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Présentation:
Le temps des derniers hommes
par Roland Hureaux
décrit en termes limpides le phénomène majeur de notre époque, à savoir le
déclin rapide de la population européenne. De l'évolution de la natalité
en Europe et dans le monde dépend l'avenir de la culture européenne, voire
la survie de l'espèce humaine. Roland Hureaux s'interroge avec nous sur
les causes de ce phénomène et les remèdes envisageables. Passionnant
autant que décapant ....
Extraits:
«D'une certaine manière,
en effet, la régression démographique du vieux continent n'est que la
pointe avancée d'un mouvement qui touche toute la planète.»
Par une remarquable aliénation des esprits, le travail salarié est devenu
la principale, sinon l'unique, référence de nos existences, avec son
corollaire qui est la consommation de biens marchands.
Reflets:réification,
ensemble-HOMENTRANCHEs , amour, religions, NOUS
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Le temps des derniers hommes
Auteur:
par Roland Hureaux (Hachette Littérature, novembre 2000, 300 pages,
140 FTTC)
Source:http://www.herodote.net/livreHureaux.htm
Depuis plusieurs décennies,
les commentateurs et les responsables politiques entretiennent la peur
d'une explosion démographique. Cette explosion est derrière nous.
En prolongeant les courbes actuelles de la natalité en Europe et dans le
monde, les démographes s'accordent à reconnaître que la population
mondiale, qui compte aujourd'hui 6 milliards de vivants, plafonnera à 8
milliards avant la fin du XXIe siècle et diminuera ensuite plus ou moins
rapidement.
Vers 1900, l'Europe abritait le quart de la population mondiale et ses
densités de peuplement étaient de loin les plus élevées de la planète.
Rien de tel aujourd'hui. L'Europe ne représente plus qu'un dixième de
l'humanité avec des densités très médiocres relativement à la moyenne
mondiale.
Aux rythmes actuels, la France et l'Angleterre pourraient ne plus compter
que 33 millions d'habitants chacune à la fin de ce siècle (au lieu de 60
aujourd'hui), l'Allemagne 15 (au lieu de 80) et l'Espagne 8 (au lieu de
35)...
Dans «Le temps des derniers hommes», Roland Hureaux, normalien et
énarque, analyse toutes les significations historiques et sociales de ce
phénomène sans précédent.
Contrairement à certains économistes qui voient dans le déclin
démographique un remède au chômage, il met en garde contre ses effets
destructeurs : baisse de la consommation et des investissements, crise de
l'enseignement et de la transmission du savoir,...
L'immigration ne saurait être un remède à ce déclin, même si d'aucuns
comptent maintenir le niveau de leurs retraites en volant aux pays pauvres
les rares professionnels dont ils disposent.
Faut-il donc se résigner à la fin de la civilisation européenne ? Pour
Roland Hureaux, l'enjeu ne se limite pas (si l'on peut dire) à l'Europe.
Il écrit : «D'une certaine manière, en effet, la régression
démographique du vieux continent n'est que la pointe avancée d'un
mouvement qui touche toute la planète.»
Du Japon à l'Argentine en passant par la... Tunisie, tous les pays sont
peu ou prou touchés par le
déclin démographique,
les derniers de la liste étant ceux d'Afrique noire.
Sauf à souhaiter l'éradiquation de l'espèce humaine, il importe donc de se
demander quelle étrange malédiction porte les hommes de ce début du IIIe
millénaire à organiser leur disparition.
Devant la généralité du phénomène, l'auteur évacue l'hypothèse d'un
comportement propre à certaines ethnies. Il disculpe également les moyens
de contraception modernes (pilule,...), la natalité chutant dans certains
pays en dépit de l'absence de ces moyens.
De façon quelque peu inédite, Roland Hureaux met en accusation le mode
d'organisation et l'idéologie caractéristiques de nos sociétés
industrielles.
Les citoyens et leurs représentants subordonnent en effet toutes leurs
aspirations aux objectifs de croissance économique du pays et à la bonne
santé des entreprises.
Par une remarquable aliénation des esprits, le travail salarié est devenu
la principale, sinon l'unique, référence de nos existences, avec son
corollaire qui est la consommation de biens marchands.
Les Occidentaux et, à leur suite, les autres humains ont oublié les vertus
de détachement prônées par les grandes religions universelles.
L'Ancien Testament et les Évangiles, pour ne parler que de ces textes,
tiennent le travail pour un mal nécessaire, jamais pour une vertu. «Tu
gagneras ton pain à la sueur de ton front » (Genèse)... Rappelons que
le mot travail dérive de tripalium, instrument de torture à trois
pieux.
Or, aujourd'hui, personne ne saurait sans déchoir se flatter de ne pas
travailler, fut-il doté de rentes fabuleuses.
C'est ainsi que les dirigeants des entreprises imposent à eux-mêmes et à
leurs concitoyens un modèle de vie tout entier orienté vers la production
et la consommation de biens marchands.
Tout ce qui pourrait contrarier ce modèle est réprouvé. Les maternités
sont sans cesse reportées aux calendes grecques car elles dérangent les
plans de carrière des ménages et entravent d'éventuelles promotions.
Au plan politique, les investissements en faveur de l'éducation des
enfants ainsi que d'un urbanisme plus accueillant à la vie de famille sont
perçus comme des entraves au développement à court terme des entreprises.
Par-delà ce constat, qui est la partie la plus intéressante de son essai,
Roland Hureaux ébauche quelques solutions.
Il montre comment des politiques familiales raisonnablement menées peuvent
aider les couples à atteindre le nombre d'enfants en moyenne souhaité,
soit 2 à 3, plus que nécessaire pour enrayer le processus d'extinction.
L'auteur réfute quelques idées convenues sur le «natalisme». Il
rappelle opportunément que les politiques en faveur de la natalité n'ont
été efficaces que lorsqu'elles ont été menées par des démocraties
épanouies (la France de la Libération ou la Suède des années 1980, par
exemple).
A contrario, elles n'ont jamais été aussi peu efficaces que dans
les dictatures mortifères : Allemagne nazie, URSS, Roumanie communiste.
C'est que la mise enœuvre d'une politique active de soutien de la natalité
présuppose des mentalités imprégnées de l'amour de la vie, de soi et
d'autrui.
L'essai de Roland Hureaux nous renvoie à une prophétie d'André Malraux sur
le retour du religieux au XXIe siècle.
Face à un système social qui menace d'extinction l'espèce humaine ou pour
le moins sa composante européenne, il est possible que renaisse bientôt un
sentiment religieux capable de rendre un sens à la vie et de restaurer
l'homme dans toutes ses dimensions, pas seulement celle de
producteur-consommateur.
André Larané
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