....homme - femme ... l'altérité fondatrice

Dossiers : l'homme et la femme  le couple H&F 

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de la relationnalité : ...

 E T

..la philosophie rationaliste, avant Hegel notamment, n'a pas considéré le mystère trinitaire comme digne d'intérêt pour la raison. Par ailleurs, les spéculations trinitaires médiévales à dominante ontologique ayant insisté sur les propriétés des personnes, et leur commune nature, ne semblent pas les mieux adaptées pour entrer dans la profondeur du mystère.

 

 EN UN   .. du mystère conjugal ....

...saint Augustin : « Pourquoi laisser papilloner çà et là ta pensée ? Dieu n'est rien de tout ce que tu imagines, rien de tout ce que tu crois comprendre. Tu veux en avoir quelque avant-goût: Dieu est amour (caritas). » C'est donc sous l'angle de la charité et de la relation que nous nous approcherons du mystère. Cette approche devrait nous permettre d'articuler des concepts aussi centraux que ceux de personne, de relation, de don, de pluralité et de différence, de communion et d'unité.

Quand le mari et la femme s'unissent dans le mariage,

ils ne forment pas une image de quelque chose de terrestre,

mais de Dieu lui-même'.

Au coeur du mystère trinitaire.

 

Ceci est mon corps livré pour toi

 

commentaires en relation....:  .... de l'homme ET à l'homme EN ...

l'homme TRINITAIRE ...

EN autopoïèse

..... contribution au Synode 78 ...

Dieu créa l'homme à son image, à l'image de Dieu et il le créa, homme & femme il les créa.

La cellule de base de l’humain est l'Ensemble homme-femme (polarité plus -- interrelations -- polarité moins) foyer du développement intégral de l'humain EN  relation d'amour comm-union de proches EN Dieu

L’amour EN est relation . C’est la relation qui colore les polarités et non l’inverse.

voir :

Le couple Homme&Femme, foyer EN la famille de la relation d’amour

Caritas in veritate  ....La vérité doit être cherchée, découverte et exprimée dans l' « économie » de l'amour, mais l'amour à son tour doit être compris, vérifié et pratiqué à la lumière de la vérité.  Benoît XVI

 

Présentation :... titre du LIVRE ...Homme et femme ... l'altérité fondatrice  cerf 33 euros

Auteur:   François de Muizon

Date : 23.05.10

 

4ième page de couverture du livre

 

L'irréductible dissymétrie entre le génie féminin et le génie masculin, source inépuisable de signification, constitue sans doute l'une des énigmes humaines les plus difficiles à déchiffrer. La sexualité serait dès lors réinventable, au gré des caprices et des hésitations d'un sexe devenu incertain. Paradoxalement, la différence entre l'homme et la femme s'impose dans son évidence simple, immédiate, charnelle. Elle est ce qui de la personne se voit en premier, mais sa signification ultime échappe à toute emprise totalisante. Énigme insaisissable, elle ne se réduit ni à son inscription charnelle (sexe anatomique) ni à sa construction sociale et culturelle (genre). Le naturalisme et le constructivisme s'avèrent impuissants à rendre compte du sens du sexe qui concerne le tout de la personne. Insaisissable par concept, la différence se donne pourtant à vivre dans le vif de la chair. Elle se donne à entendre, s'offrant à un déchiffrement. Indice de transcendance, cette irréductible dissymétrie révèle au coeur de l'humain une structure relationnelle fondamentale d'altérité. Brèche dans la toute puissance de la représentation, elle résiste à la personne qui risque de s'enfermer dans l'image qu'elle se fait d'elle-même. Ultimement, elle s'ordonne à la communion des personnes, qui s'origine - d'après une vision chrétienne dans le mystère d'une insondable communion trinitaire. La tradition personnaliste judéo-chrétienne, parfois encore accusée de cultiver une mentalité naturaliste, un patriarcat machiste et misogyne, un mépris du corps et de la sexualité, fournit en réalité, au prix d'un exposé ajusté et d'un accueil renouvelé, des clés fondamentales qui éclairent puissamment l'énigme de l'altérité des sexes.

La Danse (détail) par Hekri Matisse ( 1910)

Musée de l'Ermitage,Saint Petersbourg

François de Muizon, marié, père de quatre enfants, agrégé de philosophie, maître en théologie, prépare une thèse conjointe de doctorat en philosophie ( à l'Université Lyon-III) et en théologie ( à l'Institut catholique de Lyon) à propos de l'éthique de la procréation. Il enseigne l'éthique à l'Institut catholique de Lyon et la philosophie en classe préparatoire au lycée des Chartreux.

Extraits d'Extraits : ...

 l'écart entre l'homme et la femme renvoie à une différence plus fondamentale, ontologique, une irréductible dissymétrie entre ce que l'on pourrait appeler le génie féminin et le génie masculin...... Elle constitue sans doute l'une des énigmes humaines les plus difficiles à déchiffrer.

 

Nous éprouvons la différence, avant même de chercher à la thématiser. Elle se donne à vivre avant d'être un objet de réflexion.... Dans la rencontre et l'heureuse relation entre les sexes, le génie féminin et le génie masculin apparaissent et se révèlent en quelque sorte l'un face à l'autre, l'un par la grâce de l'autre.

 

Cette relation, loin d'être enclose dans l'automatisme de l'instinct, nécessite un travail, une élaboration, une invention, une quête de sens, un acte d'interprétation. Comme toute entreprise humaine, elle n'est pas sans risque et sans danger, impliquant le nécessaire engagement de la liberté, et la prise de responsabilité devant et pour autrui.

 

La dialectique de l'homme et de la femme  ;;;;; Tableau

 

La communion conjugale  ...pourrait tout entière être récapitulée ... dans les paroles du Christ lues lors de la consécration eucharistique : « Ceci est mon corps. » Saisi dans l'offrande eucharistique du Christ, l'amour humain en son expression chamelle et sexuée, par-delà ses fragilités, ses ambiguïtés ou ses errances, retrouve son orientation originelle, sa signification conjugale, sa capacité de don authentiquement personnel.

 

 

en relations ..... un appréhension du monde en relationnalité trine multUN     EN   UN en autogenèse ...

ils ont un regard sur la femme totalement différent

Noces de Cana

Le Cantique des Cantiques

Homme et femme il les créa ....par Benoit XVI

Ce n’est pas seulement  (???) l’Église qui est appelée à être image du Dieu unique en trois Personnes, mais aussi la famille, fondée sur le mariage entre l’homme et la femme. ( ..vision en ET .... chaque entité en trinitaire ... des communautés de trinitaires  !!!!! ... voilà ce qui explique l'absence de réponse à mes lettres à l'Eglise ) ...

 

 

EXTRAITS du LIVRE

page 9 à page 25

INTRODUCTION

Impossible neutralité

Lorsqu'une société veut couper
l'homme de sa transcendance,
elle n'a pas besoin de s'attaquer
aux grands édifices des églises et des religions.
il lui suffit de dégrader
la relation entre l'homme et la femme I.

TROUBLE DANS LE GENRE ...

La différence entre l'homme et la femme se manifeste dans son évidence la plus simple. Elle est ce qui se voit en premier, tout de suite. Pourtant elle ne se réduit pas à la différence anatomique entre le corps du mâle et celui de la femelle (le sexe), ni à la différence culturelle entre les rôles masculins et les rôles féminins que les sociétés ont construits dans l'histoire (le genre). En intégrant ces deux premières dimensions, il semble que l'écart entre l'homme et la femme renvoie à une différence plus fondamentale, ontologique, une irréductible dissymétrie entre ce que l'on pourrait appeler le génie féminin et le génie masculin. Elle constitue sans doute l'une des énigmes humaines les plus difficiles à déchiffrer. Tenir un discours cohérent, raisonné et pacifié sur la différence des sexes est une entreprise redoutable, que d'aucuns considèrent impossible. En outre, avant même de chercher à qualifier la différence sexuelle, n'en faisons-nous pas une expérience première, fondatrice? Nous éprouvons la différence, avant même de chercher à la thématiser. Elle se donne à vivre avant d'être un objet de réflexion.

p10

 Pour autant, si le fait de la différence s'impose à nous, le féminin en soi (isolé du masculin) et le masculin en soi (isolé du féminin) semblent se dérober à l'analyse, échappant au pouvoir de la définition. Isolés l'un de l'autre, le féminin et le masculin deviennent insaisissables, chimériques. Dans la rencontre et l'heureuse relation entre les sexes, le génie féminin et le génie masculin apparaissent et se révèlent en quelque sorte l'un face à l'autre, l'un par la grâce de l'autre. D'où une première difficulté dans la mesure où l'histoire des relations entre les sexes n'est jamais simple, s'apparentant davantage à une guerre des sexes, à une lutte pour exister, l'un contre l'autre, et générant une peur de disparaître, d'être dominé par l'autre. Chez l'humain, la relation entre le mâle et la femelle n'a rien de la simplicité triviale qui caractérise les animaux. Cette relation, loin d'être enclose dans l'automatisme de l'instinct, nécessite un travail, une élaboration, une invention, une quête de sens, un acte d'interprétation. Comme toute entreprise humaine, elle n'est pas sans risque et sans danger, impliquant le nécessaire engagement de la liberté, et la prise de responsabilité devant et pour autrui. Anthropologique, cette question a donc des implications éthiques. Nous n'avons pas le choix : c'est à partir de cette relation réelle à l'autre sexe, fragile, risquée, si souvent malmenée, mais ô combien riche de sens, que nous devons partir à la recherche de la signification de la différence. La première difficulté est donc historique: elle relève de la situation conflictuelle des femmes et des hommes dans le monde, situation de rivalité et de lutte de pouvoir, mais aussi, heureusement, de reconnaissance et d'amour. Cette difficulté tend à transformer tout discours sur la différence des sexes en discours idéologique.

S'ajoute une autre difficulté qui n'est pas conjoncturelle mais structurelle, constitutive de l'objet à penser. Poser la question « Quel est le sens profond et ultime de la différence hommefemme'? », c'est poser une redoutable question car nul n'en est le spécialiste. Nul n'en a la totale maîtrise. Nul ne peut prétendre avoir le monopole du sens sur cette question. Nul ne peut dominer de l'extérieur le problème, en se situant soi-même au-delà de la différence, comme s'il n'était pas lui-même engagé dans son être dans la différence. « On » ne peut pas parler de la différence, si « on » renvoie à un sujet neutre, indifférencié, en retrait dans une attitude inauthentique'. « Je » ne pourrai en parler en revanche que d'un point de vue nécessairement limité, contingent, celuilà même d'où je parle, qui me donne de parler, et qui me situe comme homme ou comme femme' C'est donc un éclairage partiel, marqué par la limite, l'incomplétude, l'inachèvement qui sera proposé ici. Sans doute un travail à deux voix,. l'une masculine et l'autre féminine, aurait été plus convaincant. Gageons que le recours à des sources tant masculines que féminines suffira pour donner à entendre quelque chose de la différence elle-même.

p11

C'est bien conscient de toutes ces difficultés, qu'il nous faut partir, oser penser, oser éclairer, convaincu qu'en la matière, ne rien dire, c'est laisser entendre que cette différence est indécidable, indiscernable, et c'est, de ce fait, déjà décider au moins de contribuer à une certaine confusion propre à notre temps.

En effet, en matière de différence sexuelle, le discours est foisonnant. S'il est un sujet qui fait parler, et de fait dont tout le monde parle, c'est bien la différence homme-femme. Combien de livres, d'articles récents sur la question ! Le discours dominant oscille jusqu'à l'épuisement entre l'excès de détermination des identités féminines et masculines (la série des ouvrages grand public faisant l'inventaire des différences hommes-femmes est là pour le prouver) et l'apophatisme (on ne pourrait et donc il ne faudrait rien en dire). Trop en parler ou n'en jamais parler, voilà l'écueil. Parler de la différence comme on parle d'un objet, alors que c'est à partir d'elle que nous parlons, voilà la difficulté. Si la différence est instituante de l'humain, trop en parler n'est sans doute pas bon signe.! Il est étonnant qu'on éprouve aujourd'hui le besoin de dire et de justifier un sens originel qui pendant des siècles semblait aller de soi. Faut-il s'épuiser à démontrer ce qui est de l'ordre du bon sens-'? Par ailleurs, le risque suprême n'est-il pas de voir le sens de la différence de l'homme et de la

I.Chr. SINGER, Du bon usage des crises, Paris. Albin Michel. p. 57.

1. On peut ici appliquer au rapport à la différence des sexes, ce que Heidegger affirmait du rapport à la mort: on parle de la mort comme de quelque chose qui ne nous concerne pas, «comme quelque chose d'indéterminé ». Telle est l'inauthenticité, car « le "on" ce n'est personne ». M. HEIDEGGER, « L'Être et le Temps», dans Qu'est-ce que la métaphysique ?, Paris, Gallimard, p. 144.

2. En l'occurence, pour nia part, j'en parlerai du point de vue d'un homme!

3-Faut-il s'épuiser à démontrer par exemple qu'un enfant a besoin pour se construire d'un père et d'une mère?

femme s'exténuer dans le discours comme dans les comportements jusqu'à sombrer dans une inquiétante insignifiance ? D'où vient cet essoufflement, ce « trouble 1 », cette perte d'évidence du sens de la différence homme-femme ? Il est vrai que toute différence est onéreuse et il en coûte de bien la vivre. Mais est-ce une raison suffisante pour la relativiser, voire pour l'évacuer de notre compréhension de l'humain? Au nom de quoi faudrait-il opter pour la thèse d'une réalisation assexuée de l'humain? Imaginer qu'une vie sexuelle et qu'une fécondité qui feraient l'économie de la différence et même de la rencontre des sexes soient possibles, souhaitables, voire normatives, relève de quelle précompréhension de l'humain ? Comment ne pas voir que la différence sexuelle est là, plantée au coeur de l'humanité, et qu'elle se donne d'abord à vivre? Comment feindre d'ignorer qu'elle existe et résiste à sa dénégation en s'offrant à un possible déchiffrement, qu'elle est lisible? La différence des sexes serait floue, modulable, évolutive, à réinventer en permanence, sur mesure, au gré de nos caprices et de nos hésitations. Que nous est-il donc arrivé pour ne plus être capables de lire, de déchiffrer, d'interpréter le sens de cette étonnante et incontournable différence inscrite dans la chair?

Apparemment la différence des sexes ne ferait plus problème. Nous vivons dans un monde mixte de part en part, où dans tous les domaines, la parité est de mise. Cette mixité est bien évidemment, et il faut commencer par le dire, une richesse, une chance, un bonheur, celui de vivre et de travailler en nous complétant, en nous confrontant, en faisant jouer cette mélodie de la différence en ses variations infinies. Mais la diversité fait aussi bien la cacophonie2 que la symphonie ! Mixité n'est donc pas mixage ! Il ne suffit pas de décréter la mixité, pour qu'elle contribue réellement à la construction des personnes. Au-delà du politiquement correct, cette systématisation du brassage des sexes dans tous les lieux de la vie scolaire, sociale, professionnelle et politique a aussi pour effet de masquer une difficulté propre à notre temps, celle de la reconnaissance pacifiée de la différence des sexes. Au-delà des peurs et des rapports de force, les conditions

1. Voir Judith BUTLER, Gender trouble, 1990, traduit en français en juin 2005 sous le titre Trouble dans le genre. Pour un féminisme de la subversion, Paris, Éd. de La Découverte.

2. C. CHILIAND, «Sexe: polyphonie ou cacophonie?, » Res Publica, n° 26 (septembre 2001).

d'une authentique rencontre des sexes sont-elles vraiment et positivement recherchées et suscitées? La reconnaissance sereine du bienfait de la différence homme-femme dans toute sa radicalité est-elle visée, ce qui supposerait au minimum de reconnaître concrètement la valeur respective et originale de l'identité féminine et de l'identité masculine'! Sans doute en sommes-nous encore loin.

Indifférence à la différence sexuelle et brouillage des identités, telle semble plutôt être en réalité le message largement médiatisé et savamment distillé, ce dont Tony Anatrella nous a avertis dans un livre au titre percutant, La Différence interdite 1. Il semble donc que la différence des sexes n'aille plus de soi aujourd'hui. Il sera nécessaire d'analyser les raisons d'un tel déni de la différence fondamentale des deux seules identités sexuées existantes: masculine et féminine. Sans doute, dans sa radicalité, la différence fait peur. En ce sens, notre société serait probablement aussi hétérophobe, au sens propre du terme, au sens où le désir de l'autre sexe serait l'objet d'une peur spécifique, et à cause de cela, serait inhibé, voire refoulé. Nous sommes devant des questions d'une grande complexité, qui touchent à l'identité de la personne, aux confins du vécu corporel, psychologique et spirituel, engageant le champ du social, du culturel, du politique et du religieux. Tout se passe comme si le contexte induisait un évitement de la question éprouvante et révélante de la différence des sexes. Dans un tel contexte, on comprend par exemple que la mixité scolaire connaisse un véritable malaise, quand elle n'est jamais parlée. Le constat accablant de Michel Fize2 dans un livre récent est que la mixité systématisée à l'école mais non gérée, non parlée, accentuerait les clichés, les stéréotypes, la domination masculine, le sexisme. l'inégalité, voire la violence sexuelle3.

1. T. ANATRELLA, La Différence interdite, Paris, Flammarion, 1998.

2. M. Fine, Les Pièges de la mixité scolaire, Paris, Presses de la Renaissance, 2003, voir notamment les pages 77, 111-115, 172. 179, 184 et 190-191.

3. Par ailleurs, on sait que les enfants et les adolescents de sexe différent ne se mélangent pas si facilement. Il faut souvent attendre le lycée et c'est encore bien timide ! Sans doute, faut-il nuancer, et l'expérience qui est la mienne me semble moins négative. Une petite enquête auprès d'élèves de terminale d'un établissement mixte de l'enseignement catholique, faite en novembre 2003, montrent comment les garçons et les filles se perçoivent mutuellement: Qualités des filles selon les garçons: douceur, sensibilité, attentives, exigeantes, délicatesse, sincérité. discrétion, à l'écoute, intuitives, compréhensives, plus aptes à la vie relationnelle, sentimentales, romantiques, maternelles, sens de l'organisation, ouverture d'esprit, studieuses, soigneuses.

Qualités des garçons selon les filles : puissance, courage, protecteurs, forts. rassurants, profonds, actifs, fonceurs, confiance en soi, simplicité, sens de l'humour, détente, loyauté. franchise, honnêteté, capacité à se mettre en avant. serviabilité.

S'agit-il de simples clichés ? Peut-être en partie. mais les élèves ne font-il pas aussi preuve de bon sens, de lucidité, révélant une relation à l'autre sexe asse., sereine et vécue comme équilibrante ?

Où s'enracine un tel soupçon sur le lieu de la différence hommefemme'? Certainement, nous ressentons la nécessité de dépasser les stéréotypes superficiels qui ont souvent bloqué la différence dans des rôles figés et enfermants, quand ce ne sont pas des clichés qui ne font qu'exprimer un rapport de force, réduisant la femme à une fonction de service et véhiculant une image de la virilité bien fruste ! Historiquement, il est clair que le génie féminin n'a pas encore été pleinement reconnu et accueilli. Sans doute, de ce fait, l'identité masculine est trop souvent restée bloquée dans des clichés caricaturaux. En réaction à ces clichés, un féminisme militant s'est développé à bon droit. Mais cette première réaction sous le signe de la polémique a été suivie rapidement d'une lente mais profonde érosion du sens de la différence, laquelle semble de plus en plus suspecte désormais, cachant on ne sait quel archaïsme naturaliste à dépasser. D'où une nette préférence pour le flou artististique en la matière.

Nous sommes confrontés en effet à la montée en puissance d'un modèle neutre, androgyne, où les identités masculines et féminines deviennent problématiques. Aujourd'hui, l'idée de neutralité s'impose de plus en plus, avec la prétention de dépasser la différence qui resterait alors du côté des contraintes biologiques, des déterminismes naturels aliénants pour la personne, dont il faudrait enfin s'affranchir. C'est tout le sens du mot célèbre de Simone de Beauvoir : « On ne naît pas femme, on le devient t. » En un sens, c'est vrai. Si on s'en tient à la seule observation, on ne naît pas femme, mais seulement femelle. On ne naît pas homme, mais seulement mâle, physiquement sexué. Néanmoins, peut-on aller jusqu'à dire que la féminité et la masculinité sont une pure invention culturelle, qui n'a aucun rapport avec le

I . S. DE Brnt volR, Le Deuxième Sexe, 1949, Paris, Gallimard, colt « Folio ». t. ll, p. 13.

donné biologique et avec le mode de relation qu'il induit? Si on ne saurait réduire les signifiants homme et femme à mâle et femelle, faut-il, pour autant, opérer une disjonction totale entre les deux plans ? Est-ce que vraiment le fait de pouvoir porter un enfant dans l'intime de sa chair et de le mettre au monde n'a aucun rapport avec la féminité, sans pour autant l'y réduire? S'il est évident que je reçois de la nature mon sexe biologique, ce n'est pas pour autant que mes conduites sont déterminées mécaniquement par ma physiologie. Mais à l'inverse, puis-je m'inventer à partir de rien? Puis-je décider librement de mon sexe? Comment articuler ici le donné et le sens, la nature et la liberté'? Il nous faudra le préciser.

Pour penser correctement la différence homme-femme, il faudrait commencer par éviter un double écueil. L'écueil de l'enfermement dans la différence, sa chosification dans des particularismes qui la trahissent, des rôles figés qui ne rendent pas compte de la profondeur avec laquelle elle traverse l'être humain. Voilà le schéma dont nous sortons, schéma caricatural mais encore bien réel, n'exprimant en gros le plus souvent qu'un rapport de domination de l'homme sur la femme, et sa réaction polémique féministe qui finit par inquiéter les hommes. C'est trop clair: ce schéma ne conduit pas à une heureuse rencontre des sexes, mais plutôt à la guerre des sexes, et donc à une impasse. L'autre écueil est celui du déni de la différence, de l'indifférenciation comprise comme l'illusoire neutralité de la vie, de la culture et de l'esprit, selon le leurre d'une réalisation neutre et asexuée de l'humain. C'est le schéma qui tend à se généraliser dans tous les domaines aujourd'hui. Il semble plus tolérant, plus généreux. Il s'agit de favoriser superficiellement les relations immédiates entre les personnes, en éliminant ce qui pourrait faire obstacle. Mais en réalité, le rêve d'une relation simple car sexuellement indifférenciée, ne peut conduire qu'à la plus violente des confusions. Des deux côtés, il s'agit d'une redoutable perte de sens que Xavier Lacroix résume clairement : « C'est bien parce que le féminin est porteur d'un trésor de sens qu'il serait dommage qu'il s'aligne purement et simplement sur le masculin ; que ce soit à la manière ancienne, par subordination, ou à la manière moderne par imitation (ce qui conduit à la neutralisation). Pour cela aussi, bien sûr, il serait dommage qu'il reste purement et simplement, comme il l'a été si souvent, séparé du masculin'. » C'est donc la relation concrète entre l'homme et le femme qu'il faut sauver, notamment dans la conjugalité, en l'identifiant comme le lieu d'un sens fondateur à scruter, à interpréter, à manifester.

LE DÉSIR HOMOSEXUEL,

NOUVELLE NORME D'UNE SOCIÉTÉ NARCISSIQUE

Le recul du sens de l'identité sexuée (être homme ou être femme) est indéniablement lié à une valorisation outrancière de l'orientation du désir sexuel (désir hétérosexuel ou désir homosexuel). L'identité de la personne est alors confondue avec le désir et notamment le désir sexuel dans sa dimension pulsionnelle, subjective et aléatoire. Cette différence d'orientation du désir sexuel mise en avant a pour effet de masquer et de dévaloriser la seule véritable différence qui concerne l'identité sexuée, être homme ou être femme. L'identité sexuée fondamentale ne saurait se réduire à la simple et fluctuante orientation d'un désir. Les adjectifs « homosexuel » et « hétérosexuel » ne sont pas des substantifs. Ils ne concernent pas l'identité de la personne. Seul le fait d'être un homme ou une femme concerne l'identité de la personne. Dans les débats actuels, derrière les bons sentiments et l'argument politiquement très correct de la lutte contre les discriminations, il faut lire en réalité le symptôme d'une dangereuse indifférence à la différence.

Dans le sillage de ce brouillage des pistes, le lien essentiel entre différence des sexes et filiation, différence des générations. ne semble plus aperçu. Le concept étrange d'homoparentalité a été inventée pour faire exister dans le langage ce qui n'existe pas dans la réalité. Il laisse supposer qu'une filiation est possible et humainement structurante en dehors de la différence des sexes 3.

1. X. LACROIx, L'Avenir c'est l'autre, Paris, Éd. du Cerf, 2000, p. 231.

2. Le mot « homoparentalité » a été fabriqué en 1997, à Paris, par quelques intellectuels parisiens connus pour être de farouches adversaires de la famille.

3. Quand on lit dans Le Monde du 16 février 1999, sous la plume conjointe de D. Borillo, M. lacub et E. Fassin, l'expression « enfants nés hors (le Ici di,l('rence des sexes », on est tout de même en droit de se poser des questions 1

Il donne à penser qu'être parent ne suppose plus l'altérité des sexes au cœur du couple. Une enquête sur la sexualité des Français concluait en ces termes : « Homosexualité, hétérosexualité, où est la différence' ? » Cette banalisation de l'homosexualité ajoute encore à la confusion, quand elle est érigée en nouveau modèle conjugal et parental, voire en « nouvelle chance pour la famille 2 ».

L'homosexualité s'imposerait en nouveau modèle normatif équivalant à l'hétérosexualité, jusque et y compris quand il s'agit de fonder le couple et la famille. Hétérosexualité, homosexualité, deux modèles d'égale valeur, deux polarités symétriquement opposées, mais équivalentes, et à la limite, interchangeables. Ce courant se développe au mépris d'un siècle de psychanalyse, brutalement discréditée pour les besoins de la cause. Pour sortir de cette polémique récente, il nous suffirait d'interroger les mots, de nous laisser enseigner par eux. « Il faut [...] se fier aux mots. Ils en savent plus que nous sur les choses. Ils en savent plus que nous sur nous3 », écrivait l'essayiste Claude Roy. Suivant sa leçon, nous verrions en effet que « sexe » vient du latin secare qui signifie « couper », « séparer », « différencier ». Le mot sexe implique donc structurellement l'intégration de la différence. Un psychanalyste4 aurait dit à juste titre : « Homosexualité est une contradiction, hétérosexualité est un pléonasme. »

L'homosexualité se présenterait désormais comme une orientation possible équivalente et symétrique de l'hétérosexualité, comme il y a des droitiers et des gauchers. La moindre amorce de réflexion critique de ce phénomène est taxée d'homophobie et désormais condamnée par la loi du 7 décembre 2004. Le terme « homophobie » est une invention langagière récente. Le mot est discutable. En effet, une phobie est une maladie psychologique.

1. Le Monde, 2 mars 2002.

2. Le titre du livre de Stéphane NADAUD. Homoparentalité, une nouvelle chance pour la famille, Paris, Fayard. 2002, est éloquent.

3. Claude Roy, Descriptions critiques. Paris. Gallimard. 1950.

4. Il s'agit de Jean Bergeret qui l'écrit aussi. mais avec plus de nuance : « Pour un psychanalyste, le terme "homosexualité" peut apparaître comme contestable dans la mesure où le préfixe "homo", qui signifie ici "semblable" se trouve rattaché au substantif "sexualité" qui connote au contraire une radicale distinction existant entre modèles objectaux, différents et complémentaires, d'états et de fonctionnements imaginaires », dans Xavier LACROIX (dir.). L'Amour du semblable, L'homo-érotisme, approche psychanalytique, Paris. Éd. du Cerf, 2001, p. 122.

Discute-t-on avec un malade'? On le soigne bien plutôt en lui administrant un traitement adéquat. Mais de quoi est-on malade au juste ? On note ici une confusion du psychologique et du social, que Tony Anatrella a clairement analysée'. Par-delà le respect inaliénable dû à la personne humaine, homme ou femme, quelle que soit l'orientation de son désir sexuel, mais quels que soient aussi sa race, sa religion, son milieu social, est en réalité violemment censurée ici toute amorce de débat sur la valeur de la différence des sexes, de l'alliance de l'homme et de la femme, comme principe fondateur de la société elle-même. Cette dictature qui règne sur les esprits et interdit la possibilité même d'un débat étonne dans une société où le débat démocratique est supposé être à l'honneur. Il n'est donc pas juste d'affirmer que n'importe quel lien privé structure la vie sociale au même titre que le mariage qui a toujours été pensé comme l'alliance d'un homme et d'une femme. Tous les pays du monde sont en réalité unanimes sur ce point, à l'exception de quelques pays (Espagne, Belgique, PaysBas, Canada) qui se privent de l'anthropologie universelle en la soumettant aux aléas des majorités parlementaires. Dans une société narcissique, le désir sexuel de l'individu, en ses « orientations » possibles (hétéro, homo, bi, trans...), ses troubles, ses ambiguïtés et ses hésitations, est valorisé à l'extrême. Il finit par occulter le fait de la sexuation, l'identité fondamentale de l'homme et de la femme. Il finit par rendre inaudible le sens relationnel de la sexuation comme brèche vers l'altérité2

 

L'INDIVIDUALISME DANS L'IMPASSE À LA RECHERCHE DE LA PERSONNE

 

Une forme d'individualisme radical, de plus en plus replié sur lui-même, s'impose massivement, jusqu'à, in fine, se retourner paradoxalement contre l'individu, touchant sa limite indéniable.

1. T. ANATRELLA, Le Règne de Narcisse, Les enjeux du déni de la différence sexuelle, Paris, Presses de la Renaissance. 2005, p. 171-236.

2. On lira avec profit plusieurs ouvrages récents et éclairants sur les revendications homosexuelles actuelles, notamment: X. LACROix, La Confusion des genres, Réponses à certaines demandes homosexuelles sur le mariage et l'adoption, Paris, Bayard, 2005 ; Th. COLLIN, Le Mariage gay, les enjeux d'une revendication, Paris, Eyrolles, 2005.

«L'individualisme actuel [...] est paradoxalement un sacrifice de l'individu. Portée au bout d'elle-même, la liberté de l'individu est la pure perte aussi bien de l'individu que de la liberté », écrit J.-M. Ghitti 1. Exemple symptomatique de ce retournement, la conception suicidaire du divorce soft, censé exprimer la liberté individuelle, conduit à tout sacrifier sur l'autel de l'épanouissement individuel : le couple, les enfants, la famille, les amis, la liberté. «Le divorce révèle cette subsistance du sacrifice dans une perspective purement nihiliste», poursuit J.-M. Ghitti 2. L'individu se trouve paradoxalement sacrifié sur l'autel de l'individualisme. L'ego, dominé par le «tyran Éros3 » se laisse en effet facilement réduire en esclavage. Cette tyrannie du désir et du plaisir4 est à coup sûr la plus subtile et la plus redoutable des aliénations contemporaines. Dans ce schéma, l'individu idôlatré se tient à lui-même lieu de transcendance, s'érigeant en source des valeurs dans une position bloquée de narcissisme radical. L'individualisme conduit à la mort de l'individus.

Au fond, interroger le sens de la différence des sexes, c'est entrer nécessairement dans la question du rapport à l'autre, la question de l'altérité. Et c'est peut-être là que le bât blesse le plus aujourd'hui. Comme l'écrit avec lucidité David Simard, à propos de la question du rapport entre les sexes : « Ce qui est engagé est toute une conception des rapports entre les uns et les autres, aujourd'hui fondés sur l'individualisme en même temps que sur le communautarisme. Le point commun entre ces deux pôles paradoxaux réside peut-être dans le fait que l'altérité n'est pas

I.J.-M. GHITTI, La Séparation des familles. Paris, Éd. du Cerf, 2003, p. 31.

2.Ibid., p. 33.

3. L'expression est de Platon, République, 573d: «Celui qui a laissé le tyran Éros s'installer dans son âme et en gouverner tous les mouvements [...]chaque jour et chaque nuit, ne bourgeonne-t-il pas tout autour nombre de terribles désirs, exigeants nombre de conditions ? »

4. Voir J.-C. GUIELEBACD, La Tyrannie du plaisir. Paris, Éd. du Seuil, coll. « Point», 1999.

5. Sur l'individualisme actuel, voir G. LIPOVETSKY. L'Ère du ride, essai sur l'individualisme contemporain, Paris, Gallimard, col. «Folio», 1983: L. DUMONT, Essai sur l'individualisme, une perspective anthropologique sur l'idéologie moderne. Paris, Éd. du Seuil, coll. « Esprit», 1983; J.-C. GVILLI3BAUD, Le principe d'hmnanité, Paris, Éd. du Seuil, coll. « Point », 2001 : C. MEt.MAs. L'Homme sans gravité, jouir à tout prix, Paris, Denoel, 2002: C. GODIN, La Fin de l'humanité. Paris, Éd. Champ-Vallon, 2003.

véritablement reconnue comme telle. Si la chose est claire pour le communautarisme, elle l'est aussi pour l'individualisme_ dont le centre est l'ego et pour lequel l'alter ego est toujours considéré dans une relation de prédominance de l'ego. Ceci a des conséquences, inévitablement, pour la sexualité, dans laquelle intervient le désir de l'autre. Cela engage également une certaine conception du plaisir et de l'amour'. » Sous le règne de Narcisse l'ego est un tyran qui réduit l'autre au même. Cette réduction totalitaire de l'altérité est source de graves transgressions anthropologiques. Penser la différence des sexes, c'est donc au minimum penser la relation à l'altérité. Le salut de la personne2 intégrale (et pas seulement de l'individu) implique la capacité de se décentrer de soi-même et l'ouverture réelle à l'altérité, laquelle s'exprime d'abord par l'émerveillement devant l'altérité fondamentale des sexes et ultimement par la nécessité d'entrer dans le dynamisme du don de soi dont une expression privilégiée est à l'évidence l'engagement dans une relation conjugale stable, fidèle (où l'altérité sexuelle s'éprouvera concrètement) et ouverte à la perspective de la fécondité (ouverture à l'être à venir, radicalement autre).

Les questions engagées par le fait de la sexuation croisent le champ éthique. L'éthique peut se définir comme la science de l'agir humain. L'éthique se demande en effet comment agir en tant qu'être humain, comment qualifier l'agir digne de l'homme, l'agir conforme à ce qu'est l'être humain. Dès lors, une certaine précompréhension de la personne humaine, une certaine anthropologie, est requise. Sonder les profondeurs de l'humain suppose de se mettre à l'écoute du phénomène humain (phénoménologie), et d'oser une herméneutique de la personne, laqueïic s'ouvrira nécessairement à des perspectives métaphysiques. Les approches sont différentes mais inséparables. « Une phénoménologie sans perspective métaphysique est décevante ; une éthique

I . D. SIMARD, Res Publica, n° 26 (septembre 2001), « Entre sexes ».

2. Sur une anthropologie de la personne et du don. voir C. BRUAIRE, L'Être Ci l'Esprit, Paris, PUE, 1980; X. LACROix, Le Coipps de chair, Paris. Éd. du Cerf. 1992 ; E. LEVINAs, Totalité et infini. La Haye-Boston-Lancaster. Martinu> Ni jhoff, 1968: K. WOJTYLA, Personne et acte, (1980) trad. Gwendoline Jarciyk. Paris, Éd. du Centurion. 1983.

sans anthropologie est fluctuante' », écrit Xavier Lacroix. Reprenant explicitement ces formules, Yves Semen complètera : « Une éthique sans anthropologie est fluctuante : une anthropologie sans phénoménologie est insatisfaisante, une phénoménologie sans perspective métaphysique est décevante ; une métaphysique sans théologie est insuffisante'-. » La crise actuelle de l'éthique sexuelle plonge ses racines dans une crise plus fondamentale qui concerne l'anthropologie de la personne sexuée, laquelle n'est pas sans lien avec une crise du sens et de la transcendance. C'est le chemin de cette anthropologie fondamentale de la personne sexuée que nous voudrions dégager dans le présent essai, étant entendu que c'est là que réside l'essentiel d'une tâche qui ne fera pas l'économie des ressources de la phénoménologie et de l'herméneutique. Dégager les retombées éthiques de cette anthropologie fondamentale, tâche que nous n'esquisserons que partiellement ici, restera néanmoins une tâche seconde, mais non pas secondaire.

La tâche anthropologique première impliquera un acte herméneutique d'interprétation du phénomène de la sexuation humaine. Il s'agit de comprendre, plus que d'expliquer, au sens où Dilthey opposait les deux démarches. L'explication est de l'ordre de la connaissance scientifique par les causes, la compréhension est de l'ordre de l'interprétation, qui vise à dégager un sens au triple sens de signification, orientation et finalité. Si l'explication est structurellement archéologique, l'herméneutique aura une orientation nettement téléologique. Sans nier l'archè du sexe, c'est surtout par le télos, l'accomplissement de la personne sexuée, que nous en scruterons le sens. La tâche urgente est donc d'élaborer une anthropologie fondamentale de la personne sexuée. Reconnaissons simplement que nous sommes loin d'avoir épuisé la profondeur de sens engagée dans la différence des sexes, tant dans la réflexion philosophique et anthropologique que dans la réflexion théologique et spirituelle

 

LA DIFFÉRENCE SEXUELLE,

L'IMPENSÉ DE LA PHILOSOPHIE

Il convient donc en premier lieu de s'étonner et de se demander pourquoi la philosophie occidentale (notamment grecque) est passée à ce point à côté de la différence sexuelle. S'étonner non pas qu'elle ait omis d'en parler, mais qu'elle n'ait pas considéré comme centrale cette question quand il s'est agi de construire une anthropologie, une ontologie ou une éthique. Où trouver une élaboration positive du sens de la différence sexuelle qui soit fondatrice pour ces entreprises ? Certes la différence sexuelle n'est pas un objet pour la pensée. Elle est ce qui nous précède, associée à notre insaisissable origine. Elle nous travaille, nous traverse tout entier. Impossible pour nous d'y échapper, de prendre distance, pour la considérer de l'extérieur. Tel le poisson qui chercherait à sortir de son bocal pour connaître l'eau, nous y sommes entièrement immergés. Tout au plus, pouvons-nous la ranger dans la catégorie du mystère, et accepter qu'elle ne soit pas d'abord un problème à résoudre, pour reprendre la terminologie de Gabriel Marcel. Devant le mystère, la philosophie peut sembler échouer, comme l'explicite Nicole Chopelin : « Échec de la pensée qui bute sur cette irrécusable différence des sexes, "ce à partir de quoi l'on pense", mais qui demeure partout - y compris dans l'histoire de la philosophie - "ce qui n'est pas pensé". Différence irréductible donc, qui constitue encore le grand impensé de l'humanité [...1. Mais échec aussi dans l'ordre du vécu, puisque la domination a recouvert partout la différence et qu'ainsi l'histoire des rapports entre les sexes pourrait bien être surtout celle de leurs rendez-vous manqués et de leur mutuelle aliénation I, » Cet échec n'est d'ailleurs pas à comprendre nécessairement comme une défaite, voire une démission de la philosophie. C'est peutêtre même cet échec de la philosophie qui manifeste sa grandeur. En effet, si la différence sexuelle devait être trop vite totalisée dans une synthèse systématique, ce serait à coup sûr là que l'échec serait le plus catastrophique. L'échec désigne ici plutôt un impensé qui est source de sens. Dans un entretien avec Richard

L Nicole CHOPELIN, « La différence des sexes: écart primordial, chemin d'humanité ». Trajets, n'4, juillet 2002.

INTRODUCTION 23

Kearney, Levinas précise : « Le fait que la philosophie ne peut complètement totaliser l'altérité du sens dans une simultanéité ou présence finale n'est pas pour moi une déficience ou une faute. Pour le dire autrement, la meilleure chose concernant la philosophie, c'est qu'elle échoue. Mieux vaut que la philosophie ne réussisse pas à totaliser le sens - bien que. comme ontologie. c'est justement ce qu'elle a essayé de faire -, car cela la garde ouverte à l'irréductible altérité de la transcendance'. » L'impensé renvoie souvent au plus fondamental, au plus originaire et pour cette raison au plus oublié. Ainsi en est-il de l'être selon Heidegger. Toute l'histoire de la métaphysique ne serait que l'histoire d'un oubli de l'être, et même d'un oubli de l'oubli. Doit-on alors ériger la question de la différence des sexes à un tel niveau ontologique? N'est-ce pas trop lui demander, cette fois? Faut-il n'y voir qu'un défaut de la perspective propre à notre époque ou, au contraire, affirmer avec Luce Irigaray tout de go : « Chaque époque, selon Heidegger, a une chose à penser. Une seulement. La différence sexuelle est celle de notre temps2. »Si une telle affirmation est vraie, il n'est pas étonnant que la différence sexuelle résiste à une conceptualisation hâtive. « Impossible à définir, la différence des sexes est à vivre », écrit encore Nicole Chopelin. Mais la philosophie doit-elle se taire sur la vie? Entre la pensée et la vie, faut-il se résigner à consommer la rupture'? Comment penser le rapport à la vie? Si penser la vie, c'est réduire la vie à la pensée, nous allons au-devant de tous les dangers, ceux de l'idéalisme et de l'idéologie. Grande est alors la tentation de passer à côté de la différence sexuelle, voire de la nier purement et simplement dans une attitude de toute-puissance démiurgique. Concluons avec ce propos pénétrant de Marguerite Léna, qui donne le ton juste pour entreprendre une exploration philosophique de la question : « Parce qu'elle est donnée, la différence sexuelle dément le propos d'auto-position de l'homme par lui même; parce qu'elle est une différence, elle interdit à la raison de "faire l'un" trop vite et de céder au vertige de l'uniformité;

1. Richard KEARNEY, « De la phénoménologie à l'éthique. Entretien avec Emmanuel Levinas », dans Esprit, n° 234, juillet 1997, p. 130.

2. L. IRIGARAY, Éthique de la différence sexuelle, Paris, Ed. de Minuit, 1984, P. 13, faisant écho à ce qu'affirmait déjà le philosophe russe Nicolas Berdiaev «la conscience de notre temps se tient sous le signe de la révélation et de la connaissance du mystère sexuel en l'homme ».

enfin parce qu'elle met en jeu la fO1,rmidable puissance d'aimer en son obscure indétermination e°harnelle et spirituelle, elle dérobe les conduites aux planificatiq-ns de l'entendement]. » Prévenu des écueils et des difficultés irinhérents au sujet traité, nou, choisirons de pousser aussi loin que possible l'investigation philosophique, de manière à épro4 ver la grandeur mais aussi les limites, voire les insuffisances dile la raison humaine. A cette condition seulement, le recours aux lumières de la foi s'avérera fécond et éclairant, dans la mesare ÇDù il sera exigé par la raison

elle-même.

UNE HYPOTHÈSE THÉOLOGIQUE INTEMPESTIVE,

TROUBLE DANS LA PFENSÉE UNIQUE

À propos de la sexuation humaine et de sa signification, il convenait d'abord de faire entendre, le silence ou du moins la retenue de la philosophie, dès l'antiquité grecque. Mais il convien drait aussi de s'étonner de l'apparent silence de la théologie chrétienne traditionnelle sur ce suJetrt. Certes, la théologie chrétienne s'est constituée en emprontant ses formes conceptuelles aux représentations culturelles et philosophiques qui lui étaient contemporaines et il est parfois difficile de discerner entre une intuition théologique originale et le langage philosophique dans lequel elle s'est formulée. Il reste que confondre platonisme et christianisme est une erreur grossière, dans laquelle tombent encore certains auteurs contemporain;ns2.

1. M. LÉNA, « Une différence créance, M. SCHUMACHER (dir.), Femmes dans le Christ, carmélitaines ». 2003, p. 406.

2. Sylviane Agacinski n'y échappe pas du moins en partie, dans son effort pour «traquer l'androcentrisme monothéiste chrétien », en attribuant au christianisme l'idée que la différence des sexe serait un malheur, cause du péché originel (là où la Bible y voit une bénédiction explicite de Dieu), et en comprenant le salut chrétien en terme de neutralisation de l'altérité des sexes. À I'évidence, on est ici dans le sillage du mythe platonicien des androgynes, et non dans l'authentique tradition judéo-chrétiennene. S. AGACINSKI. Métaphysique des sexes, masculin-féminin aux sources du christianisme Paris, Éd. du Seuil coll. « La librairie du xxr siècle», 2005.p' 26I .

Risquons une hypothèse théologique qui peut paraître à certains égards intempestive, voire subversive 1 : la tradition judéo-chrétienne, quand elle est comprise à partir de son centre, est riche d'un sens nouveau, essentiel bien que méconnu, éclairant puissamment le mystère de la différence des sexes. Et si le judéo-christianisme si souvent accusé d'avoir méprisé le corps, le charnel et le sexe, et d'être à l'origine d'un patriarcat machiste et misogyne, n'avait pas à nous apprendre du nouveau sur la question ? Allons plus loin: l'intuition judéo-chrétienne provoque la pensée sur la différence sexuelle à une conversion, en l'arrachant à sa tentation totalitaire et en l'appelant à vivre une ouverture sur ce vers quoi cette différence fait signe. La tentation serait ici la prétention à vouloir mettre la main sur la différence sexuelle pour la définir, la relativiser, la dépasser, la réduire, l'instrumentaliser ou la nier. L'autre tentation serait de la déclarer ineffable, au-delà de toute détermination, ou encore définitivement trouble, ambiguë, et in fine insignifiante. Pour dépasser ces écueils, nous proposons de réinterroger la tradition judéo-chrétienne elle-même, paradoxalement mal connue. En quoi la lumière de la Révélation judéo-chrétienne rend-elle possible un renouvellement complet de perspective ? Et si cette tradition si souvent décriée, caricaturée, accusée à tort d'être naturaliste et archaïque, permettait au contraire d'ouvrir des voies nouvelles d'interprétation de la différence des sexes ? Sans doute, le refoulement contemporain par la civilisation occidentale de ses propres racines judéo-chrétiennes rend difficile l'accueil de l'altérité des sexes dans toute la richesse de sa signification originelle et ultime. À l'inverse, nous voudrions montrer que la théologie judéo-chrétienne n'est pas sans ressource pour penser nouvellement le sens de la sexuation.

Enfin, une remarque importante pour finir: s'il est vrai que le sens de la différence homme-femme se manifeste d'une façon privilégiée au sein de la relation conjugale, de l'alliance personnelle et stable entre un homme et une femme (ce qui appellera une analyse particulière de la conjugalité), il ne s'agira en aucun cas d'exclure les autres formes de manifestation de la différence sexuelle, notamment dans la vie sociale ou religieuse, et précisément dans le contexte du célibat, qu'il soit subi ou choisi librement comme réponse à un appel personnel (célibat évangélique). L'appel à se donner soi-même, à donner sa féminité ou sa masculinité peut tout autant, bien que différemment, se vivre dans le célibat, consacré explicitement ou non, que dans le mariage. Cette remarque, qu'il ne faudra jamais perdre de vue, restera en toile de fond de toutes nos analyses.

 

I. Le mot est de Shmuel TRIGANo : <,La différenciation sexuelle dans la Bible. Une lecture juive subversive », Xlc Symposium du Collège des études juives de l'Alliance israélite unisersclle. « La différence des sexes dans l'égarement contemporain », 1999. Cette conférence a fait l'objet d'un article dans la revue Études, n° 391 I-2. juillet-août 1999, p. 63-74.

 

 P94

Chapitre IV

La sexuation, figure d'altérité

Par la sexualité, le sujet entre en rapport avec ce qui est absolument autre I.

Si le concept de différence associé à la problématique de l'égalité renvoie à du comparable, celui d'altérité comme étrangeté absolue rend impossible toute comparaison. Comparer, c'est toujours ramener l'autre au même, en quelque manière. Or, c'est un fait, l'homme et la femme, si semblables et si différents, se rencontrent, sur le lieu même de leur irréductible altérité, là précisément où ils sont incomparables. Rien d'étonnant que cela ne se fasse pas sans peine, sans épreuve. Égaux en dignité et en droits, parce qu'appartenant à la commune humanité, hommes et femmes se rencontrent sur le lieu de leur étrangeté réciproque. Le couple travaille au sens où, en physique, un couple est un jeu de forces opposées, qui, une fois couplées, produisent un effet dans une troisième direction. C'est donc l'altérité des sexes qui est à l'origine de cet inimitable dynamisme : « Ce qui rend le mariage si lumineux et si cruellement thérapeutique, c'est qu'il est la seule relation qui mette véritablement au travail », écrit Christiane Singer2. Démaîtrise, imprévisibilité, mais aussi révélation de l'un par l'autre, ouverture à un avenir nouveau, à une fécondité, telle se présente la relation d'altérité. À ce titre, seule l'union d'un homme et d'une femme peut légitimement constituer un couple. Si la différence homme-femme médiatise l'altérité, c'est parce qu'elle y donne accès, ouvrant à une nouvelle et plus profonde dimension de l'existence.

1. E. LEVINAS, Totalité et infini, La Haye-Boston-Lancaster, Martinus Nijhoff, 1968, p. 254.

2. Ch. SINGER, Éloge du mariage,, de l'engagement et autres folies, Paris, Albin Michel, 200

p92

LA RELATION DIALECTIQUE

DE L'HOMME ET DE LA FEMME

Le jésuite Gaston Fessard a cherché à dégager le sens de l'altérité sexuelle selon une perspective historique et sociale. Dans le sillage de Marx et de Hegel, il a pensé les relations fondamentales qui engendrent et structurent la société. Le premier type de relation qui saute aux yeux de l'historien, c'est la relation conflictuelle, la lutte pour exister, le rapport de forces. La violence de l'histoire est là pour le rappeler. Mais une société peut-elle naître, vivre et se développer dans le pur rapport de forces, la lutté violente pour la reconnaissance? Complétant la fameuse dialectique hégélienne du maître et de l'esclave, Fessard introduit une autre relation dialectique qui intègre l'altérité la plus fondamentale, l'altérité sexuelle. Il l'appelle naturellement la dialectique de l'homme et de la femme. Ces deux dialectiques sont structurées par un double rapport: politique d'abord (rapport homme-homme, entre des libertés opposées, d'où la lutte) et économique ensuite (rapport homme-nature, d'où le travail qui humanise la nature et permet à l'homme de subvenir à ses besoins).

La dialectique maître-esclave vise d'abord la reconnaissance de soi par l'autre, au terme d'une lutte à mort. La reconnaissance obtenue passe par la négation de l'autre et instaure un rapport à la nature marqué par la violence : l'esclave qui travaille est frustré du produit de son travail et angoissé, le maître qui ne travaille pas jouit du produit du travail de l'esclave. Cette double division (politique et économique) produit une situation instable, qui risque de provoquer un retournement dialectique violent l'esclave maîtrisant la nature qu'il connaît par son travail, se transforme peu à peu, s'humanise jusqu'à pouvoir devenir maître du maître. Mais ce retournement n'est que le début du cycle de la violence, qui, de retournement en retournement, de révolution en révolution, s'avère stérile et mortifère.

À l'inverse, la dialectique homme-femme vise d'abord la connaissance de l'autre sexe, au titre de son altérité même. Le désir malgré son ambiguïté s'éveille au-delà du besoin. Il est désir de rencontre de l'autre comme sujet sexué choisi librement, d'où le jeu de la séduction dans la lutte amoureuse. Ce désir de l'autre pousse l'autre à exister, à manifester sa valeur propre. La liberté s'éveille et s'oriente vers la connaissance de l'autre, en particulier au sens le plus immédiat, biblique, où connaître une femme, c'est s'unir charnellement à elle. Dans ce premier moment qui aboutit à l'union, de liberté à liberté, le corps est connu dans son altérité et confirmé dans ses désirs. La femme fécondée par l'homme entre alors en travail, donnant sa matière à l'enfant avant de le mettre au monde par une séparation vitale. Alors seulement l'enfant comme sujet incarnera objectivement leur unité : non seulement l'unité de l'homme et de la femme, mais aussi l'unité des deux rapports (à la nature et à l'homme), d'où une reconnaissance d'amour, unifiante et confirmante pour l'homme et pour la femme

La reconnaissance qui a lieu grâce au travail d'enfantement unit non seulement deux êtres divers, mais elle en fait éclore un troisième qui, également lié à chacun d'eux, est le témoin de l'unité ontologique et indissoluble du double rapport de l'homme à l'homme et de l'homme à la nature. Ainsi l'amour, avoir-lieu et être-là de cette reconnaissance, est-il le lien de leur trinité. Et l'apparition de ce troisième être ouvre devant les deux autres la possibilité et la promesse, non seulement d'un accroissement illimité du nombre de ceux qui participent à cette unité, mais aussi d'un progrès sans fin de leur liberté'.

La dialectique de l'homme et de la femme, alliant dès l'origine l'altérité de sexes, se révèle puissamment unifiante pour la société tout entière, lui donnant d'advenir, de s'ouvrir à un avenir2.

1. G. FESSARD, L'Actualité historique, t. I, « Le mystère de la société. Recherche sur le sens de l'histoire », Paris, Éd. Culture et vérité, 1960, p. 169.

2. C. LÉvl-STRAUSS parlera quant à lui de relation de subordination et de relation de communication. É. POUSSET, « Sexualité et morale dans les relations constitutives de l'homme», polycopié du Centre d'études et de recherches philosophiques, 1972, p. 93.

Les deux dialectiques développées par Fessard peuvent être synthétisées par le tableau suivant

 

Ces deux dialectiques ainsi schématisées n'opèrent pas indépendamment l'une de l'autre. Elles ne sont jamais chimiquement pures. Elles interfèrent constamment et travaillent l'une et l'autre, en profondeur, la société. La question se pose de savoir quelle est la plus fondamentale, la plus structurelle, à l'origine de la société, selon le critère énoncé par Fessard, à la suite de Marx « L'unité de la société humaine et son progrès ne sont possibles que dans la mesure où politique et économique se mettent en interaction réciproque, chacun se faisant alternativement moyen et fin par rapport à l'autre 2. » A première vue historique, la dialectique maître-esclave, instaurant un violent rapport de forces semble triompher, et même venir à bout de la dialectique de l'homme et de la femme. Ne faisons-nous pas le constat historique affligeant de la domination violente de l'homme sur la femme ? Le sexe dit fort profitant de sa supériorité physique, ne manifeste-t-il pas une tendance récurrente à réduire le sexe dit faible à un rôle d'esclave ? La guerre des sexes tout au long de l'histoire semble montrer que c'est bien la lutte violente qui a le dernier mot. Et ce n'est pas le féminisme quand il est compris comme une revanche du sexe faible sur le sexe fort qui aidera à sortir de la violence, puisqu'il ne fait que retourner la situation. Le féminisme historique semble se présenter comme un interminable règlement de compte des femmes à l'égard des hommes3. Fessard ira jusqu'à dire que même si historiquement ce constat est indéniable, il n'empêche qu'on n'a déjà plus à faire à une pure relation maître-esclave.

1. Le tableau s'appuie sur le texte central dans lequel Fessard expose ces dialectiques : L'Actualité historique, t. I, « Le mystère de la société. Recherche sur le sens de l'histoire », Paris, Culture et vérité, 1960, p. 163-170, notamment page 166. Pour plus de détails, outre le texte de Fessard, nous renvoyons aux synthèses anciennes mais très éclairantes d'Édouard Pousset, notamment l'article « homme » du Dictionnaire de spiritualité, Vlvl, Paris, Beauchesne, III. « Réflexions actuelles sur l'homme », col. 637-646, ou encore l'article « Luttes des classes et société », Cahiers de l'actualité religieuse et sociale, 44, 15 octobre 1972. On peut enfin consulter dans la collection «Que-sais Que-sais-je ? », n° 363, chez PUF, la synthèse de C. BRUAIRE, La Dialectique, 1985, p. 109-114.

2. Cité par E. PoussET, s. j., Un chemin de la foi et de la liberté, polycopié de la faculté de théologie de Fourvière, 1971, p. 25.

3. À ce sujet, le moment est peut-être venu de poser des actes solennels de repentance. L'homme pourrait demander pardon à la femme, pour les siècles de misogynie, de rapports de forces, de domination qu'il a imposés à la femme, comme l'a suggéré Jean-Paul II dans sa Lettre aux femmes, 1995, § 5.

 

Le rapport des sexes, fût-il violent, est comme travaillé de l'intérieur par une autre logique, qui intègre de fait l'altérité, et qui la convertit en rapport de don et de reconnaissance d'amour. Malgré l'opacité de l'histoire, ce serait donc bien la dialectique homme-femme qui serait première. En effet, la dialectique maître-esclave est radicalement insuffisante pour penser l'engendrement du corps social. D'ailleurs, comment justifier que l'affrontement violent initial ne s'achève pas par la mort du plus faible, auquel cas «la lutte n'aurait été qu'un fait divers de la jungle t » ? D'où vient cette retenue, ce scrupule devant la suppression de l'autre? Et si l'esclave demande grâce, c'est qu'il espère encore, lui aussi, quelque chose de son vainqueur.

Cela nous conduit à penser que la dialectique maître-esclave n'est intelligible comme puissance d'engendrement social qu'interprétée à la lumière de la dialectique homme-femme. La dialectique homme-femme serait plus originaire que la dialectique maître-esclave. « La relation homme-femme est, on le voit, à la fois "base établie" à toute autre relation sociale et promesse de réunification ou réconciliation par-delà les concurrences et luttes diverses qui tissent aussi l'histoire2. » Sans elle, aucun lien social n'est pensable. Pour qu'un rapport de forces s'instaure, encore faut-il qu'un lien d'humanité existe au préalable, qu'une unité plus originaire le rende possible. « La générosité et la fécondité de la dialectique homme-femme est'l'horizon de tout déchirement et de toute lutte. Elle est aussi la condition d'actualité de toute réconciliation puisqu'elle révèle en acte la communion originaire 3. » La dialectique homme-femme serait donc plus originaire que le rapport de forces, la recherche du pouvoir, ce qui s'oppose à la thèse de Michel Foucault. L'horizon de la communion n'est pas un voeu pieux, simplement idéaliste, puisque celleci est révélée comme étant plus originaire que le conflit.

1. G. FESSARD, L'Actualité historique, p. 142.

2. J.-Y CALVEZ, « Homme et femme », dans Études, 3774, (1992), p. 358.

3. A. MATTHEEUWS, S'aimer pour se donner. Le sacrement du mariage, Bruxelles, Lessius, colt. « Donner raison », n° 14, 2004, p. 94.

 

Il est par ailleurs étonnant de constater que, dans un texte de jeunesse, les Manuscrits de 1844, Marx a eu clairement l'intuition de la dialectique homme-femme et de sa priorité naturelle et nécessaire sur la dialectique maître-esclave, bien qu'il n'ait jamais tiré les conséquences d'une telle intuition

Le mystère du rapport de l'homme à l'homme (Mensch) trouve son expression non équivoque, décisive, manifeste, sans voiles, dans le rapport de l'homme (Mann) à la femme, et dans la manière dont sont compris leur rapport générique, naturel, immédiat. Le rapport immédiat, naturel, nécessaire de l'homme à l'homme (Mensch) est le rapport de l'homme (Mann) à la femme. Dans ce rapport générique naturel, le rapport de l'homme (Mensch) à la nature est immédiatement son rapport à l'homme (Mensch), de même que le rapport de l'homme à l'homme (Mensch) est immédiatement son rapport à la nature, sa propre détermination naturelle 1.

 

Ce texte très dense résume parfaitement l'essentiel, à savoir que la relation entre l'homme et la femme unit ce que le rapport de force maître-esclave disjoint: l'économique et le politique, on pourrait ajouter la nature et la liberté, le corps et l'esprit. , Cette conjonction engendre la vie sociale. La vie conjugale et familiale est donc le lieu où l'homme et la femme peuvent vivre cette coïncidence du politique et de l'économique, car elle est ordonnée au don de la vie. Elle se déploie en maternité, paternité, fraternité. Par elle, le dynamisme du don vient visiter et travailler de l'intérieur la logique de l'affrontement violent et mortifere entre les hommes. Elle seule est porteuse d'une promesse de réconciliation qui préfigure l'accomplissement de l'histoire. C'est ce qui manquait tragiquement à la réconciliation hégélienne et à sa reprise marxiste. De la seule lutte violente, ne peut sortir aucune fin réconciliée de l'histoire.

Au coeur de la dialectique homme-femme, l'union conjugale est le moment singulier de cette réconciliation

 

L'union conjugale réalise l'intense communion de l'être humain à l'être humain et à la nature, selon une coïncidence des deux rapports qui ne se retrouve nulle part ailleurs dans l'existence humaine. Dans l'union conjugale, le rapport de l'être humain à l'être humain est immédiatement son rapport à la nature, de même que le rapport de l'être humain à la nature est immédiatement son rapport à l'autre être humain. La nature ici, c'est le corps de chaque conjoint, cette fraction de l'univers en laquelle tout l'univers se concentre et se récapitule pour chacun par l'autre. Dans l'union conjugale, la liberté qui se donne s'identifie au corps dans lequel elle s'incarne par lequel elle se communique. Pour  l'homme, il n'y a pas la liberté de la femme et aussi le corps de la femme mais une liberté incarnée, faite chair. Et de même pour la femme à l'égard de l'homme. Cette coïncidence des deux rapports ne se réalise pas dans tous les moments de la vie conjugale, mais elle se produit dans l'acte même de l'union 2

1. K. MARX, Manuscrits de 1844, trad. É. Bottigelli, Paris, Éd. sociales, coll. « OEuvres complètes de Karl Marx », 1962, p. 86, cité par É. POUSSET, art. « homme » du Dictionnaire de spiritualité, VII/ 1, Paris, Beauchesne, 1969, col. 640.

2. É. PoussET, Union conjugale et liberté. Essai sur le problème traité par l'encyclique Humanae vitae, Paris, Éd. du Cerf, 1970, p. 28.

 

 Cette conjonction fondamentale, union des contraires, exprimée au plus haut point dans l'union conjugale, est le signe efficace, inscrit dans la chair, du dépassement du rapport de forces (maîtreesclave), le signe de la réconcilitaion de l'homme avec lui-même et avec la nature dégageant l'horizon d'un achèvement réel de l'histoire et le signe de l'ouverture à une fécondité pour le corps social tout entier. La dialectique homme-femme se révèle donc première et plus fondamentale que la dialectique maître-esclave. Au coeur de la société, le don et la communion dans l'altérité sont premiers, avant la lutte pour le pouvoir et le rapport de forces 2.

A la lumière de ce qui vient d'être dit, nous sommes conduits à dépasser tout schéma de rivalité, de rapport de forces ou de comparaison, schéma que peut induire le concept de différence, surtout quand il est pensé au pluriel, conduisant à énumérer les différences. Au-delà de tous les soupçons d'inégalité, la différence homme-femme est d'abord un fait qui se donne, avant même que nous cherchions à la qualifier. La différence n'est pas de l'ordre d'une spécificité qui permettrait de dresser le catalogue des qualités ou des rôles masculins et féminins. La définition de l'homme et de la femme, du masculin et du féminin, échappe toujours quelque peu à celui qui veut la saisir.

   L'homme et la femme se définissent comme ils peuvent l'un par rapport à l'autre, mais toujours dans l'événement singulier d'une rencontre intersubjective. C'est de la rencontre réelle et donnée que jaillit la vérité de la différence qui reste à déchiffrer. « La différence naît de la rencontre entre l'homme et la femme,

de chaque rencontre entre un homme et une femme 3. » Hommes et femmes se rencontrent certes dans tous les domaines de leur

2. Voilà clairement dépassée la lecture foucaldienne de la sexualité humaine en terme exclusif de rapport de forces, de pouvoir et d'assujetissement.

3. X. LACROIX, L'Avenir c'est l'autre, Paris, Éd. du Cerf, 2000, p. 223 (c'est l'auteur qui souligne).

vie (sociale, professionnelle, familiale, culturelle, etc.), mais la rencontre amoureuse exclusive entre un homme et une femme qui décident de constituer un couple est incontournable. Il n'y a pas une seule manière de vivre la rencontre amoureuse. C'est alors à chaque couple d'inventer sa différence dans l'événement singulier qui fonde leur alliance, l'un et l'autre révélant d'une manière unique sa masculinité et sa féminité, chacun naissant à son identité sexuée dans la rencontre intime et durable de l'autre sexe'. Il y aurait alors un lien fondamental entre mariage et sens de la sexuation. A contrario, l'expression incongrue « mariage homosexuel» se révèle absurde. C'est un concept purement idéologique, forgé de toutes pièces pour faire exister dans le langage une irréalité 2. Parler de mariage c'est plus que de parler de couple, rencontre empirique de deux psychismes. C'est parler d'alliance, de deux sujets qui se sont librement choisis dans une solidarité durable qui impliquera combats et dépassements des traits caricaturaux et superficiels de chaque sexe. Alors seulement se révélera la différence en sa vérité, comme un don gracieux. La vie conjugale est donc le lieu par excellence de la révélation de cette différence, comme expérience d'altérité 3.

Cette approche de la sexuation exigera un changement de méthode. Puisque la sexuation est de l'ordre d'une donation fondatrice d'humanité, ses manifestations seront repérables et descriptibles dans une perspective phénoménologique. Il nous faut quitter le vocabulaire de la détermination (caractéristiques naturelles, culturelles, rôles, etc.), tendant à objectiver des qualités, voire des clichés ou des caricatures, de l'homme et de la femme,

1. Jean LACxolx a pu écrire : « C'est par le mariage que l'homme devient pleinement homme et la femme pleinement femme », Forces et faiblesses de la famille, Paris, Éd. du Seuil, 1948, p. 64. Ce propos nous semble trop restrictif, laissant entendre qu'un célibataire ne sera jamais pleinement homme ou pleinement femme, ce qui est inacceptable.

2. Voir à ce sujet Th. CoLLIN, Le Mariage gay, Paris, 2005.

3. Certes, à l'adolescence où les identités sont encore incertaines, cette rencontre en vérité est rare. Aussi est-il utile de proposer à cet âge des temps et des lieux non mixtes repérables pour qu'ose peu à peu s'exprimer librement et sans peur l'identité sexuée, aussi bien entre filles qu'entre garçons. Néanmoins, n'est-ce pas dans la rencontre elle-même que l'un et l'autre sexes auront le plus de chance de se libérer de ce que chacun peut avoir d'enfermant ou de caricatural? Dans une mixité réussie, l'autre sexe me révèle qui je suis en vérité. Plus cette rencontre de l'autre sexe en vérité a lieu, plus la différence se manifeste comme une source inépuisable de sens.

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LA THÉOLOGIE DU CORPS SEXUÉ

SELON JEAN-PAUL II

La théologie du corps qui, depuis le début,

est liée à la création de l'homme à l'image de Dieu,

devient aussi, d'une certaine manière théologie du sexe,

ou plutôt théologie de la masculinité et de la féminité'.

 

Le philosophe personnaliste Karol Wojtyla, devenu pape en 1978, a élaboré explicitement, au début de son pontificat, une anthropologie théologique de la personne sexuée qui constitue une synthèse magistrale et audacieuse, susceptible d'éclairer puissamment le sens de la sexuation. La réception de cet enseignement est encore timide, notamment en France.

Signification sponsale du corps sexué.

L' apport majeur de la réflexion de Jean-Paul II est d'avoir montré, à la lumière de la Parole de Dieu, que le corps en tant qu'il est sexué acquiert une signification nouvelle. Dans le cadre de sa philosophie personnaliste, Karol Wojtyla affirmait déjà l'éminente dignité du corps : « C'est toute la transcendance dynamique de la personne, laquelle en soi est de nature spirituelle, qui dans le corps humain trouve le moyen et le terrain de son expression2. » Mais, c'est par l'amour conjugal comme acte produisant la communion des personnes, lequel commence par la rencontre de l'autre sexe, que la signification du corps sexué apparaît le plus clairement. L'événement de la rencontre de l'autre incarné de l'autre sexe et l'émotion devant son corps sexué deviennent un lieu essentiel d'émergence de la vie personnelle comme capacité de don et d'accueil, par quoi l'humain peut être dit à l'image de Dieu. Jean-Paul II reconnaît dans le cri de l'homme de la femme, « os de mes os, chair de ma chair ! »

1. JEAN-PAUL II, Homme et femme Il les créa, Une spiritualité du corps, Paris, Éd. du Cerf, 2005, Catéchèse du 14 novembre 1979, p. 55.

2. K. WOJTYLA, Personne et Acte, Paris, Éd. du Centurion, 1983, trad. G. Jarczyck, p. 233.

(Gn 2,23), l'expérience inaugurale de l'identité personnelle sexuée. « La profondeur et la force de cette première émotion, de cette "émotion originelle" éprouvée par l'homme, "homme" devant l'humanité de la femme et en même temps devant la féminité de l'autre être humain est vraiment unique1 » Dans la rencontre la plus incarnée entre un homme et une femme, se manifeste la profondeur de la personne. «L'expression "chair de ma chair et os de mes os" acquiert proprement cette signification : le corps révèle l'homme [...]. Dans cette manière de s'exprimer de l'homme "chair de ma chair", il y a aussi une référence à ce pour quoi le corps est authentiquement humain et donc à ce qui détermine l'homme comme personne, c'est-à-dire comme qui est "semblable à Dieu" également dans toute sa corporéité2. » L' émotion de l'homme devant la femme manifeste à quel point le corps sexué révèle la personne elle-même dans le mystère de son être créé à l'image du Créateur. C'est donc jusque dans son corps sexué que l'être humain est à l'image d'un Dieu qui, quant à lui, n'a ni corps, ni sexe.

Nous arrivons au cceur de l'enseignement de Jean-Paul II, qui est aussi l'aspect le plus original avec la notion de « sacrement primordial». Il s'agit de penser la signification ultime du corps sexué. Yves Semen résume ainsi la position de Jean-Paul II : « Le corps humain avec son sexe et par son sexe est fait pour la communion des personnes. Le fruit de cette communion comme son rayonnement est la fécondité en une autre personne [...]. Ce qui est premier, c'est la communion; la procréation est seconde car elle est une fruit de la communion [...]. Telle est la signification conjugale de notre corps : nous ne pouvons pas être une personne sans nous donnera. » Le corps sexué indique une structure conjugale, ou sponsale, en ce qu'il est ordonné à la communion des personnes, avant même d'être ordonné à la procréation et au plaisir4.

1. JEAN-PAUL II, Homme et femme Il les créa, Une spiritualité du corps, Paris, Éd. du Cerf, 2005, Catéchèse du 14 novembre 1979, p. 52.

2. Ibid., p. 54 et 55.

3. Y. SEMEN, La Sexualité selon Jean-Paul Il, Paris, Presses de la Renaissance, 2004, p. 109-111.

4. Cela rejoint la position de Xavier Thévenot : des trois fonctions de la sexualité (relation, plaisir, procréation), c'est la fonction de relation et de communication interpersonnelle qu'il place en premier (X. THÉVENOT, Repères éthiques pour un monde nouveau [ 1982], Paris, Salvator, 2002, p. 22-24). Par ailleurs, le

Le point de départ d'une telle théologie du corps est la notion de création comme donation première et fondamentale, expression de l'amour divin t. À travers le mystère de la création comme don originel, l'homme et la femme s'accueillent réciproquement dans la vérité de leur corps et de leur sexe comme personnes unifiées données l'une à l'autre. Cette situation ne connaît « ni contradiction entre ce qui est spirituel et ce qui est sensible, ni rupture entre ce qui humainement constitue la personne, et ce qui dans l'homme est déterminé par le sexe: ce qui est masculin et ce qui est féminine ». C'est donc dans la lumière de la générosité de l'acte créateur que la signification de la sexuation est révélée. « Il y a un lien très fort entre le mystère de la création, en tant que don qui jaillit de l'Amour, et cette "origine" béatifique de l'existence de l'être humain comme homme et femme, dans toute la vérité de leur corps et de leur sexe, qui est simplement et purement la vérité d'une communion entre les personnes 3. »

Jean-Paul II fait donc le lien explicite entre l'acte créateur comme don originaire et le sens de la différence homme-femme. Signe d'une donation originelle, le sexe comme limite inscrite dans la chair prédispose au don de soi, à la communion, à la fécondité. Il s'agit en effet de penser la richesse de la différence homme-femme en son lieu vocationnel propre : le mariage comme mystère de conjugalité, rendant possible un amour personnel, durable et volontaire qui vise la communion des personnes. Mais terme « sponsal » convient mieux que « conjugal ». Nous faisons nôtre ici la remarque d'Yves Semen: «Le terme "conjugal" est purement factuel et désigne la "conjugaison" des différences de tous ordres qui peut être vécue dans le mariage. Ainsi l'union conjugale désigne la conjugaison des sexes. Une traduction plus fidèle exige d'employer l'expression "signification sponsale", même si le terme "sponsal" est peu usité en français. Son étymologie est très significative: "sponsal" vient de sponsa en latin qui veut dire "épouse". Ainsi le corps signifie la vocation aux épousailles de la personne, c'est-à-dire au don d'ellemême, ce qui dit beaucoup plus que la simple conjugaison des différences », Y. SEMEN, La Sexualité selon Jean-Paul II, Paris, Presses de la Renaissance, 2004, p. 108 et 109.

1. « "Dieu vit tout ce qu'il avait fait et voici que c'était très bien". Ces paroles nous font entrevoir dans l'amour le motif divin de la création, comme la source dont elle jaillit: seul l'amour en effet engendre le bien et se complaît dans le bien (voir 1 Co 13). Aussi la création comme action de Dieu [...] signifie aussi [...] donation », Catéchèse du 2 janvier 1980, p. 75.

2. JEAN-PAUL II, Catéchèse du 2 janvier 1980, p. 73.

3. JEAN-PAUL II, Catéchèse du 9 janvier 1980, p. 79.

c'est bien en tant qu'être incarné et sexué, c'est-à-dire en tant que l'aptitude à la relation d'amour comme don de soi est inscrite dans la chair, que l'homme est dit « à l'image de Dieu ». Si l'auteur de Genèse 1, 27 écrit « mâle et femelle », là où il aurait pu se contenter de « homme et femme », n'est-ce pas pour insister sur cet ancrage charnel de l'image de Dieu ? À partir de ce fondement originel, penser théologiquement la sexuation humaine s'impose comme une tâche nécessaire : « La théologie du corps qui, depuis le début, est liée à la création de l'homme à l'image de Dieu, devient aussi, d'une certaine manière théologie du sexe, ou plutôt théologie de la "masculinité" et de la "féminité" qui a son point de départ dans le livre de la Genèse'. »

Dans ce contexte précis, la sexuation apparaît comme le signe inscrit dans la chair du don originel et premier de la création.

Voici ce qu'est le corps: un témoin de la création en tant que don fondamental, donc un témoin de l'Amour comme source dont est né le fait même de donner. La masculinité-féminité - c'est-à-dire le sexe - est le signe originel d'une donation créatrice, d'une prise de conscience de la part de l'être humain, homme-femme, d'un don vécu, pour ainsi dire, de la manière originelle. C'est avec cette signification-là que le sexe prend sa place dans la théologie du corps 2.

L'expérience de la nudité originelle, réciproque, sans honte, exprime le fait que la personne est libérée de l'aspect instinctif, animal, déterminé de son propre corps sexué.

La signification sponsale du corps est alors une révélation et une découverte à la fois

Le corps humain avec son sexe, sa masculinité et sa féminité, vu dans le mystère de la création est non seulement une source de fécondité et de procréation, comme dans tout l'ordre naturel, mais il comprend depuis « l'origine » l'attribut « sponsal », c'est-à-dire la capacité d'exprimer l'amour: cet amour, justement, par lequel l'homme-personne devient don et - par l'intermédiaire de ce don - réalise le sens même de son essence et de son existence3.

C'est donc le don désintéressé de soi-même, comme signe d'une donation originelle, qui révèle la beauté et la valeur éternelle de la sexuation, de la féminité et de la masculinité'. La relation interpersonnelle entre l'homme et la femme se caractérise comme don de soi à l'autre et accueil du don de l'autre. Éclairons en nous inspirant de l'ontodologie de Bruaire. Le don de soi est un don libre dans la mesure où le donateur est un être donné à luimême par Dieu, donc libre. L'accueil de l'autre comme don est possible dans la mesure où l'autre est donné par Dieu, comme un être donné à soi-même. La signification sponsale (ou conjugale) du corps « indique une capacité particulière d'exprimer l'amour dans lequel l'être humain devient don » à laquelle correspond une « profonde disponibilité à l'affirmation de la personne ». C'est une « capacité de vivre le fait que l'autre - la femme pour l'homme et l'homme pour la femme - est, par le moyen du corps, quelqu'un que le Créateur a voulu "pour lui-même", c'est-à-dire l'unique, l'impossible à répéter, quelqu'un voulu par l'éternel Amour2 ». C'est parce que l'homme et la femme se reçoivent mutuellement des mains du Créateur qu'ils sont, en leur corps sexué, l'un pour l'autre absolument uniques. Cette capacité révèle la signification la plus profonde du corps sexué, et rend possible la communion des personnes : « L' affirmation de la personne n'est rien d'autre que l'accueil du don (l'homme est donné à la femme par Dieu, la femme est donnée à l'homme par Dieu) qui par sa réciprocité crée la communion des personnes3. »

1. « Le corps humain, orienté intérieurement par le "don sincère" de la personne, non seulement révèle la masculinité et féminité sur le plan physique, mais il révèle une valeur telle et une beauté telle que la dimension simplement physique de la sexualité est totalement dépassée », JEAN-PAUL II, Catéchèse du 16 janvier 1980, p. 85.

2.Ibid., p. 85.

3. Ibid., p. 86. Une synthèse de la « signification sponsale » du corps sexué a été donnée en 1995: « Masculinité et féminité sont des dons complémentaires. De ce fait la sexualité humaine est partie intégrante de la capacité concrète d'amour que Dieu a inscrite dans l'homme et la femme [...]. Cette capacité d'amour comme don de soi est "incarnée" dans le caractère sponsal du corps dans lequel s'inscrit la masculinité et la féminité de la personne», CONSEIL PONTIFICAL POUR LA FAMILLE, Vérité et signification de la sexualité humaine, 8 décembre 1995, Droguet-Ardant-Mame, 1996, § 10.

La communion des personnes, échange de dons entre l'homme et la femme.

La structure « donner-accueillir le don » conduit à la révélation réciproque de l'homme et de la femme, de l'homme par le don de la femme et de la femme par le don de l'homme. Cette structure donne d'entrer dans la communion des personnes. La vérité de la sexuation est interprétée par le don mutuel qui révèle les personnes à elles-mêmes et à l'autre, ce qui créé la communion des personnes, en vertu de la connexion entre don et accueil du don : « Donner et accepter le don se compénètrent de sorte que le fait de donner lui-même devient acceptation et celui d'accepter revient à donner'. »

La communion des personnes induit un dynamisme d'approfondissement du don mutuel et de révélation réciproque de sa propre identité sexuée. Ce processus concerne d'abord l'être de' la femme

La femme, qui dans le mystère de la création est « donnée » à l'homme par le Créateur, est grâce à l'innocence originelle, « accueillie » par lui, c'est-à-dire acceptée comme don [...]. L'acceptation de la femme par l'homme et sa manière de l'accueillir deviennent quasi une première donation, si bien que la femme en se donnant [...] « se découvre elle-même », grâce au fait qu'elle a été acceptée et accueillie, et en même temps, grâce à la manière dont elle a été reçue par l'homme2.

Cette révélation de la femme à elle-même et à l'homme, par son don et l'acceptation par l'homme de son don, génère une dynainique particulière : dans « l'offrande de ce qu'elle est dans toute la vérité de son humanité et dans toute la réalité de son corps et sexe, de sa féminité, elle atteint la profondeur intime de sa personne et parvient à la pleine possession de soi-même ». Le fait de se trouver soi-même dans son propre don devient source d'un nouveau don de soi, produisant la réciprocité et l'approfondissement du don. « La femme est dès l'origine confiée à ses yeux, à sa conscience, à sa sensibilité, à son "coeur" [...]. [L'homme] doit

1. JEAN-PAUL II, Catéchèse du 6 février 1980, p. 95.

 2. Ibid.

avec le Christ dont le Moi divin veut informer tout leur être : Ceci est Mon Corps, Ceci est Mon Sang'. » Inversement, nombreux sont les mystiques qui, à la suite du Cantique des cantiques, utilisent le langage de l'amour humain pour traduire l'union spirituelle à Dieu. Sainte Angèle de Foligno, méditant sur la croix, ose écrire : « J'étais tellement enflammée que, me tenant debout à côté, je me dépouillai de tous mes vêtements et m'offris tout à luit. » Le mystère eucharistique serait essentiellement un mystère nuptial. Selon la métaphore qui court tout au long du Nouveau Testament, l'Église, communauté des croyants, est comme l'Épouse qui vient à la rencontre du Christ-Epoux qui s'offre à elle.

Faut-il pour autant aller jusqu'à développer un parallèle strict entre liturgie eucharistique et amour conjugal? Peut-on retrouver dans l'échange intime des amants des étapes comparables à celles qui rythment la liturgie eucharistique (schématiquement : purification, pardon, écoute de la Parole, profession de foi, offertoire, communion, envoi) ? En évitant de durcir le trait ou de tomber dans un concordisme dé' mauvais aloi, en prenant soin de laisser au langage des corps toute sa fantaisie et son imprévisibilité, et en maintenant la distance dans ce qui ne peut être qu'une analogie, on retiendra tout de même la signification symbolique d'un tel rapprochement. Esquissons-le sommairement. Si dans l'amour conjugal, une purification est requise, elle concerne l'âme mais aussi le corps : « Le Christ a aimé l'Église: il s'est livré pour elle, afin de la sanctifier en la purifiant par le bain d'eau3. » Se demander pardon conduit à retrouver la communion des coeurs. Le dialogue, échange de paroles, clarifie les désirs, les intentions, les attentes réciproques. La parole permet de s'inscrire à nouveau dans une histoire commune en renouvelant la confiance en l'autre, la confiance en soi-même, la confiance dans l'amour qui nous lie, la confiance en l'avenir. Il faut que cette confiance soit dite à l'autre, telle une confession de foi. Après avoir constaté et vécu l'accord sur l'essentiel qui fait tenir, peuvent alors survenir l'abandon, l'offrande et le partage des corps. L'offrande des corps devient offertoire. «L'homme et la femme deviennent le pain et le vin de l'eucharistie », écrit le théologien orthodoxe

1. Ibid., p. 66 et 67.

2. Cité par M. DUBOST, Les Femmes, Paris, Marne-Pion, 2002, p. 94. 3. Ep 5,25-26.

Jean Chryssavgis. S'offrir c'est s'abandonner, lâcher prise, se laisser regarder par l'autre dans sa nudité, sans crainte, comme une icône qui donne à goûter la présence de l'invisible : « Il voulait se la présenter à lui-même toute resplendissante, sans tache ni ride, ni rien de tel, mais sainte et immaculée ; de la même façon, les maris doivent aimer leur femmes comme leurs propres corps'. » L'offrande mutuelle des corps exprime un sommet de l'amour, dans la mesure où c'est l'offrande de toute la personne qui est en jeu. L'offrande réciproque des personnes est alors comme plongée, vivifiée, purifiée, personnalisée, dans l'Offrande amoureuse du Christ. Ce mouvement du don mutuel des corps, et donc des personnes, est un mouvement de désappropriation et d'abandon qui conduit à vivre l'ouverture spirituelle à la source de tout don. « Ni le mari ni la femme ne s'approprie ce que l'autre offre. Au contraire, chacun l'offre en retour - en même temps que son propre être - à la source de toute vie, à Dieu, que chacun de nous vient contempler, et rencontrer, et aimer dans l'autre », écrit un théologien orthodoxe 2.

En maintenant fermement la distance entre l'existentiel et le sacramentel, concluons qu'il y aurait une sorte d'éclairage réciproque entre la communion eucharistique et la communion conjugale. La communion eucharistique réalise et déploie le don parfait, définitif et sans réserve du Christ aux hommes, en son corps et son sang. Ce don premier introduit la personne dans le dynamisme eucharistique de la vie trinitaire, dans l'action de grâce éternelle du Fils au Père. C'est donc par la chair livrée du Verbe incarné que l'eucharistie éternelle se communique sacramentellement aux hommes et aux femmes. Ceux-ci sont alors rendus capables d'exprimer par le don de leur personne, et en particulier, par le don réciproque de leur corps, une communion qui vient de plus loin qu'eux-mêmes.

1. Ep 5,27-28.

2. Jean CHRYSSAVGIS, « Amour, mariage et sexualité », première publication dans Souroge, revue du diocèse du patriarcat de Moscou en Grande-Bretagne. Traduit de l'anglais par le Service orthodoxe de presse, SOP n° 275, février 2003.

 Ainsi, la communion conjugale pourrait tout entière être récapitulée (au sens théologique qu'Irénée de Lyon donnait à ce terme dans sa doctrine de la récapitulation) dans les paroles du Christ lues lors de la consécration eucharistique : « Ceci est mon corps. » Saisi dans l'offrande eucharistique du Christ, l'amour humain en son expression chamelle et sexuée, par-delà ses fragilités, ses ambiguïtés ou ses errances, retrouve son orientation originelle, sa signification conjugale, sa capacité de don authentiquement personnel.

Ceci est mon corps

Blasphème ou réalité?

 

Toute recueillie, je crois pouvoir aujourd'hui prononcer devant toi ces mots divins

« Ceci est mon corps »

Je prends à deux mains ce corps,

avec sa pesanteur matérielle, ses élans et ses résonances,

avec la profondeur de sa sensibilité, et la richesse de son monde affectif... ses maternités, ses engendrements sans fin... avec son insatiable soif d'éternité.

« Ceci est mon corps »... que je te donne en nourriture.

Reçois-le en toi, comme le don le plus achevé que je puisse te faire, de l'être que je suis, moi, ton épouse.

En échange, tu me donnes, et je te reçois

ton corps d'homme, fait de vigueur et de puissance.

Avec ses violences et ses fougues, ses tentations et sa fécondité... Avec ses dons originaux, ses projets exubérants, et sa poursuite essoufflante du but, du seul but de ta vie. Avec ton âme tranchante comme une épée, pure comme un lac. Et cette clarté de Dieu qu'elle reflète.

« Ceci est mon corps »

Quand nous communions l'un à l'autre,

ce n'est pas un blasphème de dire que nous communions au Christ dont chacun de nos êtres est pétri.

En toi et moi, péchés et misères, joies et peines du couple, deviennent unique Hostie à l'image du Christ.

Qu'en Lui, par Lui, avec Lui, soit enfin sanctifié l'amour d'un homme et d'une femme devenu Cantique d'action de grâces, Messe à la gloire de Dieu 1.

 

Une lecture précise du Cantique des cantiques confirmerait le lien sacramentel entre rencontre amoureuse et communion eucharistique, d'une façon aussi surprenante qu'audacieuse. Ce poème, indissociablement érotique et mystique, exprime le désir et la rencontre entre le bien-aimé et sa bien-aimée, mais aussi indissociablement le désir et la rencontre entre l'homme et son Dieu.

1. ANCELLE, Le Mystère du couple, Éditions ouvrières, 1964. .... cité dans Homme et femme l’altérité fondatrice de François de Muizon Cerf  p 288

La langue hébraïque célèbre très concrètement le corps de l'être aimé(e), jusqu'en son intimité. Citons un verset parmi bien d'autres : « Ton nombril est une coupe arrondie, où le vin parfumé ne manque pas ; ton ventre est un amas de froment, entouré de lys 1. » Ce qui est traduit ici par « nombril » (shrrk) signifierait aussi « creux, matrice, coupe dans laquelle on peut mettre le vin », ou plus crûment « vulve » 2. Le corps de l'amante est présenté comme le réceptacle de la semence masculine représenté par l'amas de froment ainsi que le lieu de l'ivresse du plaisir symbolisé par le vin parfumé. Dans l'amour conjugal, le don de la vie est symbolisé par les attributs mêmes de l'eucharistie, le pain et le vin. Enfin, à l'instar de la communion eucharistique, le temps de la communion intime est un temps privilégié, mais qui s'ouvre sur l' après, sur le quotidien d'une relation vécue dans l'opacité des corps et des situations3.

Le rapprochement était audacieux, certes, et trop vite esquissé, mais au moins a-t-il le mérite de prendre au sérieux le réalisme du sacrement et d'indiquer l'horizon herméneutique ultime du langage du corps et des gestes sexuels : l'offrande, l'action de grâce, l'eucharistie éternelle vécue par le Fils en sa chair. La prière « que l'Esprit saint fasse de nous une éternelle offrande à ta gloire4 », ne doit-elle pas se vivre jusque dans l'offrande des corps ? « Votre corps est le Temple du Saint-Esprit qui est en vous [...]. Glorifiez donc Dieu par votre corps ! 5 » S'il s'agit

1. Ci 7, 3.

2. La TOB y voit « un euphémisme pour désigner le pubis, le sexe, partie du corps qui peut être décrite comme un croissant et qui est ainsi représentée sur les statuettes des femmes nues retrouvées au Moyen-Orient », Traduction oecuménique de la Bible, Ancien Testament, Paris, Éd. du Cerf, 1983, note w, p. 1608.

3. Ce paragraphe s'inspire des intuitions du sexologue Olivier Florant, qui développe un tel parallèle. Sans doute ne prend-il pas assez de précautions et at-il tendance à sacraliser le plaisir d'une manière ambiguë. Néanmoins l'idée est suggestive: « Dans l'effusion génitale, le couple vit la joie d'être tout en soi et tout à l'autre. Bien sûr cette communion ne dure qu'une fraction de temps. Puis une partie secrète de chacun se referme, comme se referme l'iconostase. Chacun revient sur terre et reprend sa route propre, comme lors de l'envoi final à la messe. Il vit de nouveau l'absence physique de l'être aimé. [...] Cette solitude ne fait pas peur; le conjoint est présent en esprit, dans l'attente confiante de la suite. Chacun se sent plus fort pour affronter le monde », O. FLORANT, Ne gâchez pas votre plaisir, il est sacré. Pour une liturgie de l'orgasme, Paris, Presse de la Renaissance, 2006 p. 200 et 201.

4. Rituel catholique de la messe, Prière eucharistique n° 3.

5. 1 Co 6,19-20.

d'abord de l'eucharistie éternelle du Fils qui rend grâce au Père, dans le dynamisme de l'Esprit, celui-ci, Verbe incarné, entraîne dans son mouvement l'humanité tout entière. Le mystère eucharistique révèle qu'il nous faut chercher au coeur du mystère trinitaire lui-même la lumière absolument décisive sur le sens de l'altérité homme-femme.

p290

LE MYSTÈRE CONJUGAL,

PARTICIPATION AU MYSTÈRE TRINITAIRE

Quand le mari et la femme s'unissent dans le mariage,

ils ne forment pas une image de quelque chose de terrestre,

mais de Dieu lui-même'.

Au caeur du mystère trinitaire.

Il n'est nullement question ici de développer toute la richesse du dogme trinitaire, ni a fortiori de prétendre épuiser le mystère. Remarquons d'abord que la philosophie rationaliste, avant Hegel notamment, n'a pas considéré le mystère trinitaire comme digne d'intérêt pour la raison2. Par ailleurs, les spéculations trinitaires médiévales à dominante ontologique ayant insisté sur les propriétés des personnes, et leur commune nature, ne semblent pas les mieux adaptées pour entrer dans la profondeur du mystère. Suivons ici le conseil de saint Augustin : « Pourquoi laisser papillonner çà et là ta pensée ? Dieu n'est rien de tout ce que tu imagines, rien de tout ce que tu crois comprendre. Tu veux en avoir quelque avant-goût: Dieu est amour (caritas)3. » C'est donc sous l'angle de la charité et de la relation que nous nous approcherons du mystère. Cette approche devrait nous permettre d'articuler des concepts aussi centraux que ceux de personne, de relation, de don, de pluralité et de différence, de communion et d'unité.

1. SAINT JEAN CHRYSOSTOME, PG 61/215 et 62/387.

2. « Du dogme de la Trinité pris à la lettre, on ne saurait tirer absolument rien pour la pratique », E. KANT, Le Conflit des facultés, trad. A. Renaut, Paris, Gallimard, coll. « La Pléiade », p. 841.

3. SAINT AUGUSTIN, Sermon 21, n. 2.

 

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ils ont un regard sur la femme totalement différent

http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/2010/06/norv%C3%A8ge-100-des-viols-commis-par-des-%C3%A9trangers-souvent-musulmans.html

29 juin 2010

Norvège : 100% des viols commis par des étrangers souvent musulmans

Selon des études statistiques rendues publiques par la police norvégienne, 100% des viols commis à Oslo en 2007, 2008 et 2009 l’ont été par des immigrés « non occidentaux ». Les enquêtes précisent que ces crimes ont tous été commis par des Kurdes ou des Africains, notamment des réfugiés somaliens, nombreux dans ce pays. Hanne Kristin Rohde, directrice de la police criminelle d’Oslo, déclare que

"les coupables sont des hommes étrangers, relativement jeunes ; ils sont souvent demandeurs d’asile et viennent de pays en guerre ou de pays qui ont un regard sur la femme totalement différent de celui qui règne en Norvège".

Ces viols s’accompagnent systématiquement d’une grande violence, le criminel, généralement musulman, estimant "punir une femme impudique".

A l’échelle du pays, le nombre de viols concerne, selon les années, de 70 à 85%, des criminels musulmans. Les victimes sont à 90 % des Norvégiennes de souche. Des imams estiment que ces viols seraient dus «au comportement insouciant ou provoquant des jeunes filles norvégiennes» ! (source : Minute)

CHARLES BAUDELAIRE

L'invitation au voyage ...

Mon enfant, ma soeur,
Songe à la douceur
D'aller là-bas vivre ensemble !
Aimer à loisir,
Aimer et mourir
Au pays qui te ressemble !
Les soleils mouillés
De ces ciels brouillés
Pour mon esprit ont les charmes
Si mystérieux
De tes traîtres yeux,
Brillant à travers leurs larmes.

Là, tout n'est qu'ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté.

Des meubles luisants,
Polis par les ans,
Décoreraient notre chambre ;
Les plus rares fleurs
Mêlant leurs odeurs
Aux vagues senteurs de l'ambre,
Les riches plafonds,
Les miroirs profonds,
La splendeur orientale,
Tout y parlerait
À l'âme en secret
Sa douce langue natale.

Là, tout n'est qu'ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté.

Vois sur ces canaux
Dormir ces vaisseaux
Dont l'humeur est vagabonde ;
C'est pour assouvir
Ton moindre désir
Qu'ils viennent du bout du monde.
- Les soleils couchants
Revêtent les champs,
Les canaux, la ville entière,
D'hyacinthe et d'or ;
Le monde s'endort
Dans une chaude lumière.

Là, tout n'est qu'ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté.

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... en France ..en Europe ...

...L'amour s'est en effet "refroidi »  ... la charité fait face à l'empire aujourd'hui planétaire de la violence....

Cette montée vers l'apocalypse est la réalisation supérieure de l'humanité. Or plus cette fin devient probable, et moins on en parle.

Il faut donc réveiller les consciences endormies.

Vouloir rassurer, c'est toujours contribuer au pire.

René Girard.

  

 

  "L'esprit constitue un champ de relations tourné vers la totalité de ce qui existe "  Joseph Pieper

Loin que ce soit être qui illustre la relation , c'est la relation qui illumine l'être.     Gaston Bachelard

Les composantes de la société ne sont pas les êtres humains, mais les relations qui existent entre eux.   Toynbee

 

 

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