Même
: Il me semble que
vouloir consacrer une année à l’inconscient « Avant et après Freud »
de JM Vaysse, ne présente pas tellement d’intérêt. Comme tu sais, je
n’ai guère de considération pour la psychanalyse…. « une maladie qui
se prend pour un traitement »
Soi :
Un peu facile …
tu n’y connais rien. Comme chaque fois, il vaut toujours mieux
chercher à connaître ce que nous évitons ou qui nous irrite, plutôt
que ce qui nous confirme dans nos opinions, notre conception du
monde…Progresser c’est vouloir élargir sa conscience. « Toute
conscience élargie appelle une Weltanschauung (une grille de
lecture du
monde). Toute conscience de raison et d'intentions est déjà
Weltanschauung en germe. Tout accroissement de connaissance et
d'expérience est un pas de plus vers son développement. En d'autres
termes , il n'est pas indifférent que l'on ait ou non une
Weltanschauung, ni de quelle sorte elle est; car non seulement nous
créons ainsi une image du monde mais, par un choc en retour, cette
image du monde nous transforme à son tour. »
(3)
Même
: ….
Et bien … de quoi as tu pris conscience ?
Soi :
Si la conscience distingue l’homme de l’animal et il me semble que ce
que nous devrions appeler « l’évolution de l’homme » c’est
l’évolution de sa conscience. C’est dans cette vision qu’il faut
situer les apports de Freud , de Jung et de bien d’autres avant et
après. Par contre, « le concept moderne d'inconscient psychique peut
être attribué à Sigmund Freud. Celui-ci a eu le mérite de l'appliquer
à des cas individuels et de nous sensibiliser sur des méthodes
d'investigation pour des patients atteints de troubles psychiques. »
(1)
…
Même : Tu vois bien
ces « théories » sont bâties à partir de malades …donc pour des
malades …
Soi :
D’une certaine façon
tu as raison. Le conseil que Freud nous donne : « Entre en toi-même,
dans tes profondeurs, et apprends d'abord à te connaître, alors tu
comprendras pourquoi il te faut devenir malade, et tu éviteras
peut-être de le devenir »
(2)
Même : Cela me fait
penser à cet encart, de la revue grand public : Psychologie(6),
trouvée dans une salle d’attente d’un médecin, et qui sous
l’intitulé : « Le plaisir selon Freud »… nous explique : « La
recherche du plaisir est le but de la vie. Mais ce que Freud entend
par plaisir n'a rien d'excitant. C'est tout simplement l'absence de
souffrance, un état de quiétude qui nous rend suffisamment disponible
pour penser, travailler et avoir de bonnes relations avec nos proches.
Mais la tâche est éreintante, car notre « moi » subit en permanence
des assauts du « ça » des pulsions qui réclament leur dû, sans se
soucier du bien et du mal. « Je veux ! » hurlent-elles. « Je veux
voir, toucher, prendre, aimer, être aimé, avoir à manger jusqu'à la
nausée... » Puis il y a le « surmoi », ce juge intérieur qui nous
pousse impitoyablement à faire plus, à faire mieux, à égaler nos
idéaux : mission irréalisable, naturellement. La satisfaction totale
est donc impossible, le désir jamais comblé, d'où, forcément,
frustration, dépression, névrose. Dès lors, on saisit mieux que cinq
minutes sans souffrance puissent rimer pour Freud, avec plaisir. »
(4)….
Soi :
Il est certain que Freud fut un grand déconstructeur.(3) Il le
reconnaît lui même en avouant : « J'ai passé vraiment une grande part
de ma vie à travailler à la déconstruction de mes propres illusions et
de celles de l'humanité. » (2) Mais lors du XXe siècle, s'offrirent
tant d'occasion de démolir qu'un Nietzsche n'a pas suffi non plus.
Freud s'est chargé de ce qui restait, et il l’a fait à fond. Mais il a
éveillé une méfiance salutaire, et ainsi aiguisé indirectement le sens
des vraies valeurs. Le vertige de l'homme bon qui obnubilait les
esprits, alors qu'il ne pouvait plus comprendre le dogme du péché
originel, a été en très grande partie démolie par Freud. (3)
Même :
Je comprends ….Mais cette « déconstruction » se poursuit. Nous la
voyons tous les jours à l’œuvre …l’ADN, la cellule, l’embryon, la
différenciation sexuelle, la famille, la nation, la délocalisation,
l’histoire, les langues, les cultures … la vie. Ce qui permet à Peter Sloterdijk, philosophe contemporain d’écrire : « L’AVIDITE EST AU
POUVOIR » : « Pendant
toute l’histoire des civilisations spirituelles, on a commis l'erreur
de chercher l'homme nouveau vers le haut. Aujourd'hui, on assiste à
une expérience aussi inouïe que plausible : la culture de masse nous
livre la preuve que l'homme possède le potentiel de dépasser l'homme
vers le bas, et cela, à ce qu'il paraît, infiniment. L'homme nouveau
post-spirituel est le maximisateur du métabolisme à tous les
possibles de la consommation -- ce que les futurologues ont appelé le
« prosommateur » parce qu'il produit en consommant.
(7)
Ou à notre médiatique Michel Onfray de faire sienne cette maxime de
Chamfort «Jouis et fais jouir, sans faire de mal ni à toi ni à
personne, voilà, je crois, toute morale »
(7)
Pas beau ça ? .. Guère
réjouissant tous ces « maximisateurs », prêts à sacrifier l’être
humain à leur « profit ». .... L’homme en auto-consommation ?. … La
fin de l’humain ?
Soi :
Peut-être !… mais cela dépend à présent de chac-UN d’entre NOUS. La
vie n’est pas linéaire. « Là où croît le péril, croît ce qui
sauve. » A nous d’en prendre conscience et la conscience du monde
s’élargira.
Grâce au
groupe, j’ai découvert « l’Ame et la Vie » de Carl Gustav Jung
(3),
disciple de Freud, dont il s’est très vite distancé…et curieusement
non mentionné une seule fois dans le livre JM Vaysse,
professeur de philosophie qui nous a servi de fil rouge…
Dans une
interview donnée à un journaliste du New York Times, Jung, en 1953,
s'exprimait ainsi : "Il est beaucoup plus important d'avancer des
faits qui exigent une conception radicalement différente de la psyché,
c'est-à-dire de nouveaux faits inconnus de Freud et de son école. Il
n'a jamais été de mon propos de critiquer Freud à qui je dois
tant. J'ai été beaucoup plus intéressé par la poursuite de la route
qu'il a tracée, c'est-à-dire de pousser plus loin la recherche sur
l'inconscient qui fut si tristement négligée par sa propre école."
(6)
En 1934 déjà, Jung écrivait: " Mais il est encore une
chose que je voudrais vous dire : ce qu'on appelle exploration de
l'inconscient dévoile, en fait et en vérité, l'antique et intemporelle
voie initiatique. La doctrine de Freud est une tentative
d'ensevelissement pour se protéger des dangers de la "longue route",
seul un "chevalier"
risquera "la queste et l'aventiure"
(en français). Rien ne disparaît définitivement, c'est l'effrayante
découverte de tous ceux qui ont ouvert cette porte. Mais l'angoisse
primordiale est si grande que le monde est reconnaissant à Freud de
constater "scientifiquement" (quelle science bâtarde !) qu’on a rien
vu derrière cette porte. Or ce n'est pas mon simple "credo", mais
l'expérience la plus importante et la plus décisive de toute ma vie :
cette porte, une porte latérale toute banale, ouvre sur un étroit
sentier, d'abord anodin et facile à embrasser du regard, - étroit et à
peine marqué parce que bien peu seulement l'ont suivi - mais qui mène
au secret de la métamorphose et du renouveau. »
(6)
Même :
Je comprends que Sigmund et Carl Gustav se soient séparés …
pour l'un l'inconscient est une cave... pour l'autre cette cave est un
sas avec une porte-fenêtre ouvrant sur un chemin.
Soi :
En effet, pour Jung l'inconscient individuel n'est pas vierge à la
naissance, il est rempli de ce qu'il qualifie d’archétypes c'est à
dire de " symboles " très anciens dont on retrouve des traces dans
tous les mythes et les légendes primitifs. »
(5) Il
ne se compose pas uniquement d'éléments du passé refoulés, mais il
contient les germes de toute activité créatrice. Il constitue une
sorte de matrice du conscient, capable d'autonomie et d'action
spontanée sur le conscient. En entrant en contact avec lui, la
personnalité tout entière peut en être modifiée, renouvelée. C'est
l'individuation que Jung découvre à l’œuvre, sur lui-même et chez ses
patients, en "laissant advenir", c'est-à-dire en n'intervenant pas et
en observant, à travers les rêves, l'émergence d'un processus
(7)
« Cette prise de conscience ne
sera pas facile ni facilitée. Il est évident que la libération des
préjugés matérialistes et religieux modifierait la plupart des formes
de la vie présente. Mais la société économique s’opposera de toutes
ses forces à ce progrès de la pensée »…(3)
C.G. Jung représente un aspect
essentiel de la pensée occidentale au XXe siècle. Sa vie tout entière
a été une longue quête de la vérité intérieure ou, pour reprendre ses
propres termes, «l'histoire d'une réalisation du Soi par
l'inconscient». « Mais pourquoi diable, allez –vous certainement
me demander, l’homme doit-il à tort et à travers atteindre une plus
haute conscience ? … C’est une profession de foi en l’être humain le
plus conscient et le plus évolué.» C.G. Jung