement la substitution ethnique. Et quand je dis indifférents il faudrait souvent, hélas, dire complices, notamment dans le cas de l’Église. Or, l’Église et le christianisme sont une part essentielle de notre civilisation et de l’histoire de notre race, ce que le lieu du suicide souligne admirablement, comme un muet reproche. Le paradoxe est bien sûr, pour en revenir au « mariage pour tous », que nos remplaçants, quand ils seront tout à fait chez eux, n’auront rien de plus pressé que d’abolir, ils ne sont pas fous, cet indice parmi d’autres de l’effondrement même qui assure leur victoire.

............Raciste va finir par devenir un compliment si par racistes on désigne ceux qui pensent que les civilisations ne sont pas indépendantes des origines, c’est-à-dire que l’homme n’est pas un pion, une pièce de rechange, un zombie hébété désaffilié, déraciné, désoriginé, déculturé, délocalisable et interchangeable à merci.

.... Curieux comme, aujourd’hui, un tour complet de la spirale du sens s’étant opéré, Montherlant ou Sénèque paraissent plus vivants, plus excitants pour l’esprit, que Breton ou Bataille, sans parler de Jean-Jacques Lebel. ....

Renaud Camus, le 23 mai 2013

Marine le Pen 

 

Jean-Marie le Pen   "Sa motivation c'est l'invasion migratoire massive de la France. C'est un geste à la Drieu La Rochelle, à la Mishima, à la Montherlant. Moi je suis de ceux qui considèrent qu'il faut se battre. Il faut rester vivant, il faut se battre. Et peut-être en acceptant que les autres vous tuent et pas se tuer soit même. Ce n'est pas ma philosophie ça", a-t-il ajouté.

 

Alain Soral ...Dieudonné, un combattant pour moi tout aussi respectable que Dominique Venner, et de la même trempe, mais que Dominique Venner, pour des raisons de génération, ne pouvait pas rejoindre.

 

Bernard Antony  ...A la différence de Maurras, Venner ne s’est hélas pas « endormi entre les bras de l’espérance et de l’amour ».

 

 

 

 message transmis ce 22 mai 2013 vers midi ...à une liste de diffusion générale  ... des amis et proches de l'homocoque

 http://www.homocoques.com/b0412.02_Nos_Nous_echelons.htm

 .... à partir de 16h ..y ai ajouté

cette page : Dominique Venner

mise à jour au fil du temps

 

 

À l’heure d’une postludant à none environ, Achitophel Reverson enfonça en sa bouche le canon d’un pistolet jusques à presque sentir en son extrémité les anxieuses trémulations de sa glotte frôlée par le métal froid, tandis qu’en face de lui, allongé sur les genoux de sa mère, le Christ mort en Croix posait sur sa tête rase deux beaux yeux marmoréens pour trois jours clos sur les ténèbres d’En-Bas. Comme toi, cher prophète, songea alors cet incroyant infusé d’un faisandé nectar de paganisme, je vais me sacrifier ! L’historien possédait son latin et d’aise tremblait à l’ouïe de ce terme dont il savourait les antiques racines : sacer facere, rendre sacré. Il sentait sourdre, comme une nappe d’eau souterraine, la tacite puissance de tel vocable, qu’à plaisir il laissait fondre en gosier et dont il avait la très physique impression de ressentir la transhistorique vitalité jusques en ses fibres les plus infimes, gorgées d’une sève nouvelle que sa particulière démence lui donnait l’impression de puiser aux directes sources des païennes origines qu’au fil des années il s’était progressivement phantasmées. De ses simulés ancêtres gaulois, il avait « l’idolâtrie et l’amour du sacrilège », comme le chantait Rimbaud, et sans doute aussi la « cervelle étroite » quoiqu’en vérité plus oblique qu’étriquée à proprement parler : son tonnage la rendait propice à l’accumulation d’un décourageant fatras de dates et de faits archivés sans autre organisation que l’architectonique principe d’idéologie sanguine qui présidait à toutes ses opérations psychiques, jusqu’aux moindres, quotidiennes, insignifiantes.

Ridiculement, car le canon toujours en bouche de son arme à coup unique, il sourit au Seigneur qu’il ne confessait pas ; au seuil du néant par lui supposé, il sentait poindre en un recoin de sa servile cervelle une certaine sympathie pour cet individu, sculpturellement suspendu en face de lui, dont le sang avait irrigué de surnaturelle vitalité, pendant plus de deux mille ans, l’entière existence de plusieurs dizaines de milliards d’êtres humains saisis en singularité, chacun, d’un bout à l’autre de leur intégrale personne. Le résultat certes l’enivrait mais point ne lui faisait oublier ses récriminations à l’encontre de la Religion Catholique, universelle donc, – et là ce qui le chiffonnait. Ses circonvolutions mécanisées de besogneux historien depuis mainte année à présent ne se laissaient plus enfumer par les âcres empyreumes d’une aveugle dévotion pour ce factuel succès dont il s’enjouissait, engeance aux gencives pleines d’une bouffante satisfaction égotique, d’avoir jà rendus les causes objectives de tel exploit limpides. Jalon, que le christianisme, seulement ; titanesque véhicule de transmission du souffle gréco-latin dont il se faisait, au travers de ses théologiques tortillades de l’âme, l’incontournable messager ; rien moins qu’essentiel, bien sûr, sauf à être perçu exclusivement transitif et, par-là même fédérateur. L’esprit d’Achitophel Reverson aspirait à de plus originelles spirations, spiralées à l’entrelacs du monde gréco-romain et Gaulois, symbole évident à ses yeux d’une admirable compénétration de l’éminente Raison, qu’elle soit de pure pensée ou de virulente action, et la primordiale sensibilité, sauvage à bien des égards, du monde naturel en son immédiate immanence donnée aux hommes comme l’espace d’un séjour qu’il leur incombe d’habiter en étroite complicité de respect et de sage domination.

Source immémoriale de notre Dasein européen, inépuisable résurgence d’identitaire sagesse : Homère ! Homère ! Ô Mère ! Insondable matrice d’une civilisation aujourd’hui en profonde somnolence de ses internes vibrations qui pourtant lui devraient donner sa note fondamentale, sa basse continue sur laquelle, seule, se peuvent broder les infinies vocalises des temporelles évolutions ! Quelle opportunité pour sa claudiquante idéologie de se pouvoir ainsi reposer les moignons sur le dos de ce puissant attelage dont la vigueur infernale n’avait d’égal que la cuistrerie des lectures qu’il en faisait ! Une épouse enlevée, une guerre provoquée, le soulèvement d’un peuple entier et de ses héros, la lutte à mort d’un grand nombre d’entre eux, la force, le sang, le sable, l’héroïsme d’âmes soumises à la Fatalité plus grande même que les dieux, ces dieux capricieux, colériques, qui alors n’avaient rien à voir encore ni avec la Justice, ni avec la Vérité ; puis, en second volet, le retour du guerrier en son foyer, là où, patiente comme la domestique statue de la Sainte Communauté, sa femme lui reste fidèle, tissant à défaut d’un texte la mémoire d’une trame où sans doute le beau visage d’Ulysse est dessiné : itinéraire initiatique lu par Achitophel comme une salvatrice régression à l’âtre bienveillant de toute saine existence, le nombril sacré où se noue l’âme et la vie d’un homme de bien, nobles et accomplis, kalos agatos. Que d’alambics sublimes en quoi faire bouillir et bouillonner sa singulière démence ! Que de maximes à moissonner avant que de les jeter, toutes racornies d’avoir été ainsi déracinées sans ménagement, dans le chaudron glougloutant de ses propres égarements ! « Etre toujours le meilleur, l’emporter sur tous les autres », recommande par exemple Pélée à son fils, le grand Achille. Ou encore : « Il n’est qu’un bon présage, c’est de combattre pour sa patrie ».

Chère Illiade, exultait, au seuil de l’ombre, l’hypogastrique gâteux ! Chère Illiade, chère et belle Bible des Européens, tellement plus pure à notre race que l’autre, celle qu’en partage avec les sémites nous avons recueillie à l’aurore de nos temps occidentaux, chère Illiade aux lettres d’or et de sang, tombée des mains divines d’un poète dont l’individualité historique s’est diluée à nos modernes osculations dans la prodigieuse fécondité d’une œuvre éternelle comme le cosmos héraclitéen, chère Illiade aux beaux contours, chère Illiade aux infinies coruscances, tu m’es bréviaire de l’antique sagesse boréenne, celle qui, en cet instant même, lors qu’entre mes lèvres je tiens ferme le pistolet discret de ma destinée, m’abreuve d’hédoniste vitalité et, aux marges de la mort, me donne encore la force existentielle de songer avec une sainte émotion aux surabondances de vigueur, de puissance vitale, qui s’incarnent dans la force rayonnante, indomptable, celle du fougueux pur-sang que se révèle être l’incoercible Achille, mais également dans le patriotisme charnel, physique, fait d’évidence sauvage et de sanguine fidélité, du sublime Hector, l’homme de la digne défaite, père exemplaire et mari d’une profonde tendresse qui, pour la liberté des siens, avant tout, se battra jusqu’aux Enfers.

Fontaine d’ontologique jouvence ! Point en ces capiteuses contrées du naturel nectar des arts premiers, point de transcendante intrusion morale, point de Bien point de Mal qui ne soit, en ultime instance, celui de nos chairs vivantes, vibrantes, enivrantes ; rien de moins, certes, qu’une pure anarchie, mais au contraire l’élan toujours renouvelé de valeurs vives et vivaces, inchoatives d’essence, seules capables de gonfler les voilures de l’âme ainsi que celles de vaisseaux spartiates en partance pour Troie. « Non, lance Priam à Hélène, ma fille, tu n’es coupable de rien. Ce sont les dieux qui sont coupables de tout ! » Quelle presciente libération Homère ne se fait-il pas ici le chantre ! Foin, en ce lieu, d’abusives responsabilités cosmiques, des péchés individuels et collectifs : temps antérieurs à l’omnicastrante culpabilité qui jusques aujourd’hui se trouve gouvernante de notre continent amnésique de ses primes merveilles. Comment dire mon adéquation aux vérités homériques qui me chantent de consonance aux oreilles tant qu’il me semble entendre la mélodie de mon propre être, singulier, ondulant musical en parfaite symbiose avec les cantilènes musculeux de ce primordial poème ? Déploiement mystique de la nature faite exclusif séjour de l’Homme ; pureté inégalité des appétences à l’excellence où nous appelle la beauté du monde et de notre cœur ; splendeur du respect des axes de masculinité et de féminité qui sont les pivots de toute structure sociale et, sans doute plus profondément, métaphysique ; tout cela, au sens littéral, m’enchante et m’exalte.

Pauvre Christ, ajouta-t-il en jaugeant derrière ses épaisses lunettes le Corps du Seigneur, qui fit apparition en un monde de si éclatante grandeur, fier des guenilles de paralysante compassion qui furent tiennes et dont l’Église est, aujourd’hui encore, revêtue malgré le flamboyant apparat qu’elle emprunta, savante de ses propres doctrinales faiblesses, aux fastueuses civilisations greco-latines. Pauvre Christ qui n’eut d’autre idée de la grandeur que morbide, sordide, algide… Tu as retiré aux Hommes la confiance que, jusqu’alors, ils avaient en eux ; tu l’as confisquée au profil d’une divinité de Vérité et de Justice qui, comme un hypocrite vampire, a sucé la sève de leur ardeur originelle jusqu’à les laisser exsangues de toute existentielle verdeur sur les froids pavés de tes cathédrales où, aux beaux siècles de ton règne terrestre, grouillait l’humanité comme vers et insectes sous une roche couvrant le soleil.

N’imagine pas, Fils d’un Dieu auquel ma boîte crânienne imploserait de croire, qu’à quelques secondes de ma mort, je suis en face de toi par chrétienne dévotion pour ta chétivité sanguinolente, ton obscène souffrance, ta radicale absence à toute gloire d’action mondaine ; du sang de tes martyrs, tous crevés dans la souillure de leur scandaleuse humidité, je ne voudrais pas même pour me désaltérer : il pue la moisissure, comme un liquide qui trop longtemps aurait, en un vieux flacon fermé, fermenté en sa propre inféconde solitude, incapable d’exhaler quelque puissante fragrance que ce soit, au contraire du sang astral de mes héros, ce sang qui fut aussi semence car versé à la gloire d’une Idée lumineuse de l’Homme, faite d’existences absolues, d’inexorable fierté et de galvanisante fidélité, assumée non point dans la puante croupissure d’une vie de rétention mais au contraire dans l’exubérant épanouissement d’une survitalité dont le suc pouvait alors être puisé aux sources mêmes de la Vie où se boit d’un cœur noble la puissance d’exister.

Non, petit juif habile, je ne suis pas là pour Toi, pas même pour Ta mère à qui je préfère de loin, en matière de modèle féminin, ma chère Pénélope ; à mes yeux, ceux, acérés, de l’historien, je suis en ce fatidique instant sur l’emplacement d’un temple gallo-romain dédié à Jupiter. Entends-tu, Christ dolent ? Je m’apprête à offrir ma vie en sacrifice sur le lieu d’un culte antique rendu à la plus haute instance de la religion civique romaine, édifié en terres gauloises conquises, par ceux dont en mes veines coule le sang tandis qu’en mon esprit soufflent les vents héllénistiques. C’est à Zeus intériorisé Gaulois, en quelque sorte, que je fais offrande de mon existence, à Zeus Téléïos, Zeus Ktêsios, Zeus Herkéios, Zeus Polioûkos, et Zeus Sunaïmos, enfin, dieu de la race et du droit du sang hui bafoué même par ton Église, oui, celle-là même qui pleurniche ritournelle quant à l’accueil de l’étranger et des plus pauvres et tente même, en la personne par ailleurs respectable du précédent Pape Benoit XVI d’opérer rapprochement avec l’Islam, horizon de notre péril identitaire envers quoi son rôle l’obligeait à de certaines coupables complaisantes nourries par des espérances de prochaines fraternisations qu’il m’est devoir de dire pour le moins absurdes.

Ainsi soliloquait en son intérieur naphtalineux Achitophel Reverson, héraut momifié d’une part scrofulée de la françoise populace qui opposait au traumatisant reflux du réel la crustacée crispation seule envisageable pour de si étroites hures, impropres d’évidence à toute véritable pensée au même degré que leurs exécrés ennemis politiques, ces « endormis », comme il se plaisait à les nommer sans prendre conscience pour autant de n’être capable d’opposer à ce sommeil rien d’autre que sa propre psychose : rêve éveillé, certes, mais rêve néanmoins. Rêves endormis contre rêves éveillés, – tous deux phacocyteurs pantagruéliques de réalité –, tel se présentait aux temps choisis pour son suicide, l’échiquier politique sur lequel, quoiqu’en son vieil âge éloigné de tout primaire militantisme, l’historiopathe des armes et de la chasse continuait en sénile soliste à faire trémuler sa glotte desséchée.

Gyropracte d’aucuns concepts nationauséeux contreplaqués d’une longue, antérieure, expérience militaire au détour d’une Algérie abhorrée autonome ainsi que de maintes décoctions mentales d’hispide historien de l’héroïsme hystérique qui, plus de quatorze années durant, furent en ses relapses synapses quotidiennes et méphitiques vapeurs, Achitophel Reverson portait l’étampe de l’intellectuelle obscénité à même les rides de son haut crâne, oviforme jusques aux tristes plissures par le temps infligées à ses flaccides pommettes, absent à toute profusion capillaire comme son cœur l’était à l’effluence de sainte charité dont exsudait le surnaturel regard de Celui de qui le Corps descendu de Croix gisait à quelques mètres de lui, au cœur de l’autel.

Sputateur de salissante militantise politicole en ses primes années d’égarement, baveur par la suite de stercoraires tissures textuelles où, en sa neuve vêture d’historiographe des marcescences occidentales, il se faisait graphomane distingué des protubérants enthousiasmes de sa jeunesse passés au filtre plumassier d’une sénescence qu’il désira de lettres adornée. Incomparable sachant, quoiqu’ord de corps sous d’élégants dehors qu’ores il arborait, des turpitudes détaillées d’une signifiante meute de malfaisants notoires coagulés dans les plus stratosphériques espaces d’un continent politique de funeste mémoire, malgré qu’il fût dit dextre par opposition aux sinistres qui, jourd’hui, portent certes fort bien leur spatiale étymologie ; assidu au frénétique panégyrique des incertains ancêtres Gaulois de la matrice desquels ce triste sire exultait en son intérieure monomanie généalogique se croire tout droit sorti, ce honteux géronte aspirait à la continentale consanguinité comme d’autres rêvent à l’advenue de la Cité céleste.

Empuanti d’une tellurique glossolalie de vague ascendance philosophique, Architophel Reverson s’emplaisait à répandre alentours, par feuillets d’articles ou d’entiers ouvrages, les miasmes hypogastriques qu’il travestissait analytiques et conceptuels en esquissant de sa plume cacochyme quelques volutes stylistiques par ailleurs d’un classicisme aussi aride que son regard de posthume faucon mais néanmoins propre à esbaudire le baudet de courante bauge, celui-là même qui bientôt pleurerait avec mainte larme de sincère diptère la disparition d’un grand historien. Comme un pesteux, sa psychique infection s’était avérée contagieuse et, quoique des prédispositions d’antériorité familiale souventefois se révélaient nécessaires, force crapule adolescente trépignait depuis quelques années à l’idée de pouvoir de ses gluantes gloses s’empommader l’ithyphalle. La France ensouchée gauloise et de fraiche génération aimait à humer les saveurs torchederchiques rémanant des nombreuses pages noircies par ce graphomane du paganisme à déambulateur schizoïde capable de se faire prime en concurrence avec l’héritage judéo-chrétien que, certes, Architophel point ne rejetait mais à tout le moins jaugeait, superbe en sa chaire de laïcarde démesure, avec une profonde circonspection, ainsi qu’un élément dont, aux entrebâillements rares de sa close sottise, il pressentait l’intellectuelle surpuissance et craignait donc de s’en trop approcher, agité d’une bien compréhensible appréhension à l’idée de voir se décomposer la risible machinerie d’archaïque rhétorique lui permettant de continuer à faire croire aux plus myopes de l’encéphale que lui avait été par nature octroyé la faculté de voler, lors même que, tel l’édénique reptile, c’était sur les torves anneaux de sa rance démence qu’il rampait entre les phrases sablonneuses de ses opera obscuræ.

La dernière en date d’icelles n’était pas de papier, d’ailleurs, mais virtuelle torchure seulement, déposée sur sa frigide page internet quelques heures avant le présent moment, dilaté en monologue par l’imminence de la mort. Saisissant, rapace arriviste de son idéologie, le prétexte d’une jobarde manifestation hostile à la désignification légale du mariage dont pourtant venait d’être voté le texte, Achitophel Reverson avait en son style blet de bruyante bêtise crié à la reconquête active de la mémoire identitaire française et européenne, bavant au passage une théorisante tentative de son éthique volontaire intime dont il avait joui, dans l’instant de sa rédaction, de la savoir prophétique. À demi-mots, il avait annoncé l’acte que maintenant, dressé de toute sa crasseuse carcasse, il s’apprêtait à accomplir pour rompre la lente léthargie en laquelle ses contemporains s’enfonçaient depuis plusieurs décennies, peut-être plus encore. Rédigeant ces lignes, renforcées d’une indigne prise en otage d’un concept heideggerien, l’historien avait été traversé d’un frémissement prolongé de sensuelle délectation, comme si la promiscuité soudaine, accrue par ses transcrites pensées, avec le trépas était parvenu, l’espace d’un instant, à rendre à ses chairs algides une diffuse sensation d’érotisme. Oui, se souvenait-il, cela avait bel et bien été quelque chose comme une érotisation de tout son être soudain fait érectile pistil de sa Cause florescente dont il humait alors le parfum corsé à pleines narines, quelque chose comme l’éveil galvanisant de ses plus charnelles propulsions idéologiques, rubescentes d’enthousiasme ainsi qu’un visage empourpré de fiévreuse fierté, celles-là mêmes qui avaient portées ses jeunes années aux plus extrêmes actions, toujours bouillantes de n’être pas abouties.

Mais à présent, en cette terne journée d’un printemps en demi-teinte, l’aboutissement de son entière existence lui était prochaine, à portée de sa main agile encore, qui certes point ne tremblait lorsqu’elle caressait, en un geste de dévotionnelle volupté, la petite arme chargée qu’il avait placée aux côtés de son ordinateur, espérant peut-être d’inconsciente façon la bienveillante et silencieuse protection de cet objet fascinant. De tout temps, en effet, Achitophel avait aimé les armes, qu’elles fussent de chasse ou de guerre, peu lui chalait, du moment qu’elles portaient la surhumaine puissance d’amener l’Homme aux confins de ses propres exigences, de le retrancher en ses plus profondes cavités ontologiques ; il avait toujours aimé, et encore aimait bien sûr, cet instrument destinal par excellence, seul capable d’obliger les plus lâches, les plus vils pourceaux de l’humanité à une salvifique confrontation avec leur propre destinée. À cette petite mécanique, ingrate d’apparence, des vies entières pouvaient être suspendues, soudainement, compressées en leur ombilic obombré de mystère, portée comme la jouissance mâle à leur explosive acmé, instantanée, compacte dans le Temps ainsi qu’un astre occlus d’où pas même la lumière d’une mythologique Résurrection ne pourrait s’échapper.

Pourquoi, dans le fond, n’avoir pas choisi la corde ? L’idée, certes, l’avait traversé, en réminiscence peut-être de ce texte de Claudel, lu jadis, vite oublié cependant, La mort de Judas : « Maintenant retenu par un fil imperceptible, s’y expliquait l’apôtre félon, je peux dire qu’enfin je m’appartiens à moi-même. » Mais non, telle n’était pas sa volonté, quoiqu’il sentît avec le Pendu d’Haceldama plus d’une secrète affinité quant à l’impatience politique qui lui avait valu, selon la Bible, l’éternelle damnation ; lui-même ne désirait pas de s’appartenir seulement mais bien plutôt d’être lui-même de la plus exhaustive façon. Engrossé des tautologies thaumaturgiques d’une esquisse d’impensée désirant faire du Sujet humain le maître radical de son existence, face à quoi seul le néant se dresse altérité, l’esprit d’Achitophel rêvait à la domination de son être en toutes parcelles et en toutes mondaines prolongations. N’étant rien, étron étriqué d’un Fixe Néant politicard, il aspirait à le rester jusqu’aux ultimes seconde de sa vie afin que de pouvoir faire, sophiste, de cette fidélité à sa propre vacuité l’élément premier d’un remplissage posthume d’icelle. Sa libido torsadée au brasier de sa politique démence se boursoufflait d’humeurs lascives à l’idée d’être par lui-même déproprié de la fine point d’intimité qui persiste, en toutes circonstance, à saillir au crépuscule de l’existence, comme ultime trace de l’immarescible dignité singulière de tout Homme : la mort, bien sûr. Gandin des notions métaphysiques comme des analyses géo-politiques, l’historien phantasmait pouvoir offrir sa vie à la Cause qu’il défendait : ce faisant, il ne pourrait que s’y dissoudre, intégralement, comme pincée de sel dans l’eau. Son famélique encéphale s’arrêtait aux immédiates conséquences, qu’il prévoyait moussantes : articles de journaux, hommages de l’âme en peine marine en tête de sa frontale corporation dextre aimante, soutien probable d’un boudin en lard catho de même tendance quoique modérée, bref, amplification médiatique de la puissance singularisante de son acte qu’il espérait offrande.

Par malfortune, le dernier mot ne serait, de toute évidence, pas celui-ci. Les sistres des pitres sinistres, en un premier temps, se gausseraient de tel vieux bonze et peut-être même à son sacrilège ajouteraient l’abjection d’une caricature, élevant alors au carré la saloperie infâme dont il s’apprêtait à se faire acteur et victime, les veinules du crânes bouffies de mégalomanique salauderie. En second temps, petit-à-petit, l’oubli touffu des irréelles époques post-historiques se chargerait de recouvrir ce crime vertigineux d’un voile dédaigneux d’inconséquence et d’insignifiance, le renvoyant en quelques mois sans doute aux limbes brumeuses de la Grande Fiction où s’épanouissaient alors les sortilèges de Léthé, érigée tutélaire par les modernes simulacres qui composent l’humanité occidentale du XXIe siècle. Sa mort serait alors expurgée de toute humaine singularité, désossée de toute charnelle intimité, purgée de toute ontologique originalité, élevée à l’insigne horreur d’être classée acte politique, autrement dit acte publique, publicitaire peut-être, donc à l’exact opposé de toute véritable et profonde intimité. Possédé, d’évidence, l’historien aspirait à se déposséder de lui-même dans l’espoir illusoire de se pouvoir appartenir tout entier par ce geste même, – ruse du Démon qui fait voir à sa proie le monde à rebours, au miroir du néant où l’image hypnotique du sujet lui devient visible, et comme telle désirable.

Sa notule internautique terminée, il avait consciencieusement rangé le pistolet dans la poche de son imperméable et, une dernière fois, s’était laissé aller la bouffée tiède de fier bonheur qui remontait en lui lorsqu’il contemplait une des photographies familiales les plus réussies, celle où, en costume de chasse, deux lapins à la main, il trônait emmi ses cinq enfants, jeunes alors, et son épouse, rayonnante de tendresse conjugale à ses côtés. D’aise, il avait soupiré : fasse la puissance symbolique de mon acte qu’ils trouvent tous la force de durer…

Ses craintes, à dire vrai, s’affirmaient ténues ; il savait ses enfants réceptif à l’éducation en forme de dressage neuronal que, de concert avec sa chère femme, il était parvenu à leur infliger dès leur plus jeune âge afin de ne subir d’eux aucune déception, de quelque sorte qu’elle pût être. Sa descendance était à l’image de son Idéal et, plus loin que lui encore, elle porterait la splendeur d’un héritage aujourd’hui bafoué par une frange fangeuse de la population française, manipulée par la mafia communiste qui tenait en ses filets jusques aux partis désignés de droite par d’aucuns naïfs fumistes en science médiatique. Après lui, en sa race perdurerait son esprit, et c’est là tout ce qu’il attendait de la mort. Prolonger sa race ! La faire perdurer ! Quel plus belle et ample expérience pouvait bien vivre un homme ? Concevoir en sa chair l’incarnation même de son propre esprit, – à tout le moins ces êtres qui, avec un peu de méthode et de volonté, pourraient devenir tels ; quelle griserie métaphysique !

Y a-t-il plus belle idée que celle de lignée ?, demandait-il à présent au Christ figé à quelques mètres de lui dans le marbre d’une pièta de Nicolas Coustoues. Bien sûr, toi, superlatif célibataire né d’une Vierge et participant pleinement à la nature de son Père, tu ne peux entendre d’une oreille compréhensive telle émerveillante perspective, toi qui a su conceptualiser une origine trimodale, engendré par le Père, conçu par le Saint-Esprit et, enfin, né de la Vierge Marie, tu ne peux rien entendre à l’exaltation d’une procréation univoque, totale, nécessaire et pourtant consentie de libre volonté. Tes vicaires mêmes, ces Papes, n’obéissent pas au principe dynastique à quoi sont toutes les monarchies du monde soumises, ou peu s’en faut, car l’Église, ton Église, depuis toujours se méfie des lignées qu’elle sait lui pouvoir échapper, comme le fit par exemple Henri VIII et, depuis, l’intégrale monarchie anglaise. Je sais bien qu’il y a d’augustes nigauds pour affirmer que c’est précisément là que se loge son principe de pérennité, mais je n’accorde aucune foi à leur bancroche raisonnement car ce serait faire fi de l’égale longévité des autres maintes religions qui sont autant de survivances en mon époque de générale déliquescence. Foutaises donc, bientôt par pleines fournaises oubliés des quelques illuminés responsables de celles-ci. Par contre, pauvre Jésus, ce qui m’apparaît évident, c’est la multicentenaire responsabilité de ton Église, point seule certes en cause, dans ce que le bel écrivain contemporain Renaud Camus nomme le « grand remplacement », cette générale tentative d’atteindre définitivement à la pureté d’une race, nôtre, boréenne disons, par l’encouragement frénétique d’une immigration massive en provenance des pays arabo-musulmans. La Charité, dit le Pape !...

Son pistolet en bouche, Achitophel Reverson ne put s’empêcher de ricaner, – quoique peut-être était-ce tout intérieur car il lui sembla que nul son de s’extrayait de son gosier obstrué. La Charité comme prélude à la charia maîtresse sur nos terres, peut-être ! Nous verrons à ce moment-là, lorsque l’Europe sera passée sous domination arabo-musulmane, ce qu’il en sera des immigrants inaptes à toute conséquente intégration, atrabilaires de leurs idiomes comportementaux et se refusant à tout effort de transformation qu’en revanche, sur les territoires par eux conquis à la force de l’épée, ils exigent des plus infimes touristes ; et ce bien sûr sans nulle discussion possible. En nos temps post-modernes, le cadavre encombrant de la chrétienté morte depuis plusieurs siècles n’est d’aucun secours face à la déferlante islamique dont l’Occident est aujourd’hui passive, voire consentante victime. C’est pour cette fondamentale raison que mon cœur politique est porté à l’absolue laïcité. Non point celle, tiède et hypocrite, des liquides socialistes qui s’affairent sous couvert de laïcité à faire expier l’Église Catholique des crimes dont, auparavant, ils ont pris soin de la badigeonner avec épaisse complaisance, non, celle plutôt de mon cher Parti, mon Parti-Pris en toute chose d’importance, celle qui en son nom m’a poussé à maintenir vivace jusques à cet instant mon combat contre le port du voile dans l’espace publique, cette pratique qui n’est que le sordide étalage d’un choix confessionnel privé. Étalage publicitaire, devrais-je dire puisque le but insu volontairement – d’aucuns se voilent la face ! – est bien entendu de faire participer de ce fait toutes les femmes musulmanes d’Europe à la disparition de la civilisation qui est depuis plusieurs millénaires attachées à ce continent. Laïcité sans concession, donc, c’est-à-dire rigoureuse interdiction de tout signe distinctif religieux sur la voie publique, que religieux soit ici attaché au Christianisme, à l’Islam, au Bouddhisme ou au Judaïsme, bien sûr, qui trop souvent à mon goût fait exception en tout, sur tous les plans.

Alors, Christ, me diras-tu sans doute : que faire à ce moment de la pléthore de petits salopiauds évangélisés qui se réclament de ton Église et cependant, contre tous tes principes amaigrissants de Justice sociale et de Charité universelle, se font un honneur de chanter à l’unisson les hymnes de la dextre émise radicale  ( .....vidéo  22.06.2016 Bush-BHO ...) ? Les faire abdiquer leurs principes, tout simplement, s’ils sont nostalgiques des chouans ou de quelque autre sympathique folklore local dont la Droite agissante ne peut s’encombrer en son actuelle et fulgurante ascension. Naguère, déjà, les républicains au postlude de la Révolution, enseignaient aux petits français qu’ils avaient pour ancêtres les Gaulois, – exclusivement. L’évidence historique, lors, ne faisait point encore trembler les doxiques élites d’un pays ne se désirant plus autre chose que réceptacle d’une Altérité glorifiée messianique cependant qu’icelle, à la vue de tous, réduit consciencieusement son calice en miettes afin de mieux pouvoir, sur les débris, construire le croissant triomphant de son succès civilisationnel.

Les disciples du Christ, en effet, même faux, même maurrassiens, même en ces temps d’avancé sabordage du Catholicisme par ses propres troupes, n’étaient pas en tant que tels immédiatement bienvenus au sein de la congrégation dont était membre Achitophel Reverson et qu’il rêvait faites d’âmes vigoureuses des influx antémémoriaux d’un passé pré-chrétien seul capable d’encore sauver l’identité d’un Monde qui jouissait de son propre effondrement, transmué progrès sous l’effet des vapeurs toxiques d’une infernale idéologie de l’autruche collective. .....vidéo  22.06.2016 Bush-BHO ...

Pourtant, les susmentionnés n’étaient pas sous menace d’extinction, que du contraire ! Le catholique dextrophile ne s’était peut-être jamais aussi bien porté, et ce en très large partie grâce à Maurras et son politicisme exacerbé qui, s’il lui avait valu de sévères remontrances du Saint-Siège, le firent en revanche triomphant en postérité jusques à présent où la jeunesse catholique, massivement inapte au moindre mysticisme, trouvait dans l’excitation politique moyen de soulager ses vibratiles muqueuses sans faire l’effort d’y adjoindre la plus infime part d’activité pensante. Ceux-là faisaient de la politique comme d’autres se lustrent le priape : à des fins de pure vidange. Ne pouvant point copuler en bonne conscience avant le mariage, la neuve jeunesse catholique se lance à corps perdu dans la politique afin de compenser par-là l’inertie forcée de leur libido pré-conjugale. Le catholique juvénile de moderne extraction, par essence, est ignare de familiale tradition ; scout toujours, car dès ses premiers balbutiements dressé au groupal compulsif, il fait ses classes plutôt que ses humanités et n’entend rien à son propre patrimoine culturel, par-dessus tout littéraire. Au contraire d’Achitophel qui, dès ses plus jeunes années, avait saisi la nécessité d’enrober toujours de voluptueux colifichets érudits l’excrémence qu’il avait élue doctrine d’existence, l’adulescent d’ascendance cathoblique se revendique insavant de toutes importances littéraires de son propre horizon et s’enténèbre à préférer, malgré les efforts de Benoit XVI, le rock chrétien aux Messes de Mozart, tout comme d’ailleurs il préfère la lecture d’aucun fabriquant factice d’adjadjantises théâtrales aux chefs-d’œuvre de Claudel. Tribordosensible parce que ses ainés le furent, qui là s’imaginaient que la carte d’un parti de Droite était nécessaire à l’usage hebdomadaire des bancs dominicaux, il croit autant en son Dieu qu’en celui, caniveau d’or, de la contemporaine politique de post-histoire et s’acharne en acte vociférant à nous faire savoir l’inexpugnable évidence de telle abusive intrication conceptuelle.

Pourtant, même si tel petit impatient de Cité céleste se voyait constitué de bas en haut pour plaire à la dextrême, Achitophel Reverson ne comptait point trop sur eux pour s’émanciper des châtrantes prolongations inconscientes d’Évangile qui, toujours, risquaient en eux de faire reflux et d’ainsi les faire céder aux consanguin nonchaloir d’âme dont se nourrit, en principale substance, le christianisme analysé par les bons soins du très objectif historien.

Son amour immodéré pour sa famille, et en générale pour la Famille, n’était donc en rien enraciné en terreau chrétien et l’humide nuage d’émotion qui lui était monté aux yeux lorsqu’il les avait posé sur le portrait photographique familial était d’un tout autre ordre, identitaire bien sûr. Sa famille, plus traditionnelle que la Sainte Famille traversée d’internes complexités qu’il ne désirait pas même se donner la peine de penser avec rigueur, sa famille était pour lui le socle immémorial d’une identité communautaire que sa dissolution ferait sans délais voler en éclats. Homère toujours, – qui structurait à hauteur de mélecture faite par lui de ses deux grands poèmes l’intégrale dialectique d’où, sans exception, découlait la sienne idéologie. La Nation sauvée par le foyer, la Nation tressée au foyer, l’une survivant en l’autre, l’autre en l’une, le tout impeccablement imbriqué comme rouage d’horlogerie. Hector support d’Ulysse, et vise versa, l’un portant l’autre à son épanouissement, duquel germe à nouveau le premier, ce en une éternelle rotation de la dyade souveraine sur elle-même. Achitophel Reverson participait du culte de la famille sacrée, mais telle par dynastique nécessité car seule une forte cohésion familiale pouvait permettre à une nation de persister en unité et de n’être pas dissoute en quelques années par l’acidité des intérêts et personnalités particulières qui, on le sait depuis Platon, doivent céder aux exigences communautaires pour le bien de la cité.

Parcourant d’un bienveillant conspect l’ensemble de sa puérile tribu, il s’était d’ailleurs imaginé la beauté d’une nation fondée sur un semblable modèle, efficace à échèle de population : la consentante acceptation d’une autorité sue compétente, à laquelle le peuple de ce fait pouvait s’abandonner, en un premier temps, sans crainte d’être floué de quelque façon que ce pût être, voilà le principe essentiel de toute archie, qu’elle fût monarchie ou démocratie antique. Mais pour un tel résultat, si réjouissant, il fallait que ladite autorité se pût appuyer sur un héritage riche et fécond, une tradition de représentations éthiques et ontologiques fortes, propres à soulever les foules comme la houles d’une mer aux flots excités par le trident de Poséidon ; ce que lui, Achitophel Reverson, inlassable lecteur d’Homère et d’Héraclite, pourri pourceau enflé aux gaz intestinaux de l’Action Française, avait accompli au sein de sa famille où par ailleurs il avait toujours été, pour sa part, comblé d’amour.

Son ultime pensée sera-t-elle donc pour ses proches, pour ceux dont il savait qu’ils souffriront du geste qu’il s’apprêtait à commettre, sacrilège immonde que sa démiurgique démence lui permettait de ressentir ainsi qu’un acte militant, quelque chose comme un haut sacrifice fait à sa patrie française et européenne ?

Peut-être, en fin de compte…

Il se souvint alors d’une certaine après-midi de printemps bourgeonnant, dans le petit jardin clos de sa résidence de campagne, lorsqu’entre deux et neuf ans s’échelonnaient les âges de sa guirlande bambineuse dont les divers éléments s’agitaient alentours en clameur vague qu’une seule sévère interjection de sa part suffisait à réduire au silence de la brise dans les feuilles d’un vieux tilleuls rongé de mousse. Folle d’aise à la sensation nette du retour des beaux jours, sa progéniture multiple prenait particulier plaisir à savourer en nombreuses roulades l’herbe fraiche et verte à nouveau, douce et chatouillante à la fois. De la table où, au soleil tiède du mois de mai, il terminait la relecture des épreuves de son dernier ouvrage, Achitophel Reverson avait un instant été saisi par la primitive beauté de cette scène, simple d’apparence et pourtant à ses yeux portant en elle, discret, le murmure sublime de la réelle sacralité du monde naturel. Cette joie pure, symbiotique, qui semblait unir les fruits de son sang aux neuves efflorescences de la Terre, cette sérénité sous-jacente à l’enfantine agitation des derniers membres de sa race lui avaient, l’espace de quelques miraculeuses minutes, rendus la divinité du cosmos palpable, immédiatement perceptible, comme évidente, lumineuse, s’extravasant à grands flots de rayons d’or et d’argent de chaque parcelle mouvante de réalité qu’il avait devant lui, inondant d’une coulée de nitescence glorieuse les phénomènes alentours.

Durant quelques précieux instants, il s’était senti plongé dans la chair tendre, fraiche, comme ensoleillée de l’intérieur, d’un Renoir, mais un Renoir où, comble de l’exaltation, ses propres enfants se seraient retrouvés propulsés par quelque mystérieux sortilège ; et voilà donc sa descendance projetée à hauteur d’art, faisant surgir de son involontaire candeur la substance puissamment, primitivement esthétique du Monde rendu à sa matricielle innocence, tel que, précurseurs en tout, les Grecs déjà l’avait pensé : déploiement ininterrompu de forces vitales, chaotiques parfois, ordonnées en d’autres temps, équilibrées toujours en finale situation. Quelle douce fierté de contempler, à quelques mètres de lui, les chastes ébats de la Vie même en son renouveau, scène où congruent en une surprenante harmonie le bourgeonnement de la Nature et les dernières effloraisons de l’espèce humaine, nées de sa propre chair, qui s’éveillaient à la fugace beauté du monde en s’y frottant, au sens propre, comme si leur plus cher désir était de retourner à un parfait état de contemplation primitive.

Splendeur colossale des flux de générations, immémoriaux, qui déferlent sur le Temps depuis la naissance de l’Humanité ! Sempiternel mouvement des vies et morts individuelles, maintes, infinitésimales, œuvrant de concert, tacite et su pourtant, à la marche solennelle et imperturbable des cycles de la Vie. Homère, encore et toujours ! « Comme naissent les feuilles, ainsi font les hommes. Les feuilles, tour à tour c’est le vent qui les épand sur le sol et la forêt verdoyante qui les fait naître quand se lèvent les jours du printemps. Ainsi des hommes : une génération naît à l’instant où une autre s’efface. » Flux et reflux des générations, semblable à la mer sur le sable d’une plage éternelle où, cependant, les traces immédiatement ne s’effacent pas, – pas toutes, du moins.

Voilà pourquoi la Famille à ses yeux apparaissait sacrale : où donc mieux qu’au sein de son foyer s’enjouir de voir, réel, la fine écume de l’effluence vitale, crête de vagues des âges de l’Humanité qui, tout entiers, venaient mousser dans son propre jardin en les personnes de ses chers enfants qui, plus loin que lui, à travers lui, porteraient la substance de la Vie toujours triomphante dont il pouvait alors contempler panoramique la souterraine propulsion d’une sève immémoriale prenant racine au plus profond de la mémoire collective de chaque peuple et se déployant jusques en ses plus actuelles ramifications ; celles-là mêmes qu’il contemplait alors comme autant de prometteuses inflorescences colorées aux teintes galvanisantes de sa propre race.

Oui, songea-t-il, alors, sur cette sereine et fière pensée il pouvait à présent prendre possession de sa propre fin, mener en maître sa vie à son terme, accoster sans honte, ni crainte, ni regret, aux rivages du néant qu’il s’avait lui faire face, au-delà du Visage de ce Christ de pierre dont les yeux clos semblaient attendre seulement l’accomplissement de son geste pour s’ouvrir sur sa posthume destinée. Chacun son Commandeur, pensa-t-il en affrontant une dernière fois ces pupilles figées, mais moi non plus, je ne lâcherai pas : soi-même jusqu'au bout, petit Juif, soi-même jusqu’au bout ! Ma mort, comme toute mon existence, m’appartiendra et se réalisera, symbolique, dans le prolongement fidèle de mes actes unanimes, ce depuis ma prime jeunesse ; elle fera signe, pour plusieurs générations peut-être, vers l’idéal qui fut le mien et que jamais je n’ai trahi, pas même à présent, au seuil du néant dont je triompherai par la pérennité certaine de ma race et de mon esprit.

Sur ce dernier mot, Achitophel Reverson appuya sur la détente et, dans un bruit sec d’arme précise répercuté multiple par les hautes voûtes de la cathédrale, le jus fétide de sa cervelle se répandit en glaires maintes sur l’autel et son sang chancit éclaboussa autour de sa charogne les saintes dalles du chœur. Consummatum est, crièrent alors en échos diffus les ogives horrifiées sous lesquelles, chaque jour, le Corps et le Sang réels du Christ étaient présentés aux fidèles et qui, en cette sinistre date, voyaient pour la première fois sans doute être versé le sang tourné – au sens où tourne le lait – d’une infernale crapule sacrilège.

Tout de suite, un strident hurlement s’éleva au-dessus de cette carcasse chaude, fumante comme si déjà, l’haleine létale du Diable s’employait à précipiter sa décomposition ; une mère de famille allemande, sans plus pouvoir interrompre sa stridulation, plaqua contre ses jupes le visage de sa fille afin de lui interdire la vision de telle scène. Quelque part au fond du transept, un groupuscule d’asiatiques levèrent les yeux de leurs guides touristiques et, d’instinct, portèrent à leurs appareils photographiques une rafale de mains agiles.

Comme une trainée de sang embrasée par l’astre vermeil d’En-Bas, l’horreur se répandit à grands flots, épais et bourbeux, dans l’entière cathédrale jusques au narthex où, pendant quelques minutes encore, elle fut endiguée par les portes principales du bâtiment, derrière lesquelles, à l’extérieur, les touristes continuaient de se bousculer, appareils photographiques au poing, pour profiter d’une visitée guidée du saint lieu, gratuite et, au surplus, disponible en huit langues à choix.

« Crève, os de chien. Et l’on sait bien que ta pensée n’est pas accomplie, terminée, et que dans quelque sens que tu te retournes tu n’as pas encore commencé à penser. » (A. Artaud, L’Art et la Mort)

À l’heure d’une postludant à none environ, Achitophel Reverson enfonça en sa bouche le canon d’un pistolet jusques à presque sentir en son extrémité les anxieuses trémulations de sa glotte frôlée par le métal froid, tandis qu’en face de lui, allongé sur les genoux de sa mère, le Christ mort en Croix posait sur sa tête rase deux beaux yeux marmoréens pour trois jours clos sur les ténèbres d’En-Bas. Comme toi, cher prophète, songea alors cet incroyant infusé d’un faisandé nectar de paganisme, je vais me sacrifier ! L’historien possédait son latin et d’aise tremblait à l’ouïe de ce terme dont il savourait les antiques racines : sacer facere, rendre sacré. Il sentait sourdre, comme une nappe d’eau souterraine, la tacite puissance de tel vocable, qu’à plaisir il laissait fondre en gosier et dont il avait la très physique impression de ressentir la transhistorique vitalité jusques en ses fibres les plus infimes, gorgées d’une sève nouvelle que sa particulière démence lui donnait l’impression de puiser aux directes sources des païennes origines qu’au fil des années il s’était progressivement phantasmées. De ses simulés ancêtres gaulois, il avait « l’idolâtrie et l’amour du sacrilège », comme le chantait Rimbaud, et sans doute aussi la « cervelle étroite » quoiqu’en vérité plus oblique qu’étriquée à proprement parler : son tonnage la rendait propice à l’accumulation d’un décourageant fatras de dates et de faits archivés sans autre organisation que l’architectonique principe d’idéologie sanguine qui présidait à toutes ses opérations psychiques, jusques aux moindres, quotidiennes, insignifiantes.

Ridiculement, car le canon toujours en bouche de son arme à coup unique, il sourit au Seigneur qu’il ne confessait pas ; au seuil du néant par lui supposé, il sentait poindre en un recoin de sa servile cervelle une certaine sympathie pour cet individu, sculpturellement suspendu en face de lui, dont le sang avait irrigué de surnaturelle vitalité, pendant plus de deux mille ans, l’entière existence de plusieurs dizaines de milliards d’êtres humains saisis en singularité, chacun, d’un bout à l’autre de leur intégrale personne. Le résultat certes l’enivrait mais point ne lui faisait oublier ses récriminations à l’encontre de la Religion Catholique, universelle donc, – et là ce qui le chiffonnait. Ses circonvolutions mécanisées de besogneux historien depuis mainte année à présent ne se laissaient plus enfumer par les âcres empyreumes d’une aveugle dévotion pour ce factuel succès dont il s’enjouissait, engeance aux gencives pleines d’une bouffante satisfaction égotique, d’avoir là rendus les causes objectives de tel exploit limpides. Jalon, que le christianisme, seulement ; titanesque véhicule de transmission du souffle gréco-latin dont il se faisait, au travers de ses théologiques tortillardes de l’âme, l’incontournable messager ; rien moins qu’essentiel, bien sûr, sauf à être perçu exclusivement transitif et, par-là même fédérateur. L’esprit d’Achitophel Reverson aspirait à de plus originels aspirations, spiralées à l’entrelacs du monde gréco-romain et Gaulois, symbole évident à ses yeux d’une admirable compénétration de l’éminente Raison, qu’elle soit de pure pensée ou de virulente action, et la primordiale sensibilité, sauvage à bien des égards, du monde naturel en son immédiate immanence donnée aux hommes comme l’espace d’un séjour qu’il lui incombe d’habiter en étroite complicité de respect et de sage domination.

Source immémoriale de notre Dasein européen, inépuisable résurgence d’identitaire sagesse : Homère ! Homère ! Ô Mère ! Insondable matrice d’une civilisation aujourd’hui en profonde somnolence de ses internes vibrations qui pourtant lui devraient donner sa note fondamentale, sa basse continue sur laquelle, seule, se peuvent broder les infinies vocalises des temporelles évolutions ! Quelle opportunité pour sa claudiquante idéologie de se pouvoir ainsi reposer les moignons sur le dos de ce puissant attelage dont la vigueur infernale n’a d’égal que la cuistrerie des lectures qu’il en fait ! Une épouse enlevée, une guerre provoquée, le soulèvement d’un peuple entier et de ses héros, la lutte à mort d’un grand nombre d’entre eux, la force, le sang, le sable, l’héroïsme d’âmes soumises à la Fatalité plus grande même que les dieux, ces dieux capricieux, colériques, immanents, qui alors n’avaient encore rien à voir ni avec la Justice, ni avec la Vérité ; puis, en second volet, le retour du guerrier en son foyer, là où, patiente comme la domestique statue de la Sainte Communauté, sa femme lui reste fidèle, tissant à défaut d’un texte la mémoire d’une trame où sans doute le beau visage d’Ulysse est dessiné : itinéraire initiatique lu par Achitophel comme une salvatrice régression à l’âtre bienveillant de toute saine existence, l’ombilic sacré où se noue l’âme et la vie d’un homme de bien, nobles et accomplis, kalos agatos. Que d’alambics sublimes en quoi faire bouillir et bouillonner sa singulière démence ! Que de maximes à moissonner avant que de les jeter, toutes racornies d’avoir été ainsi déracinées sans ménagement, dans le chaudron glougloutant de ses propres égarements ! « Etre toujours le meilleur, l’emporter sur tous les autres », recommande par exemple Pélée à son fils, le grand Achille. Ou encore : « Il n’est qu’un bon présage, c’est de combattre pour sa patrie ».

Chère Illiade, exultait, au seuil de l’ombre, l’hypogastrique gâteux ! Chère Illiade, chère et belle Bible des Européens, tellement plus pure à notre race que l’autre, celle qu’en partage avec les sémites nous avons recueillie à l’aurore de nos temps occidentaux, chère Illiade aux lettres d’or et de sang, tombée des mains divines d’un poète dont l’individualité historique s’est diluée à nos modernes osculations dans la prodigieuse fécondité d’une œuvre éternelle comme le cosmos héraclitéen, chère Illiade aux beaux contours, chère Illiade aux infinies coruscances, tu m’es bréviaire de l’antique sagesse boréenne, celle qui, en cet instant même, lors qu’entre mes lèvres je tiens ferme le pistolet discret de ma destinée, m’abreuve d’hédoniste vitalité et, aux marges de la mort, me donne encore la force existentielle de songer avec une sainte émotion aux surabondances de vigueur, de puissance vitale, qui s’incarnent dans la force rayonnante, indomptable, celle d’un fougueux pur-sang que se révèle être l’incoercible Achille, mais également dans le patriotisme charnel, physique, fait d’évidence sauvage et de sanguine fidélité, du sublime Hector, l’homme de la digne défaite, père exemplaire et mari d’une profonde tendresse pour la liberté de qui, avant tout, il se battra jusqu’aux Enfers.

Fontaine d’ontologique jouvence ! Point en ces capiteuses contrées du naturel nectar des arts premiers, point de transcendante intrusion morale, point de Bien point de Mal qui ne soit, en ultime instance, celui de nos chairs vivantes, vibrantes, enivrantes ; rien de moins, certes, qu’une pure anarchie, mais au contraire l’élan toujours renouvelé de valeurs vives et vivaces, inchoatives d’essence, seuls capables de gonfler les voilures de l’âme ainsi que celles de vaisseaux spartiates en partance pour Troie. « Non, lance Priam à Hélène, ma fille, tu n’es coupable de rien. Ce sont les dieux qui sont coupables de tout ! » Quelle presciente libération Homère ne se fait-il pas ici le chantre ! Foin, en ce lieu, d’abusives responsabilités cosmiques, des péchés individuels et collectifs : temps antérieurs à l’omnicastrante culpabilité qui jusques aujourd’hui se trouve gouvernante de notre continent amnésique de ses primes splendeurs. Comment dire mon adéquation aux vérités homériques qui me chantent de consonance aux oreilles tant qu’il me semble entendre la mélodie de mon propre être, singulier, ondulant musical en parfaite symbiose avec les cantilènes musculeux de ce primordial poème ? Déploiement mystique, en riche résonance de pure immanence, de la nature faite exclusif séjour de l’Homme ; pureté inégalité des appétences à l’excellence où nous appelle la beauté du monde et de notre cœur ; splendeur du respect des axes de masculinité et de féminité qui sont les pivots de toute structure sociale et, sans doute plus profondément, métaphysique ; tout cela, au sens littéral, m’enchante et m’exalte.

Pauvre Christ, ajouta-t-il en jaugeant derrière ses épaisses lunettes le Corps du Seigneur, qui fit apparition en un monde de si éclatante grandeur, fier des guenilles de paralysante compassion qui furent tiennes et dont l’Église, aujourd’hui encore, est revêtue malgré le flamboyant apparat qu’elle emprunta, savante de ses propres doctrinales faiblesses, aux fastueuses civilisations greco-latines.

N’imagine pas, Fils d’un Dieu auquel ma boîte crânienne imploserait de croire, qu’à quelques secondes de ma mort, je suis en face de toi par chrétienne dévotion pour ta chétivité sanguinolente, ton obscène souffrance, ta radicale absence à toute gloire d’action terrestre ; du sang de tes martyrs, tous crevés dans la souillure de leur scandaleuse humidité, je ne voudrais pas même pour me désaltérer : il pue la moisissure, comme un liquide qui trop longtemps aurait, en un vieux flacon fermé, fermenté en sa propre inféconde solitude, incapable d’exhaler quelque puissante fragrance que ce soit, au contraire du sang solaire de mes héros, ce sang qui fut aussi semence car versé à la gloire d’une Idée lumineuse de l’Homme, faite d’existences absolues, d’inexorable fierté et de galvanisante fidélité, assumée non point dans la puante croupissure d’une vie de rétention mais au contraire dans l’exubérant épanouissement d’une survitalité dont le suc pouvait alors être puisé aux sources mêmes de la Vie où se boit d’un cœur noble la puissance d’exister.

Non, petit juif habile, je ne suis pas là pour Toi, pas même pour ta mère à qui je préfère de loin, en matière de modèle féminin, ma chère Pénélope ; à mes yeux, ceux, acérés, de l’historien, je suis en ce fatidique instant sur l’emplacement d’un gallo-romain dédié à Jupiter. Entends-tu, Christ douloureux ? Je m’apprête à offrir ma vie en sacrifice sur le lieu d’un culte antique rendu à la plus haute instance de la religion civique romaine, édifié en terres gauloises conquises, par ceux dont en mes veines coule le sang tandis qu’en mon esprit soufflent les vents héllénistiques. C’est à Zeus intériorisé Gaulois, en quelque sorte, que je fais offrande de mon existence, à Zeus Téléïos, Zeus Ktêsios, Zeus Herkéios, Zeus Polioûkos, et Zeus Sunaïmos, enfin, dieu de la race et du droit du sang hui bafoué même par ton Église, oui, celle-là même qui pleurniche ritournelle quant à l’accueil de l’étranger et des plus pauvres et tente même, en la personne par ailleurs respectable du précédent Pape Benoit XVI d’opérer rapprochement avec l’Islam, horizon de notre péril identitaire envers quoi son rôle l’obligeait à de certaines coupables complaisantes nourries par d’absurdes espérances de prochaines fraternisations.

Ainsi soliloquait en son intérieur naphtalineux Achitophel Reverson, héraut momifié d’une part scrofulée de la françoise populace qui opposait au traumatisant reflux du réel la crustacée crispation seule envisageable pour de si étroites hures, impropres d’évidence à toute véritable pensée au même degré que leurs exécrés ennemis politiques, ces « endormis », comme il se plaisait à les nommer sans prendre conscience pour autant de n’être capable d’opposer à ce sommeil rien d’autre que sa propre psychose : rêve éveillé, certes, mais rêve néanmoins. Rêves endormis contre rêves éveillés, – tous deux phacocyteurs pantagruéliques de réalité –, tel se présentait aux temps choisi pour son suicide, l’échiquier politique sur lequel, quoiqu’en son vieil âge éloigné de tout primaire militantisme, l’historiographe des armes et de la chasse continuait en sénile soliste faire trémuler sa glotte desséchée.

Gyropracte d’aucuns concepts nationauséeux contreplaqués d’une longue, antérieure, expérience militaire au détour d’une Algérie abhorrée autonome ainsi que de maintes décoctions mentales d’hispide historien de l’héroïsme hystérique qui, plus de quatorze années durant, furent en ses relapses synapses quotidiennes et méphitiques vapeurs, Achitophel Reverson portait l’étampe de l’intellectuelle obscénité à même les rides de son haut crâne, oviforme jusques aux tristes plissures par le temps infligées à ses flaccides pommettes, absent à toute profusion capillaire comme son cœur l’était à l’effluence de sainte charité dont exsudait le surnaturel regard de Celui dont le Corps descendu de Croix gisait à quelques mètres de lui, au cœur de l’autel.

Sputateur de salissante militantise politicole en ses primes années d’égarement, baveur par la suite de stercoraires tissures textuelles où, en sa neuve vêture d’historiographe des marcescences occidentales, il se faisait graphomane distingué des protubérants enthousiasmes de sa jeunesse passés au filtre plumassier d’une sénescence qu’il désira de lettres adornée. Incomparable sachant, quoiqu’ord de corps sous d’élégants dehors qu’ores il arborait, des turpitudes détaillées d’une signifiante meute de malfaisants notoires coagulés dans les plus stratosphériques espaces d’un continent politique de funeste mémoire, malgré qu’il fût dit dextre par opposition aux sinistres qui, jourd’hui, portent certes fort bien leur spatiale étymologie ; assidu au frénétique panégyrique des incertains ancêtres Gaulois de la matrice desquels ce triste sire exultait en son intérieure monomanie généalogique se croire tout droit sorti, ce honteux géronte aspirait à la continentale consanguinité comme d’autres rêvent à l’advenue de la Cité céleste.

Empuanti d’une tellurique glossolalie de vague ascendance philosophique, Architophel Reverson s’emplaisait à répandre alentours, par feuillets d’articles ou d’entiers ouvrages, les miasmes hypogastriques qu’il travestissait analytiques et conceptuels en esquissant de sa plume cacochyme quelques volutes stylistiques par ailleurs d’un classicisme aussi aride que son regard de posthume faucon mais néanmoins propre à esbaudire le baudet de courante bauge, celui-là même qui à présent pleurait avec mainte larme de sincère diptère la disparition d’un grand historien. Comme un pesteux, sa psychique infection s’était avérée contagieuse et, quoique des prédispositions d’antériorité familiale souventefois se révélaient nécessaires, force crapule adolescente trépignait depuis quelques années à l’idée de pouvoir de ses gluantes gloses s’empommader l’ithyphalle. La France ensouchée gauloise et de fraiche génération aimait à humer les saveurs torchederchiques rémanant des nombreuses pages noircies par ce graphomane du paganisme à déambulateur schizoïde capable de se faire prime en concurrence avec l’héritage judéo-chrétien que, certes, Architophel point ne rejetait mais à tout le moins jaugeait, superbe en sa chaire de laïcarde démesure, avec une profonde circonspection, ainsi qu’un élément dont, aux entrebâillements rares de sa close sottise, il pressentait l’intellectuelle surpuissance et craignait donc de s’en trop approcher, agité d’une bien compréhensible appréhension à l’idée de voir se décomposer la risible machinerie d’archaïque rhétorique lui permettant de continuer à faire croire aux plus myopes de l’encéphale que lui avait été par nature octroyé la faculté de voler, lors même que, tel l’édénique reptile, c’était sur les torves anneaux de sa rance démence qu’il rampait entre les phrases sablonneuses de ses opera obscuræ.

La dernière en date d’icelles n’était pas de papier, d’ailleurs, mais virtuelle torchure seulement, déposée sur sa frigide page internet quelques heures avant le présent moment, dilaté en monologue par l’imminence de la mort. Saisissant, rapace arriviste de sa rance idéologie, le prétexte d’une jobarde manifestation hostile à la désignification légale du mariage dont pourtant venait d’être voté le texte, Achitophel Reverson avait en son style blet de bruyante bêtise crié à la reconquête active de la mémoire identitaire française et européenne, bavant au passage une théorisante tentative de son éthique volontaire intime dont il avait joui, dans l’instant de sa rédaction, de le savoir prophétique. À demi-mots, il avait annoncé l’acte que maintenant, dressé de toute sa crasseuse carcasse, il s’apprêtait à accomplir pour rompre la lente léthargie en quoi ses contemporains s’enfonçaient depuis plusieurs décennies, peut-être plus encore. Rédigeant ces lignes, renforcée d’une indigne prise en otage d’un concept heideggerien, l’historien avait été traversé d’un frémissement prolongé de sensuelle délectation, comme si la promiscuité soudaine, accrue par ses transcrites pensées, avec le trépas était parvenu, l’espace d’un instant, à rendre à ses chairs algides une diffuse sensation d’érotisme. Oui, se souvenait-il, cela avait bel et bien été quelque chose comme une érotisation de tout son être soudain fait érectile pistil de sa Cause florescente dont il humait alors le parfum corsé à pleines narines, quelque chose comme l’éveille galvanisant de ses plus charnelles propulsions idéologiques, rubescentes d’enthousiasme ainsi qu’un visage empourpré de fiévreuse fierté, celles-là mêmes qui avaient portées ses jeunes années aux plus extrêmes actions, toujours bouillantes de n’être pas abouties.

Mais à présent, en cette terne journée d’un printemps en demi-teinte, l’aboutissement de son entière existence lui était prochaine, à portée de sa main agile encore, qui certes point ne tremblaient lorsqu’elles caressaient, en un geste de dévotionnelle volupté, la petite arme chargée qu’il avait placée aux côtés de son ordinateur, espérant peut-être d’inconsciente façon la bienveillante et silencieuse protection de cet objet fascinant. De tout temps, en effet, Achitophel avait aimé les armes, qu’elles fussent de chasse ou de guerre, peu lui chalait, du moment qu’elles portaient la surhumaine puissance d’amener l’Homme aux confins de ses propres exigences, de le retrancher en ses plus profondes cavités ontologiques ; il avait toujours aimé, et encore aimait bien sûr, cet instrument destinal par excellence, seul capable d’amener les plus lâches, les plus vils pourceaux de l’humanité à une salvifique confrontation avec leur propre destinée. À cette petite mécanique, ingrate d’apparence, des vies entières pouvaient être suspendues, soudainement, compressées en leur ombilic obombré de mystère, portée comme la jouissance mâle à leur explosive acmé, instantanée, compacte dans le Temps ainsi qu’un astre occlus d’où pas même la lumière d’une mythologique Résurrection ne pourrait s’échapper.

Pourquoi, dans le fond, n’avoir pas choisi la corde ? L’idée, certes, l’avait traversé, en réminiscence peut-être de ce texte de Claudel, lu jadis, vite oublié cependant, La mort de Judas : « Maintenant retenu par un fil imperceptible, s’y explique l’apôtre félon, je peux dire qu’enfin je m’appartiens à moi-même. » Mais non, telle n’était pas sa volonté, quoiqu’il sentît avec le Pendu d’Haceldama plus d’une secrète affinité quant à l’impatience politique qui lui avait valu, selon la Bible, l’éternelle damnation ; lui-même ne désirait pas de s’appartenir seulement pas bien plutôt d’être lui-même de la plus exhaustive façon. Engrossé des tautologies thaumaturgiques d’une esquisse d’impensée désirant faire du Sujet humain le maître radical de son existence, face à quoi seul le néant se dresse altérité, l’esprit d’Achitophel rêvait à la domination de son être en toutes parcelles et en toutes mondaines prolongations. N’étant rien, étron étriqué d’un Fixe Néant politicard, il aspirait à le rester jusqu’aux ultimes seconde de sa vie afin que de pouvoir faire, sophiste, de cette fidélité à sa propre vacuité l’élément premier d’un remplissage posthume d’icelle. Sa libido torsadée au brasier de sa politique démence se boursoufflait d’humeurs lascives à l’idée d’être par lui-même déproprié de la fine point d’intimité qui persiste, en toutes circonstance, à saillir au crépuscule de l’existence, comme ultime trace de l’immarescible dignité singulière de tout Homme : la mort, bien sûr. Gandin des notions métaphysiques comme des analyses géo-politiques, l’historien phantasmait pouvoir offrir sa vie à la Cause qu’il défendait : ce faisant, il ne pourrait que s’y dissoudre, intégralement, comme pincée de sel dans l’eau. Son famélique encéphale s’arrêtait aux immédiates conséquences, qu’il prévoyait moussantes : articles de journaux, hommages de l’âme en peine marine en tête de sa frontale corporation dextre aimante, soutien probable d’un boudin en lard catho de même tendance quoique modérée, bref, amplification médiatique de la puissance singularisante de son acte qu’il espérait offrande.

Par malfortune, le dernier mot ne serait, de toute évidence, pas celui-ci. Les sistres des pitres sinistres, en un premier temps, se gausseraient de tel vieux bonze et peut-être même à son sacrilège ajouteraient ajouteraient l’abjection d’une caricature, élevant alors au carré la saloperie infâme dont il s’apprêtait à se faire acteur et victime, les veinules du crânes bouffies de mégalomanique salauderie. En second temps, petit-à-petit, l’oubli touffu des irréelles époques post-historiques se chargerait de recouvrir ce crime vertigineux d’un voile dédaigneux d’inconséquence et d’insignifiance, le renvoyant en quelques mois sans doutes aux limbes brumeuses de la Grande Fiction où s’épanouissaient alors les sortilèges de Léthé, érigée tutélaire par les modernes simulacres qui composent l’humanité occidentale du XXIe siècle. Sa mort serait alors expurgée de toute humaine singularité, désossée de toute charnelle intimité, purgée de toute ontologique originalité, élevée à l’insigne horreur d’être classée acte politique, autrement dit acte publique, publicitaire peut-être, donc à l’exact opposé de toute véritable et profonde intimité. Possédé, d’évidence, l’historien aspirait à se déposséder de lui-même dans l’espoir illusoire de se pouvoir appartenir tout entier par ce geste même, – ruse du Démon qui fait voir à sa proie le monde à rebours, au miroir du néant où l’image hypnotique du sujet lui devient visible, et comme telle désirable.

Sa notule internautique terminée, il avait consciencieusement rangé le pistolet dans la poche de son imperméable et, une dernière fois, se laissait aller la bouffée tiède de fier bonheur qui remontait en lui lorsqu’il contemplait une des photographies familiales les plus réussies, celle où, en costume de chasse, deux lapins à la main, il trônait emmi ses cinq enfants, jeunes alors, et son épouse rayonnante de tendresse conjugale à ses côtés. D’aise, il avait soupiré : fasse la puissance symbolique de mon acte qu’ils trouvent tous la force de durer…

Ses craintes, à dire vrai, s’affirmaient ténues ; il savait ses enfants réceptif à l’éducation en forme de dressage neuronale que, de concert avec sa chère femme, il était parvenu à leur infliger dès leur plus jeune âge afin de ne subir d’eux aucune déception, de quelque sorte qu’elle pût être. Sa descendance était à l’image de son Idéal et, plus loin que lui encore, elle porterait la splendeur d’un héritage aujourd’hui bafoué par une frange fangeuse de la population française, manipulée par la mafia communiste qui tenait en ses filets jusques aux partis désignés de droite par d’aucuns naïfs fumistes en science médiatique. Après lui, en sa race perdurerait son esprit, et c’est là tout ce qu’il attendait de la mort. Prolonger sa race ! La faire perdurer ! Quel plus belle et ample expérience pouvait bien vivre un homme ? Concevoir l’incarnation même de son propre esprit, – à tout le moins ceux qui, avec un peu de méthode et de volonté, pourraient devenir tels ; quelle griserie métaphysique !

Y a-t-il plus belle idée que celle de lignée ?, demandait-il à présent au Christ figé à quelques mètres de lui dans le marbre d’une pièta de Nicolas Coustoues. Bien sûr, toi, superlatif célibataire né d’une Vierge et participant pleinement à la nature de son Père, tu ne peux entendre d’une oreille compréhensive telle émerveillante perspective, toi qui a su conceptualiser une origine trimodale, engendré par le Père, conçu par le Saint-Esprit et, enfin, né de la Vierge Marie, tu ne peux rien entendre à l’exaltation d’une procréation univoque, totale, nécessaire et pourtant consentie de libre volonté. Tes vicaires mêmes, ces Papes, n’obéissent pas au principe dynastique à quoi sont toutes les monarchies du monde soumises, ou peu s’en faut, car l’Église, ton Église, depuis toujours se méfie des lignées qu’elle sait lui pouvoir échapper, comme le fit par exemple Henri VIII et, depuis, l’intégrale monarchie anglaise. Je sais bien qu’il y a d’augustes nigauds pour affirmer que c’est précisément là que se loge son principe de pérennité, mais je n’accorde aucune foi à leur bancroche raisonnement car ce serait faire fi de l’égale longévité des autres maintes religions qui sont autant de survivances en mon époque de générale déliquescence. Foutaises donc, bientôt par pleines fournaises oubliés des quelques illuminés responsables de celles-ci. Par contre, pauvre Jésus, ce qui m’apparaît évident, c’est la multicentenaire responsabilité de ton Église, point seule certes en cause, dans ce que le bel écrivain contemporain Renaud Camus nomme le « grand remplacement », cette générale tentative d’atteindre définitivement à la pureté d’une race, nôtre, boréenne disons, par l’encouragement frénétique d’une immigration massive en provenance des pays arabo-musulmans. La Charité, dit le Pape !...

Son pistolet en bouche, Achitophel Reverson ne put s’empêcher de ricaner, – quoique peut-être était-ce tout intérieur car il lui sembla que nul son de s’extrayait de son gosier obstrué. La Charité prélude à la charia maîtresse sur nos terres, peut-être ! Nous verrons à ce moment-là, lorsque l’Europe sera passée sous domination arabo-musulmane, ce qu’il en sera des immigrants inaptes à toute conséquente intégration, atrabilaires de leurs idiomes comportementaux et se refusant à tout effort de transformation qu’en revanche, sur les territoires par eux conquis à la force de l’épée, ils exigent des plus infimes touristes ; et ce bien sûr sans nulle discussion possible. En nos temps post-modernes, le cadavre encombrant de la chrétienté morte depuis plusieurs siècles n’est d’aucun secours face à la déferlante islamique dont l’Occident est aujourd’hui passive, voire consentante victime. C’est pour cette fondamentale raison que mon cœur politique est porté à l’absolue laïcité. Non point celle, tiède et hypocrite, des liquides socialistes qui s’affairent sous couvert de laïcité à faire expier l’Église Catholique des crimes dont, auparavant, ils ont pris soin de la badigeonner avec épaisse complaisance, non, celle plutôt de mon cher Parti, mon Parti-Pris en toute chose d’importance, celle qui en son nom m’a poussé à maintenir vivace jusques à cet instant mon combat contre le port du voile dans l’espace publique qui n’est que le sordide étalage d’un choix confessionnel privé. Étalage publicitaire, devrais-je dire puisque le but insu volontairement – d’aucuns se voilent la face ! – est bien entendu de faire participer de ce fait toutes les femmes musulmanes d’Europe à la disparition de la civilisation qui est depuis plusieurs millénaires attachées à ce continent. Laïcité sans concession, donc, c’est-à-dire rigoureuse interdiction de tout signe distinctif religieux sur la voie publique, que religieux soit ici attaché au Christianisme, à l’Islam, au Bouddhisme ou au Judaïsme, bien sûr, qui trop souvent à mon goût fait exception en tout, sur tous les plans.

Alors, Christ, me diras-tu sans doute : que faire à ce moment de la pléthore de petits salopiauds évangélisés qui se réclament de ton Église et cependant, contre tous tes principes amaigrissants de Justice sociale et de Charité universelle, se font un honneur de chanter à l’unisson les hymnes de la dextre émise radicale ? Les faire abdiquer leurs principes, tout simplement, s’ils sont nostalgiques des chouans ou de quelque autre sympathique folklore local dont la Droite agissante ne peut s’encombrer en son actuelle et fulgurante ascension. Naguère, déjà, les républicains au postlude de la Révolution, enseignaient aux petits français qu’ils avaient pour ancêtres les Gaulois, – exclusivement. L’évidence historique, lors, ne faisait point encore trembler les doxiques élites d’un pays ne se désirant plus autre chose que réceptacle d’une Altérité glorifiée messianique cependant qu’icelle, à la vue de tous, réduit consciencieusement son réceptable en miettes afin de mieux pouvoir, sur les débris, construire le croissant triomphant de son succès civilisationnel.

Les disciples du Christ, en effet, même faux, même maurrassiens, même en ces temps d’avancé sabordage du Catholicisme par ses propres troupes, n’étaient pas en tant que tels immédiatement bienvenus au sein de la congrégation dont était membre Achitophel Reverson et qu’il rêvait faites d’âmes vigoureuses des influx antémémoriaux d’un passé pré-chrétien seul capable d’encore sauver l’identité d’un Monde qui jouissait de son propre effondrement, transmué progrès sous l’effet des vapeurs toxiques d’une infernale idéologie de l’autruche collective.

Pourtant, les susmentionnés n’étaient pas sous menace d’extinction, que du contraire ! Le catholique dextrophile ne s’était peut-être jamais aussi bien porté, et ce en très large partie grâce à Maurras et son politicisme exacerbé qui, s’il lui avait valu de sévères remontrances du Saint-Siège, le firent en revanche triomphant en postérité jusques à présent où la jeunesse catholique, massivement inapte au moindre mysticisme, trouve dans l’excitation politique moyen de soulager ses vibratiles muqueuses sans faire l’effort d’y adjoindre la plus infime part d’activité pensante. Ceux-là font de la politique comme d’autres se lustrent le priape : à des fins de pure vidange. Ne pouvant point copuler en bonne conscience avant le mariage, la neuve jeunesse catholique se lance à corps perdu dans la politique afin de compenser par-là l’inertie forcée de leur libido pré-conjugale. Le catholique juvénile de moderne extraction, par essence, est ignare de familiale tradition ; scout toujours, car dès ses premiers balbutiements dressé au groupal compulsif, il fait ses classes plutôt que ses humanités et n’entend rien à son propre patrimoine culturel, par-dessus tout littéraire. Au contraire d’Achitophel qui, dès ses plus jeunes années, avait saisi la nécessité d’enrober toujours de voluptueux colifichets érudits l’excrémence qu’il avait élue doctrine d’existence, l’adulescent d’ascendance cathoblique se revendique insavant de toutes importances littéraires de son propre horizon et s’enténèbre à préférer, malgré les efforts de Benoit XVI, le rock chrétien aux Messes de Mozart, tout comme d’ailleurs il préfère la lecture d’aucun fabriquant factice d’adjadjantises théâtrales aux chefs-d’œuvre de Claudel. Tribordosensible parce que ses ainés le furent, qui jà s’imaginaient que la carte d’un parti de Droite était nécessaire à l’usage hebdomadaire des bancs dominicaux, il croit autant en son Dieu qu’en celui, caniveau d’or, de la contemporaine politique de post-histoire et s’acharne en acte vociférant à nous faire savoir l’inexpugnable évidence de telle abusive intrication conceptuelle.

Pourtant, même si tel petit impatient de Cité céleste se voyait constitué de bas en haut pour plaire à la dextrême, Achitophel Reverson ne comptait point trop sur eux pour s’émanciper des châtrantes prolongations inconscientes d’Évangile qui, toujours, risquaient en eux de faire reflux et d’ainsi les faire céder aux consanguin nonchaloir d’âme dont se nourrit, en principale substance, le christianisme analysé par les bons soins du très objectif historien.

Son amour immodéré pour sa famille, et en générale pour la Famille, n’était donc en rien enraciné en terreau chrétien et l’humide nuage d’émotion qui lui était monté aux yeux lorsqu’il les avait posé sur le portrait photographique familial était d’un tout autre ordre, identitaire bien sûr. Sa famille, plus traditionnelle que la Sainte Famille traversées d’internes complexités qu’il ne désirait pas même se donner la peine de penser avec rigueur, sa famille était pour lui le socle immémorial d’une identité communautaire que sa dissolution ferait sans délais voler en éclats. Homère toujours, – qui structurait à hauteur de mélecture faite par lui de ses deux grands poèmes l’intégrale dialectique d’où, sans exception, découlait la sienne idéologie. La Nation sauvée par le foyer, la Nation tressée au foyer, l’une survivant en l’autre, l’autre en l’une, le tout impeccablement imbriqué comme rouage d’horlogerie. Hector support d’Ulysse, et vise versa, l’un portant l’autre à son épanouissement, duquel germe à nouveau le premier, ce en une éternelle rotation de la dyade souveraine sur elle-même. Achitophel Reverson participait du culte de la famille sacrée, mais telle par dynastique nécessité car seule une forte cohésion familiale pouvait permettre à une nation de persister en unité et de n’être pas dissoute en quelques années par l’acidité des intérêts et personnalités particulières qui, on le sait depuis Platon, doivent céder aux exigences communautaires pour le bien de la cité.

Parcourant d’un bienveillant conspect l’ensemble de sa puérile tribu, il s’était d’ailleurs imaginé la beauté d’une nation fondée sur un semblable modèle, efficace à échèle de population : la consentante acceptation d’une autorité sue compétente, à laquelle le peuple de ce fait pouvait s’abandonner, en un premier temps, sans crainte d’être floué de quelque façon que ce pût être, voilà le principe essentiel de toute archie, qu’elle fût monarchie ou démocratie antique. Mais pour un tel résultat, si réjouissant, il fallait que ladite autorité se pût appuyer sur un héritage riche et fécond, une tradition de représentations éthiques et ontologiques fortes, propres à soulever les foules comme la houles d’une mer aux flots excités par le trident de Poséidon ; ce que lui, Achitophel Reverson, inlassable lecteur d’Homère et d’Héraclite, pourri pourceau enflé aux gaz intestinaux de l’Action Française, avait accompli au sein de sa famille où par ailleurs il avait toujours été, pour sa part, comblé d’amour.

Son ultime pensée sera-t-elle donc pour ses proches, pour ceux dont il savait qu’ils souffriront du geste qu’il s’apprêtait à commettre, sacrilège immonde que démiurgique démence lui permettait de ressentir ainsi qu’un acte militant, quelque chose comme un haut sacrifice fait à sa patrie française et européenne ?

Peut-être, en fin de compte…

Il se souvint alors d’une certaine après-midi de printemps bourgeonnant, dans le petit jardin clos de sa résidence de campagne, lorsqu’entre deux et neuf ans s’échelonnaient les âges de sa guirlande bambineuse dont les divers éléments s’agitaient alentours en clameur vague qu’une seule sévère interjection de sa part suffisait à réduire au silence de la brise dans les feuilles d’un vieux tilleuls rongé de mousse. Folle d’aise à la sensation nette du retour des beaux jours, sa progéniture multiple prenait particulier plaisir à savourer en nombreuses roulades l’herbe fraiche et verte à nouveau, douce et chatouillante à la fois. De la table où, au soleil tiède du mois de mai, il terminait la relecture des épreuves de son dernier ouvrage, Achitophel Reverson avait un instant été saisi par la primitive beauté de cette scène, simple d’apparence et pourtant à ses yeux portant en elle, discret, le murmure sublime de la réelle sacralité du monde naturel. Cette joie pure, symbiotique, qui semblait unir les fruits de son sang aux neuves efflorescence de la Terre, cette sérénité sous-jacente à l’enfantine agitation des derniers membres de sa race lui avaient, l’espace de quelques miraculeuses minutes, rendus la divinité du cosmos palpable, immédiatement perceptible, comme évidente, lumineuse, s’extravasant à grands flots de rayons d’or et d’argent de chaque parcelle mouvante de réalité qu’il avait devant lui, inondant d’une coulée de nitescence glorieuse les phénomènes alentours.

Durant quelques précieux instants, il s’était senti plongé dans la chair tendre, fraiche, comme ensoleillée de l’intérieur, d’un Renoir, mais un Renoir où, comble de l’exaltation, ses propres enfants se seraient retrouvés propulsés par quelque mystérieux sortilège ; et voilà donc sa descendance projetée à hauteur d’art, faisait surgir de leur involontaire candeur la substance puissamment, primitivement esthétique du Monde rendu à sa matricielle innocence, tel que, précurseurs en tout, les Grecs jà l’avait pensé : déploiement ininterrompu de forces vitales, chaotiques parfois, ordonnées en d’autres temps, équilibrées toujours en finale situation. Quelle douce fierté de contempler, à quelques mètres de lui, les chastes ébats de la Vie même en son renouveau, scène où congruent en une surprenante harmonie le bourgeonnement de la Nature et les derniers effloraisons de l’espèce humaine, nées de sa propre chair, qui s’éveillent à la fugace beauté du monde en s’y frottant, au sens propre, comme si leur plus cher désir était de retourner à un parfait état de contemplation primitive.

Splendeur colossale des flux de générations, immémoriaux, qui déferlent sur le Temps depuis la naissance de l’Humanité ! Sempiternel mouvement des vies et morts individuelles, maintes, infinitésimales, œuvrant de concert, tacite et su pourtant, à la marche solennelle et imperturbable des cycles de la Vie. Homère, encore et toujours ! « Comme naissent les feuilles, ainsi font les hommes. Les feuilles, tour à tour c’est le vent qui les épand sur le sol et la forêt verdoyante qui les fait naître quand se lèvent les jours du printemps. Ainsi des hommes : une génération naît à l’instant où une autre s’efface. » Flux et reflux des générations, comme la mer sur le sable d’une plage éternelle où, cependant, les traces immédiatement ne s’effacent pas, – pas toutes, du moins.

Voilà pourquoi la Famille à ses yeux apparaissait sacrale : où donc mieux qu’au sein de son foyer s’enjouir de voir, réel, la fine écume de l’effluence vitale, crête de vagues des âges de l’Humanité qui, tout entiers, venaient mousser dans son propre jardin en les personnes de ses chers enfants qui, plus loin que lui, à travers lui, porteraient la substance de la Vie toujours triomphante dont il pouvait alors contempler panoramique la souterraine propulsion d’une sève immémoriale prenant racine au plus profond de la mémoire collective de chaque peuple et se déployant jusques en ses plus actuelles ramifications ; celles-là mêmes qu’il contemplait alors comme autant de prometteuses inflorescences colorées aux teintes galvanisantes de sa propre race.

Oui, songea-t-il, alors, sur cette sereine et fière pensée il pouvait à présent prendre possession de sa propre fin, mener en maître sa vie à son terme, accoster sans honte, ni crainte, ni regret, aux rivages du néant qu’il s’avait lui faire face, au-delà du Visage de ce Christ de pierre dont les yeux clos semblaient attendre seulement l’accomplissement de son geste pour s’ouvrir sur sa posthume destinée. Chacun son Commandeur, pensa-t-il en affrontant une dernière fois ces pupilles figées, mais moi non plus, je ne lâcherai pas : soi-même jusqu'au bout, petit Juif, soi-même jusqu’au bout ! Ma mort, comme toute mon existence, m’appartiendra et se réalisera, symbolique, dans le prolongement fidèle de mes actes unanimes, ce depuis ma prime jeunesse ; elle fera signe, pour plusieurs générations peut-être, vers l’idéal qui fut le mien et que jamais je n’ai trahi, pas même à présent, au seuil du néant dont je triompherai par la pérennité certaine de ma race et de mon esprit.

Sur ce dernier mot, Achitophel Reverson appuya sur la détente et, dans un bruit sec d’arme précise répercuté multiple par les hautes voûtes de la cathédrale, le jus fétide de sa cervelle se répandit en glaires maintes sur l’autel et son sang chancit éclaboussa autour de sa charogne les saintes dalles du chœur. Consummatum est, crièrent alors en échos diffus les ogives horrifiées sous lesquelles, chaque jour, le Corps et le Sang réels du Christ étaient présentés aux fidèles et qui, en cette sinistre date, voyaient pour la première fois sans doute être versé le sang tourné – au sens où tourne le lait – d’une infernale crapule sacrilège.

Tout de suite, un strident hurlement s’éleva au-dessus de cette carcasse chaude, fumante comme si déjà, l’haleine létale du Diable s’employait à précipiter sa décomposition ; une mère de famille allemande, sans plus pouvoir interrompre sa stridulation, plaqua contre ses jupes le visage de sa fille afin de lui interdire la vision de telle scène. Quelque part au fond du transept, un groupuscule d’asiatiques levèrent les yeux de leurs guides touristiques et, d’instinct, portèrent à leurs appareils photographiques une rafale de mains agiles.

Comme une trainée de sang embrasée par l’astre vermeil d’En-Bas, l’horreur se répandit à grands flots, épais et bourbeux, dans l’entière cathédrale jusques au narthex où, pendant quelques minutes encore, elle fut endiguée par les portes principales du bâtiment, derrière lesquelles, à l’extérieur, les touristes continuaient de se bousculer, appareils photographiques au poing, pour profiter d’une visitée guidée du saint lieu, gratuite et, au surplus, disponible en huit langues au choix.

Romain Debluë, 23-24 mai 2013

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...L'amour s'est en effet "refroidi »  ... la charité fait face à l'empire aujourd'hui planétaire de la violence....

Cette montée vers l'apocalypse est la réalisation supérieure de l'humanité. Or plus cette fin devient probable, et moins on en parle.

Il faut donc réveiller les consciences endormies.

Vouloir rassurer, c'est toujours contribuer au pire.

René Girard.

  

 

  "L'esprit constitue un champ de relations tourné vers la totalité de ce qui existe "  Joseph Pieper

Loin que ce soit être qui illustre la relation , c'est la relation qui illumine l'être.     Gaston Bachelard

Les composantes de la société ne sont pas les êtres humains, mais les relations qui existent entre eux.   Toynbee

 

 

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