http://fr.altermedia.info/general/raymond-barre-un-homme-de-courage_10395.html#more-10395
Dans une interview diffusée le 1er
mars dans l’émission « le rendez-vous des politiques » sur France
Culture, l’ancien premier ministre dénonce « la campagne qui a été
faite par le lobby juif le plus lié à la gauche » en 1980 et
considère qu’on a fait de Maurice Papon un « bouc émissaire ».
Ci-dessous, l’intégralité des
propos de l’ancien Maire de Lyon sur Papon, l’attentat de Copernic
et Bruno Gollnisch.
Maurice Papon était le
Ministre du Budget de Raymond Barre de 1978 à 1981. Est-ce
qu’aujourd’hui vous ne regrettez pas ?
Raymond Barre : Premièrement, je
ne le regrette pas, parce que je sais dans quelle condition, j’ai
proposé au président de la République de nommer Papon, ministre du
Budget.
C’était un grand Commis de l’Etat.
Je savais qu’à Bordeaux, c’est le Général de Gaulle qui l’avait
maintenu. Il avait été préfet, notamment en Algérie. Très courageux.
Il avait été préfet de police à Paris pendant 10 ans. D’ailleurs il
a payé surtout à cause de Charonne - entre nous. Le reste c’était un
alibi. Moi je suis convaincu qu’il paye la remise en ordre qu’il
fait, l’ordre qu’il maintient, au moment de Charonne.
Il est ensuite à l’Assemblée
nationale où il est un parlementaire tout à fait raisonnable. Il est
à la Commission des Finances, je le connais, il est rapporteur
général à la Commission des finances. Et quand en 1978, je suis
renommé premier ministre et que je veux diviser ce bastion qu’était
le ministère de l’économie et des finances. Entre un ministère de
l’économie et un ministère des finances, du Budget, je choisis M.
Monory pour l’économie car je savais qu’il était comme moi, partisan
de la libération des prix et je choisis M. Papon parce qu’il est un
modéré de l’UDR - je ne sais pas encore si le RPR le supportait.
Que saviez-vous de son
rôle à la préfecture de Gironde ?
RB : Mais personne n’en parlait. A
aucun moment ! Cela n’a paru qu’en 1981. Certes, le jury d’honneur
que M. Papon avait réuni a dit qu’il n’avait rien fait de contraire
à sa responsabilité de grand Commis de l’Etat mais qu’il aurait pu,
le cas échéant, abandonner ses fonctions. Alors nous nous trouvons
devant un phénomène essentiel : est-ce que tous les fonctionnaires
de l’Etat qui était en fonction à l’époque auraient dû abandonner
leurs responsabilités ? Ou au contraire rester, pour essayer de
limiter la casse – si vous me permettez cette expression- et de
préparer l’avènement de la République qui suivrait.
Est-ce que vous comprenez,
M. le Premier Ministre qu’on puisse être coupable de ne pas désobéir
?
RB : Personnellement j’ai plutôt
le tempérament à la désobéissance. Mais quand on a des
responsabilités essentielles dans un département, une région ou à
plus forte raison dans le pays on ne démissionne pas. On démissionne
lorsqu’il s’agit vraiment d’un intérêt national majeur.
Ce n’était pas le cas ?
RB : Ce n’était pas le cas car il
fallait faire fonctionner la France.
Chirac a reconnu que la
France devait se regarder en face, c’est considérer que l’Etat comme
Etat avait participé à la Shoah et donc invoquer la close de
conscience qui existe dans certaines professions. Est-ce qu’on ne
devrait pas introduire une close de conscience dans l’Etat ?
RB : Mais vous avez toujours le
droit de faire jouer la clause de conscience et à tout moment. Mais
je reviens à ce qu’était la France en 1944-1945. Pensez au nombre de
fonctionnaires qui étaient en place qui ont essayé tant bien que mal
de limiter ce drame qu’a été la persécution des Juifs et n’oublions
pas quand même qu’en France c’est le pays où le nombre de Juifs
sauvés a été le plus élevé. Et qu’est-ce qui se passe à la
Libération, ce pays ne peut pas s’effondrer, il faut bien que
l’administration demeure, sauf ceux qui ont été manifestement des
serviteurs de l’ennemi. Je pense à Bousquet et M. Mitterrand n’a pas
été d’une sévérité extrême à l’égard de M. Bousquet.
Alors a surgi cette affaire et M.
Papon est devenu un bouc émissaire. Je ne porte pas un jugement
moral sur l’attitude que l’on devait avoir à l’égard des
déportations de Juifs ou non. Mais je considère qu’il y a dans ce
pays une hypocrisie fondamentale à chercher quelques boucs
émissaires alors qu’il faut bien le reconnaître : si le pays a
continué à fonctionner, c’est parce que le général de Gaulle a
maintenu ceux qui étaient en place quand il le pouvait et ceux qui
s’étaient trop manifestés dans les voies de la collaboration, il les
a envoyés en Allemagne. N’oubliez pas cela, tout le personnel
français qui est allé gérer la partie de l’Allemagne occupée par la
France est composé en grande partie de fonctionnaires de grande
qualité qu’il aurait peut-être été nécessaire d’éliminer sur le plan
national mais qui devaient continuer à servir le pays au plan
international.
Je m’excuse, je vous ai parlé très
franchement. Que vous me fassiez passer pour un antisémite, pour
quelqu’un qui ne reconnaît pas la Shoah, j’ai entendu cela cent fois
et cela m’est totalement égal. Mais ce que je viens de dire, je le
répète. Et comme M. Papon avait été un ministre parfait, quand il y
a eu à Bordeaux son jugement, nous avons été deux hommes politiques
à aller porter témoignage : Olivier Guichard qu’on ne peut pas
soupçonner et moi-même comme ancien Premier Ministre. Alors je
voudrais que cela soit clair.
Pourquoi Papon n’a-t-il pas
exprimé des regrets ?
RB: M. Papon a pu expliquer qu’il
s’est retrouvé dans beaucoup de cas dans l’obligation - soit du fait
de Vichy soit du fait des autorités allemandes - de se livrer à des
actes répréhensibles et qu’il était resté pour essayer de limiter la
casse, mais il lui a manqué la phrase disant que ce qui avait été
fait sous son autorité était quand même regrettable et qu’il l’avait
fait parce qu’il pensait que c’était son devoir de le faire. Je
crois que c’est cela et il n’a jamais rien dit ensuite, parce que M.
Papon était un homme fier. C’est un homme qui exerçait de grandes
responsabilités, ce n’était pas quelqu’un à dire : « je regrette ce
que j’ai fait ».
Regrettez-vous d’avoir eu
ce mot lors de l’attentat de la rue Copernic: « un attentats odieux
qui voulait frapper les Juifs se trouvant dans cette synagogue et
qui a frappé des Français innocents qui traversaient la rue Copernic
». ?
RB: Non, je me souviens très bien
du climat dans lequel j’ai dit cela. N’oubliez pas que dans la même
déclaration, je dis que la Communauté juive ne peut pas être séparée
de la Communauté française. Quand on cite on cite en entier. Et la
campagne qui a été faite par le lobby juif le plus lié à la gauche,
venait du fait que nous étions en climat électoral et moi cela ne
m’a pas impressionné et ils peuvent continuer à le répéter.
Mais pourquoi « Français
innocents » ?
RB: Mais oui parce c’était des
Français qui circulaient dans la rue et qui se trouvent fauchés
parce qu’on veut faire sauter une synagogue. Alors, ceux qui
voulaient s’en prendre aux Juifs, ils auraient pu faire sauter la
synagogue et les juifs. Mais pas du tout, ils font un attentat
aveugle et y a 3 Français, non juifs, c’est une réalité, non juifs.
Et cela ne veut pas dire que les Juifs, eux ne sont pas Français.
Oui mais « Innocents » ?
RB: Parce que ce qui était la
caractéristique de ceux qui faisaient l’attentat c’était de châtier
des Juifs coupables.
A leurs yeux !
RB: A leurs yeux mais bien sûr.
Aux miens, les Français n’étaient pas du tout liés à cette affaire.
Non, je suis très clair sur ce point. D’ailleurs, aucun de mes amis
juifs – et j’en compte – ne m’a fait grief là-dessus. Là, je tiens à
vous dire que sur cette affaire, je considère que le lobby juif –
pas seulement en ce qui me concerne – est capable de monter des
opérations qui sont indignes et je tiens à le dire publiquement.
Bruno Gollnisch,
conseiller municipal de R. Barre à Lyon pendant 6 ans. Après sa
condamnation vous avez dit que c’était quelqu’un de bien alors qu’il
venait d’être condamner pour propos négationnistes. Le
regrettez-vous ?
RB: Voilà, vous revenez
aujourd’hui avec toutes les petites critiques sordides que j’ai
entendues. Et je vais mettre les choses au point. Gollnish était mon
collègue à Caen, il est universitaire, je le connaissais, je ne le
fréquentais pas pour la raison bien simple qu’il n’était pas de mon
bord. Il est élu car il y avait à Lyon, au moins 15 à 20% de la
population qui votait FN. Il est élu, il devient membre du conseil
municipal. Il se conduit correctement. Toutes les fois où il veut
introduire des considérations qui lui sont propres dans les débats
du Conseil municipal, je lui demande de se taire et il le fait. Pour
le reste, pour tout ce dont il est chargé, comme conseiller
municipal, il fait les choses d’une manière tout à fait correcte.
Moi je suis quelqu’un qui considère que les gens peuvent avoir leur
opinion, c’est leur opinion et par ailleurs, quand je les ai vu
fonctionner dans un climat particulier, je reconnais leurs qualités.
Et ce que j’ai dit simplement c’est que certes, je blâmais les
propos de M. Gollnisch, mais j’ai tellement entendu les propos de M.
Gollnish à Lyon que cela finissait par ne plus m’émouvoir. Quand on
entend à longueur de journée tout ce qui se dit à droite et à
gauche, à la fin on n’y porte plus attention. Et j’ai dit en parlant
de Gollnisch que je blâmais ce qu’il avait dit, mais que pour le
reste je l’avais connu et que c’était un homme bien. C’était un bon
conseiller municipal et que ceux qui ne sont pas satisfaits de cela
pensent ce qu’ils veulent.