Pendant de longues années, ceux d’entre nous qui
représentons le mouvement pro-famille et pro-vie à l’ONU,
avons focalisé notre attention sur les documents soumis à la
négociation ; on pourrait dire que nous n’avons pas vu la forêt à
cause des arbres. Cette expression américaine indique que nous nous
sommes concentrés sur des détails, et que nous avons manqué l’image
d’ensemble.
Il est vrai que nous avons réussi à empêcher que
l’avortement ne devienne un droit humain international et nous avons
assez largement mis un coup d’arrêt au mouvement homosexuel. Pour
importantes que soient ces questions, il en est d’encore plus
importantes à l’ONU que nous avons failli
ne pas voir.
Ce que je veux décrire ici, c’est cette image
d’ensemble : le fait que des radicaux à l’ONU,
alliés avec des avocats et des juges et d’autres promoteurs radicaux
à travers le monde sont en train d’opérer la plus spectaculaire
prise de pouvoir que le monde ait jamais connue. Ils veulent décider
pour l’humanité entière jusqu’aux détails les plus intimes de la vie
de chacun ; et ils sont décidés à le faire depuis leurs positions
d’élites exaltées de l’ONU à New York, de
l’Union européenne à Bruxelles et d’autres centres internationaux du
pouvoir.
Pour arriver à cette fin ils sont obligés
également de refaire le système international. Là où, naguère, les
relations internationales étaient constituées par les relations
entre et parmi les Etats, elles se manifestent aujourd’hui à travers
l’interférence de corps constitués internationaux qui se mêlent de
la vie des individus. Là où, naguère, les Etats souverains
déterminaient ce qui était le mieux pour les gens habitant à
l’intérieur de leurs frontières, les progressistes transnationaux
cherchent à usurper ce pouvoir des Etats et des peuples.
Nous sommes en présence d’un changement « tsunamique »
des politiques sociales et du système international. Le résultat de
tout cela ? Un monumental déficit démocratique. Posez-vous la
question : qui vous représente aux Nations unies ? Le fait que
personne parmi vous ne puisse répondre met en évidence cet immense
déficit démocratique, parce que ce sont précisément ces gens qui se
sont arrogé la tâche de diriger votre vie intime.
Telle est la grande image, et elle vise toutes les
familles du monde entier ; elle vise aussi tous les pays, au nord et
au sud, à l’est et à l’ouest, riches et pauvres. Nous sommes tous
dans ce combat ensemble.
La coalition pro-vie et pro-famille à l’ONU
a commencé à travailler pendant la phase préparatoire de la
conférence du Caire sur la population et le développement en 1990.
Nos adversaires avaient commencé à cette époque à
faire progresser l’idée du droit à l’avortement dans les documents
de l’ONU. Au départ, ils tentèrent
d’obtenir l’affirmation explicite du droit à l’avortement. Ils
subirent une défaite au Caire qui se renouvela lors des conférences
de l’ONU suivantes, par l’action d’une
coalition de chrétiens et de musulmans créée par Jean-Paul II.
Parce que cette grande coalition a vaincu les
tentatives radicales visant à faire de l’avortement un droit
universel, ces radicaux ont entamé une campagne sur le long terme
pour faire avancer leur plan par le mensonge et le truquage. Ils ont
créé des mots codés comme « santé reproductive ». Depuis l’époque du
Caire jusqu’à maintenant, ils ont réussi à placer la « santé
reproductive » ou les « droits reproductifs » dans un nombre
incalculable de documents de l’ONU.
La chose la plus importante à savoir à propos de
ces mots est qu’ils n’ont jamais été définis par les gouvernements
comme incluant un droit à l’avortement.
Notre compréhension fine de cette question s’est
accrue de manière significative depuis ces jours-là. Au fil des ans
nous avons mieux compris leurs intentions quand ils ajoutent ces
mots aux documents non contraignants de l’ONU
et c’est ce que nous appelons la stratégie du « soft law » :
le « droit mou ».
La stratégie du droit mou
La stratégie du droit mou se réfère aux menées des
radicaux internationaux en vue d’imposer ce qu’on appelle le droit
international coutumier. Il s’agit de lois qui ne sont pas
nécessairement écrites mais qui, au fil du temps, sont comprises
comme liant néanmoins les Etats. Cela s’obtient à travers une
pratique étatique constante sur le long terme avec l’idée de
respecter une obligation légale. Pour voir émerger une loi
coutumière il faut trois choses. D’abord, une pratique étatique
universelle uniforme. Autrement dit, tous les Etats doivent la
mettre en œuvre. Deuxièmement, cette pratique a dû être mise en
œuvre sur une longue période. Elle ne peut s’imposer d’un jour à
l’autre ni même en quelques décennies. Troisièmement, les Etats
doivent la mettre en pratique avec l’idée qu’ils y sont contraints
par une obligation légale. Cela place la barre très haut et explique
pourquoi il y a si peu de points de droit considérés comme des lois
coutumières internationales. L’un d’entre eux est le sauf-conduit
des diplomates. Un autre concerne la piraterie.
Les partisans de l’avortement soutiennent que si
les mots « santé reproductive » sont répétés assez souvent dans des
documents non contraignants de l’ONU,
alors on aura abouti à un droit coutumier international. Laissez-moi
dire très clairement que cela est faux, et que nos adversaires
savent que cela est faux.
Le droit coutumier international ne peut s’imposer
à partir de documents non contraignants et il ne peut davantage être
établi dans un délai de quinze ans seulement. Cela prend des
décennies et même des siècles.
Ils n’ont eu aucun succès devant de quelconques
cours de justice ou au sein des parlements en avançant leurs
arguments fondés sur le droit international coutumier.
Cela nous amène à ce qui est devenu une stratégie
plus gagnante, que nous appellerons la « stratégie du droit dur ».
La stratégie du droit dur
La deuxième chose que nous avons remarquée au fil
du temps, c’est le caractère agressivement pro-avortement des
délibérations de divers comités de l’ONU
chargés de veiller au bon respect des traités de « droit dur »
imposant le respect des droits humains. Tous ces traités de droit
dur sont assortis de ces comités devant lesquels les gouvernements
doivent périodiquement comparaître pour faire leur rapport sur la
manière dont ils appliquent le traité.
Il y a douze ans nous avons commencé à suivre le
comité chargé de veiller à l’application de la Convention sur
l’élimination de toute forme de discrimination envers les femmes (CEDAW).
Nous nous sommes aperçus que le comité était en train de dire aux
gouvernements qu’ils devaient changer leurs lois sur l’avortement.
Il faut noter à ce sujet que ce propos n’a aucune
autorité pour contraindre les gouvernements à quoi que ce soit. Il
faut noter également que le traité CEDAW
ne mentionne même pas l’avortement. Il ne mentionne même pas les
mots codés qui désignent l’avortement, la « santé reproductive ».
Pourtant, au fil des ans, nous avons tenu les
comptes ; le comité a enjoint à plus de 90 pays de changer leurs
lois sur l’avortement.
Comment peuvent-ils faire cela et quel est leur
but ?
Le comité CEDAW est
composé de 22 individus qui sont nommés, et puis soumis au vote par
les Etats parties au traité. Ils ne représentent pas les
gouvernements. Une fois élus, ils ne sont responsables qu’envers
eux-mêmes. Ces 22 personnes viennent pour la plupart de groupes de
gauche qui sont aussi des promoteurs de l’avortement. Nous sommes
ici en face du spectre de parties étatiques souveraines qui doivent
venir au rapport devant des individus qui sont pour la plupart des
promoteurs de l’avortement de la gauche dure.
Hormis l’admonestation des gouvernements, ce
groupe d’individus – des citoyens privés – a pris sur lui de
réécrire le traité en question.
Arrêtons-nous là un instant.
CEDAW est un traité de droit dur. Il est légalement
contraignant pour les Etats qui l’ont ratifié. Les Etats souverains
travaillent parfois pendant des années pour négocier de tels
traités. Ces Etats doivent généralement présenter ces traites devant
leurs parlements pour en obtenir la ratification. C’est un processus
long et laborieux, et largement démocratique. Au bout du compte, le
traité obtenu de haute lutte est contraignant pour les Etats.
Pourtant, avec ce comité, c’est un groupe de citoyens privés,
idéologiquement motivés, qui ont pris sur eux de réécrire des
traités de droit et qui tentent ensuite d’imposer leur
réinterprétation aux Etats souverains qui ont été au départ les
négociateurs du traité.
Voici très spécifiquement ce qu’a fait le comité
CEDAW. Le traité CEDAW
ne dit rien sur l’avortement. Il ne le mentionne même pas. Il ne
fait même pas allusion à la santé reproductive. Mais, dans une chose
appelée la Recommandation générale 24, le comité
CEDAW constitué de citoyens privés a cru pouvoir intégrer
l’avortement dans le document et désormais c’est une affaire de
routine pour lui de signifier aux gouvernements qu’ils doivent
changer leurs lois sur l’avortement.
Cela frappe au cœur du processus démocratique. Les
citoyens d’un Etat souverain sont en général satisfaits de ce que
leur gouvernement peut représenter et représente effectivement leurs
souhaits et leurs meilleurs intérêts. Un tel citoyen permet à son
gouvernement de négocier des traités qui lient ensuite l’Etat, et
parfois le citoyen. Ce citoyen a au moins une chance de peser sur la
politique de son propre gouvernement. Mais comment ce citoyen
pourrait-il avoir une chance de peser sur les processus du comité
CEDAW, un groupe généralement inconnu de
citoyens privés qui ne sont responsables qu’envers eux-mêmes ? Il
s’agit là d’un profond déficit démocratique.
Et qu’en est-il des effets de ces injonctions du
comité CEDAW ? Sont-elles écoutées ? Ces injonctions
provoquent-elles un effet sur le droit ? Eh bien oui. Certainement
oui.
Ces derniers mois la Haute Cour de Colombie a
renversé les lois du pays condamnant l’avortement, et au cours du
processus les juges ont cité ce qu’ils considèrent être des
obligations liées au traité CEDAW. Les
juges de la Cour suprême mexicaine ont décidé de même qu’il existe
des obligations nées du traité CEDAW qui
obligent à renverser les lois contre l’avortement.
Le groups de défense des droits de l’homme, qui
naguère pensait autrement, tient désormais cette position : que
CEDAW exige la légalisation de
l’avortement.
Tout cela est mensonge.
Cet argument est désormais en marche autour du
globe et il ne s’enracine pas seulement dans
CEDAW mais aussi dans la Convention internationale sur les
droits économiques, sociaux et culturels, où la clause sur le
« droit à la vie » est désormais interprétée par les avocats
radicaux comme incluant un droit à l’avortement.
Ce n’est pas seulement la cause des enfants à
naître qui est menacée par ces réinterprétations radicales de
traités de droit dur. Des groupes homosexuels radicaux, ainsi que
des représentants de l’ONU interprètent
désormais les traités internationaux de manière à inclure
l’orientation sexuelle et l’identité de genre parmi les catégories
de non-discrimination tout comme le sexe, la race, la religion,
l’origine nationale et les autres catégories bien établies. Les
comités de l’ONU imposeront bientôt aux
Etats d’instituer le mariage homosexuel, l’adoption homosexuelle et
l’enseignement de la propagande homosexuelle aux petits enfants.
Il ne faut pas croire que ces manœuvres
scandaleuses n’affectent que les pays en voie de développement. Cela
se produit également dans le monde développé. Cela s’est, de fait,
produit aux Etats-Unis. Il y a quelques années la Cour suprême des
Etats-Unis a fait de la sodomie homosexuelle un droit
constitutionnel. Ce faisant, la Cour suprême s’est référée à de
soi-disant nouvelles normes internationales et aux arrêts de la Cour
européenne des droits de l’homme.
Lorsque la Cour suprême a interdit la peine de
mort pour ceux qui avaient commis un crime en tant que jeune mineur,
la Cour a cité la Convention sur les droits de l’enfant – un traité
que les Etats-Unis n’ont même pas ratifié.
Certains membres de la Cour suprême des Etats-Unis
se sont engagés à continuer cette pratique qui consiste à se référer
à des documents et des traités que les Etats-Unis n’ont pas
ratifiés, mais dont ils pensent qu’ils constituent de nouvelles
normes internationales.
Cette stratégie du droit dur, émanant de la gauche
dure, affecte déjà et continuera d’affecter tous les pays du monde.
Gouvernance globale
Ce dont nous parlons s’appelle en fait
gouvernance globale. Par l’utilisation du droit mou et du droit
dur, un treillage de nouvelles normes s’impose par la force sur les
gouvernements et sur les peuples. Ces nouvelles normes n’ont jamais
officiellement fait l’objet d’une décision ou d’un vote. On y arrive
par la traîtrise, les mensonges, la déception et la force brute. Et
ils sont le fait d’un groupe qui en toute confiance s’auto-qualifie
de « progressistes transnationaux ». Ils ne croient pas au processus
démocratique. Ils croient en leur propre supériorité. Ils croient
mieux savoir que les personnages officiels démocratiquement élus, et
ils en savent certainement bien davantage que les mères et les pères
et les autres citoyens du monde entier.
La grande image est celle-ci : ils avancent sur
tous les fronts. Ils avancent à l’ONU à
travers la préparation de documents, durs et mous, et ensuite par
l’interprétation de ces documents. Ils avancent dans les systèmes
judiciaires à travers le monde ; ils imposent des changements
législatifs fondés sur des réinterprétations de traités de droit dur
et des résolutions non contraignantes.
Pourquoi est-ce important ?
Cette guerre est menée contre trois
souverainetés sacrées : la souveraineté de la nation, la
souveraineté de l’Eglise, et la souveraineté de la famille. Au
moment du jugement de Dieu, nous nous tiendrons seuls devant lui, en
tant qu’individus, mais sur cette terre Il nous donne certaines
institutions dont presque le seul propos est de nous enseigner sa
loi. Ces institutions médiatrices appelées la nation, l’Eglise et la
famille sont véritablement nos seuls professeurs. Si l’une d’elles
est dévoyée, nous pouvons nous perdre. Si chacune d’entre elles est
dévoyée, nous serons totalement perdus. Mais chacune d’entre elles
se dresse devant la notion féministe radicale de l’autonomie
complète du soi. C’est pourquoi les féministes insistent pour
affirmer que chacune de ces institutions doit changer, qu’elles
doivent devenir différentes de la manière dont Dieu les a créées, et
par ce changement, elles seront détruites.
Voilà les enjeux. Ils ne sauraient être plus
importants.
Dieu nous a appelés à vivre maintenant et ici en
vue d’une fin, et cette fin n’est pas une vie de facilité. Il nous a
appelés à vivre maintenant et ici, et c’est un temps de grand
tumulte. Il nous a appelés à vivre maintenant et ici pour défendre
sa création contre ceux qui la voudraient souiller. Il n’y a pas de
plus beau moment pour vivre qu’aujourd’hui et maintenant, car il n’y
a jamais eu de temps où il y ait eu autant besoin d’hommes et de
femmes bons.
Allez de l’avant, mes amis, allez de l’avant.
Défendez vos pays. Défendez vos Eglises. Défendez vos familles. Nous
affronterons les radicaux dans les tribunaux ; nous les affronterons
dans les parlements ; nous les affronterons dans les universités ;
nous les affronterons sur la place publique ; nous les affronterons
dans les institutions internationales. Nous n’abandonnerons jamais.
Nous ne nous rendrons jamais. Nous ne nous soumettrons jamais.
Jamais. Jamais. Jamais. Allez de l’avant !
Austin Ruse
Président de C-Fam