Maurice Zundel ... qui était-il ? ....

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Dossier :

Présentation :...lors de la première encontre, fin 2004, avec Dominique Barnérias, père modérateur de la paroisse Sainte Pauline .... essayant de le convaincre d'organiser des rencontres du type « Parole Ouverte »... Il me demanda si j'ai lu Maurice Zundel. C'était la première fois que j'entendis citer son nom  ... via Internet je découvris qu'une biographie Maurice Zundel  par Bernard de Boissière et France-Marie Chauvelot, venait d'être publiée aux Presses de la Renaissance. ... la découverte commença ... quel bonheur.... découvrir une pensée proche la sienne.....Mi 2005 ...Elsa Edstrom, m'offrit gracieusement un numéro de la revue «AUJOURD'HUI DES CHRÉTIENS» ... le numéro 163 de septembre 1997  ...

Les textes mentionnés par ce site proviennent de ces deux sources.

Extraits : 

 Zundel va droit au but : en Dieu trinitaire, à travers la relation entre le Père, le Fils et l'Esprit, c'est l'amour qui est éternellement communiqué. Dieu est ainsi, dans l'absolu de cette communication, ce à quoi il appelle l'homme.

Qui était-il ?....«D'abord il faut distinguer le but des moyens; le but c'est le bonheur, pour nous et pour les autres; et là nous découvrons Dieu en nous. Le reste, les sacrements, l'Église, la Bible, c'est des moyens. Ensuite il y a une hiérarchie des valeurs et des vérités.»

en z relations .... Maurice Zundel, qui était-il. ?

 

 

 

Source:    «AUJOURD'HUI DES CHRÉTIENS»

 

Maurice Zundel

Frédéric Mounier (La Croix)

Il fumait une centaine de cigarettes par jour, se levait tous les matins à cinq heures, travaillait, lisait, recevait, écoutait, écrivait. Il ne buvait jamais d'alcool, ne mangeait jamais de viande. Il donnait tout aux pauvres qui croisaient sa vie. Toute sa vie, Maurice Zundel fut atypique. En 1925, son évêque, à Fribourg, disait de lui «C'est un franc-tireur, et l'Église n'aime pas les francs-tireurs.» En 1972, ce fut un pape, Paul VI, qui lui demanda de prêcher sa retraite de carême, disant de lui : «C'est un génie, génie de poète, génie de mystique, écrivain et théologien, et tout cela fondu en un, avec des fulgurations.»

Celui qui fut le père spirituel de François Varillon n'a ainsi laissé personne indifférent. Son parler vrai, son expérience intérieure profonde et originale tiennent en quelques mots: «L'homme ne devient vraiment homme que s'il est libre de soi dans la rencontre d'une Présence qui le dépasse. Dieu est tout don. L'homme, libre de soi et de tout, peut se jeter dans les bras d'un Dieu qui est liberté.»

Prédicateur itinérant

Né en 1897 à Neuchâtel, il fait, très jeune, chez les Bénédictins d'Einsiedeln, l'expérience palpable du silence, l'un des piliers de sa théologie : «Dieu est silence, comme il est pauvreté.» Au grand séminaire de Fribourg, il prend ses distances avec un «Dieu, grand souverain devant le monde». Pour lui, «Dieu n'est pas une invention, c'est une découverte». Nommé vicaire à Saint-Joseph de Fribourg, on dira de lui qu'il «ne fait jamais rien comme tout le monde».

Il se retrouve donc «exilé» à Paris, six mois vicaire à Charenton. A partir de 1937, il multiplie les séjours au Caire, à Londres, à Jérusalem, à Beyrouth, à Rome, parlant ou comprenant huit langues. Frotté à l'islam, ami de Louis Massignon, il voit rapidement dans la révélation trinitaire la clé de tout le mystère de l'homme. Jusqu'à sa mort, en 1975, il mena une vie de prédicateur itinérant, sans rencontrer un grand succès. Plus poète et pasteur qu'universitaire, il publia pourtant une vingtaine de livres.

Le fil rouge de son oeuvre est fort limpide, et peut résonner encore de façon étrangement contemporaine aux oreilles des consommateurs du supermarché spirituel d'aujourd'hui.

«Je est un autre»

Au centre de sa théologie : l'homme. Le devenir, passer du «moi possessif>r' au «moi oblatif» est une vocation. Au départ, chacun est esclave de l'énergie reçue, des «pulsions impersonnelles».

Au sens propre, «il n'y a encore personne». Pour Zundel, la personne n'advient que dans le don, au prix d'une conversion. La direction vraie est dans l'«oblativité», une notion qui lui est chère. L'homme se découvre plus grand que lui-même dans la lumière qui se lève en lui dès qu'il s'ouvre à l'autre. Il n'y a d'homme véritable que dans la rencontre, la «Présence». Cela peut se faire par trois chemins : la rencontre du Beau dans l'art; la recherche de la Vérité dans la science; la communion dans la relation interpersonnelle. Et Zundel reprend Rimbaud : «Je est un autre.» La personne humaine se construit ainsi, à force de dignité, d'intériorité, de liberté, de pauvreté. Dieu dans tout cela ? La conviction de Zundel est simple : «Dieu doit être en absolu ce qui est déposé en l'homme comme appel, désir, vocation infinie.» La véritable clé de voûte de sa réflexion reste la Trinité, antidote au dieu Narcisse, élevé en potentat. Loin de s'enfoncer dans les aléas d'une pseudo-mathématique céleste, Zundel va droit au but : en Dieu trinitaire, à travers la relation entre le Père, le Fils et l'Esprit, c'est l'amour qui est éternellement communiqué. Dieu est ainsi, dans l'absolu de cette communication, ce à quoi il appelle l'homme.

Au total, se laisser mener par Zundel suppose une seule condition, posée par lui avec son habituelle limpidité provocatrice : «Si l'on ne croit pas en l'homme, il est impossible de croire en Dieu.» Parce que «pour Dieu, l'homme égale Dieu».

 

texte hébergé en  08/05

 

 

Qui était-il ?

Paul Abela

En 1940, je venais de terminer mes études secondaires chez les Pères Jésuites du Caire. J'avais eu une instruction religieuse très développée, intéressante mais non convaincante. Tout était mis à plat : dogmes, sacrements, Bible, Église, une mécanique rigoureuse, trop mécanique justement. Le Père Zundel venait d'arriver, on me l'avait recommandé. J'ai été le voir et lui ai demandé «Comment font les moines dans le désert ?Ils n'ont pas de sacrements.» Il a éclaté de rire et m'a dit «D'abord il faut distinguer le but des moyens; le but c'est le bonheur, pour nous et pour les autres; et là nous découvrons Dieu en nous. Le reste, les sacrements, l'Église, la Bible, c'est des moyens. Ensuite il y a une hiérarchie des valeurs et des vérités.» Cela m'a libéré; non que je ne pratique plus, mais je pratique avec liberté, non pas servilement, mais avec la liberté des enfants de Dieu et je lis la Bible et la Tradition avec des nuances aux antipodes du fondamentalisme.

En 1950, à mon arrivée à Paris, j'ai été logé chez les Lauer, des amis de Zundel. J'ai donc aussitôt été informé des passages du Père Zundel. J'allais l'écouter, assez souvent dans les salons de particuliers, où l'on était une quinzaine, puis chez les dominicains, où l'on était une centaine. J'ai été d'autant plus intéressé par ses conférences qu'il était au courant des débats du monde culturel contemporain et que, face aux maîtres du soupçon, Freud, Marx et Nietzsche, il accueillait avec beaucoup d'honnêteté intellectuelle et beaucoup de générosité ce qui lui paraissait légitime dans leurs revendications. J'aidais Madame Isambert à expédier à quelques centaines de correspondants les invitations pour chaque série de conférences à Paris. Et puis je l'ai fait inviter au Centre Catholique des Intellectuels Français. Mais il n'en aimait pas l'appellation, il la trouvait prétentieuse.

En 1955, lors de la sanction injuste qui avait frappé en France les Pères Chenu, Congar, Féret et de Lubac, un jour que j'accompagnais en voiture le Père Zundel, il m'a dit : «Notre Credo risque d'induire en erreur : avant que d'être tout-puissant, notre Dieu est très aimant et fragile; il faut changer de Dieu.» Je lui ai dit : «Attention, vous risquez de vous faire sanctionner; je me demande si vous n'auriez pas intérêt à commencer par dire que vous ne remettez pas en question le contenu du Credo actuel, mais certaines de ses formulations.» Il en a convenu. Mais cette audace, pour être à la hauteur des exigences culturelles de notre temps, me paraissait néanmoins indispensable.

En 1963, lorsque Mgr Montini fut élu pape, j'ai proposé à Maurice Zundel de faire une collecte pour lui payer le voyage à Rome pour qu'il rende visite à son vieil ami. Il m'a répondu «Maintenant qu'il est pape, on ne peut plus rien pour lui, il est le prisonnier de la curie.» Mais il était trop pessimiste puisque, quelques années plus tard, Paul VI qui ne l'avait pas oublié, l'invitera à prêcher, en 1972, le carême.

texte hébergé en  08/05

 

 

 

 

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