L'effondrement ...de la société française.    
 

Sur un roman d'anticipation de Daniel Havély ( 1872-1962) ..... qui en 1893, prophétise une catastrophe qui frappera la France entre 1997 et 2001.

 Voici un texte d"Annie Kriegel paru dans le Figaro le 2 décembre 1993 ...

IL y aura exactement, quatre-vingt dix ans, le 24 décembre prochain, que  Daniel Halévy publiait, dans les célèbres Cahiers de la quinzaine qu'avait fondée Chartes Péguy, un conte philosophique ayant la forme d'un roman d'anticipation, une fable en quelque sorte, Histoire de quatre ans. 1987--2001.

Daniel Halévy. t1872-1982) (1) appartient à une famille qui, par les dons et talents éclatants dont témoignèrent les membres des générations - successives, traverse en une chaîne ininterrompue les XIX' et XX' siècles français. 

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Voici donc un texte de moins de 150 pages- que Péguy, comme Sorel tenait pour un chef-d'oeuvre, et qui en une langue limpide, fait le récit de l'effroyable catastrophe qu'allait connaître la société française à la fin de ce siècle, c'est-à-dire justement dans les années -nous entrons,  il arrive que les propres, petits-fils de Daniel Havely - tel Pierre Joxe - soient aux commandes. Une catastrophe qui vient de loin; mais dont l'écroulement est bref, resserré en quatre années.

Qui vient de loin, de la disparition de la paysannerie, dont ce grand bourgeois parisien qu'était Daniel Havély tenait à juste titre qu'elle avait été l'assise sociale, la « force dure et sécrète » sur laquelle avait pris appui la brillante histoire de France (2) Or, cette France rurale s'était vidée, dépeuplée : « Qu'elle était grandiose et triste, cette campagne... elle étai déserte, et semblable à une brousse immense. Parfois, on distinguait au milieu des arbres, les arêtes d'un clocher ruiné dominant les hauts mur d'une église. Des vestiges d'habitations s'élevaient alentour, c'était l'emplacement d'un ancien village (p. 13).

Ce total dépeuplement des campagnes, Halévy l'annonçait comme dû à l'abandon des anciens modes d'alimentation humaine, depuis -que des savants  étaient parvenus à fabriquer une matière organique, qui, d'abord coûteuse, avait dans les villes où ils s'entassaient, chassé des centaines de milliers de miséreux et d'indigents, mais qui, par la suite, était devenue si bon marché, presque gratuite, qu'il suffisait désormais qu'ouvriers et employés des usines et des bureaux travaillent quelque heures par jour.

Ainsi se trouvaient libérées émancipées», des foules énorme et oisives, indifférentes, quoi qu'on leur proposât, à la culture dont s'honorait une élite recrutée parmi les universitaires, foules qui, démoralisées avilies, dégénérées, droguées, affolées, se ruaient vers les lieux de plaisir : -« L'attention fut d'abord attirée par certaines déformations de l'instinct sexuel, par une licence à la fois, ordurière et raffinée, et partout répandue  (p. 17).

C'est alors qu'éclata une terrifiante épidémie qui, par ,millions, enleva en quelques jours: en quelques mois, en quelques saisons, la majorité des vivants. Daniel Halévy , ne donne à cette épidémie aucun nom particulier : ni peste. ni choléra,ni sida; Une épidémie si meurtrière que la France, puis les pays voisins; et finalement le continent européen, pour la première fois depuis le XVI' siècle, succombèrent devant les attaques,que les musulmans, de Shanghai à Tanger, lancèrent contre eux (p. 87).

Comment cependant Halévy conçoit-il le, salut qui,-au bout de quatre ans, va tirer la France de l'abîme ? Hélas ! à nos yeux d'aujourd'hui, si son imagination lui a dicté bien des traits d'un mal et d'un malheur qui effectivement sont les nôtres à la veille du second millénaire, en revanche sont bien dépassées les formules sociales auxquelles il se rallie et dont on croyait pouvoir attendre, il y a un siècle, le retour une société saine, en marche. Vers le progrès.

Halévy recense en effet  trois groupes, et trois groupes seulement  très minoritaires qui, pratiquant la vertu, sont en mesure de constitues une élite destinée à régir autoritairement une société elle même à trois vitesse.

Trois groupes ? Un petit groupe d'abord, de « vieux catholiques" ayant échappé au désastre dans lequel l'Église catholique s'est abîmée avec toutes les autres composante d'un monde en perdition . Un second groupe, plus consistant, encore que dispersé, de savants  rassemblée dans des fédérations de sociétés savantes, dans des universités populaires, dans des laboratoires où s'impose, la hiérarchie des savoirs positifs : ce sont- eux qui, mènent la lutte concrète contre toutes les variétés d'atteinte à l'hygiène publique.

Enfin, le troisième groupe, le plus nombreux, est constitué par les habitants de «colonies» ou vivent, travaillent, ..prospèrent, libres, joyeux, sains, dignes, égaux entre eux, des compagnons, et militants socialistes, socialistes certes, mais socialistes libertaires, c'est-à-dire des, proudhoniens, pour qui, loin de la dictature du prolétariat de laquelle se réclamaient Marx et les marxistes autoritaires-, ce qui comptait, c'était la commune de basé, autonome, sans ,Dieu ni maître, abbayes de Thélème où, dans des -vallées et  les valions des montagnes jurassiennes, on fabriquait gaiement laitages et fromages. A moins que, poussant plus loin encore ce fut de Nietzsche et du nihilisme qu'on, s'inspirât

Trois groupes, donc, appartenant à l'élite d'une société qui, elle, devait fonctionner à trois vitesses. Car si les élites étaient libres et saines, elles avaient pour fonction, pour obligation, d'encadrer, de guider, de diriger, d'être les maîtres de deux classes inférieures : la classe intermédiaire des  "stagiaires", qui, sur le pourtour des colonies pouvaient être accueillis dans des stations hygiéniques, et, au-dessous encore, la classe des « astreints », appelée a peupler des sortes d'immenses goulags, où , de retour de vagues chantiers, ils finissaient de mourir.

Roman d'anticipation`? Parfois pire , parfois moins dur que notre réalité présente. Mais au total une idée peut-être juste : " le bonheur, n'est-ce pas une affaire de bravoure? » (p.82).N'est-ce pas là la valeur qui, en priorité, a disparu au cours du siècle ?

A. K.

(I) Cf la revue Contrepoint 20 février 1976. Sous la direction de Geoges Liebert.

(2) Daniel Halévy. Visite aux Paysans du centre. Grasset, 1934, Réedition collection  "Pluriel ", 1970, préface de Maurice Agulhon.

 

 Curieux ce même jour paraissait en dessous de cet article un texte avec pour titre ... "Saddam Hussein, prix Nobel ?"  un article  de Patrick Wajsman ... s'élevant contre la normalisation des relations avec le dictateur....  il y a prés de  dix ans....

 

15.02.03

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... en France ..en Europe ...

...L'amour s'est en effet "refroidi »  ... la charité fait face à l'empire aujourd'hui planétaire de la violence....

Cette montée vers l'apocalypse est la réalisation supérieure de l'humanité. Or plus cette fin devient probable, et moins on en parle.

Il faut donc réveiller les consciences endormies.

Vouloir rassurer, c'est toujours contribuer au pire.

René Girard.

  

 

  "L'esprit constitue un champ de relations tourné vers la totalité de ce qui existe "  Joseph Pieper

Loin que ce soit être qui illustre la relation , c'est la relation qui illumine l'être.     Gaston Bachelard

Les composantes de la société ne sont pas les êtres humains, mais les relations qui existent entre eux.   Toynbee

 

 

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