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Présentation:
La mort de Françoise Sagan fait là Une
du Figaro ce que 25 septembre 2004... Morte hier à l'âge de 69 ans.
...événement capital ... moitié de la première page. ... la fin d'une
époque ? ... jetons le voile ... vive la femme libérée ....
Jean-Claude
Lamy, qui a écrit la biographie de Sagan (Mercure de France, 1988), eut
souvent l’occasion de la rencontrer. Ainsi, en mars 1979, à l’occasion des
25 ans de Bonjour tristesse, il était le seul journaliste reçu par
Françoise Sagan, en convalescence après avoir subi une grave opération.
Ayant frôlé une nouvelle fois la mort, elle parle de la terrible angoisse
qu’elle ressentit ce jour-là en croyant que tout était fini. Extraits de
l’entretien.
Le lendemain
... d'autres articles dont voici qq extraits ....
Extraits:
Charmant petit monstre.... J’étais lancée. J’ai toujours
aimé tenter le diable, vivre au-dessus de mes moyens. .... la mort n’a
rien de romantique. C’est plat, très terne, ça fait horreur ; c’est
dramatiquement concret, minable ...l’alcool m’a toujours aidée pour écrire
: ça donne confiance en soi.... Je ne connais pas d’écrivains de ma
génération qui ne prennent rien. ... ce qui m’a complètement dégoûtée...
c’est le spectacle des malades à Lourdes ... on arrivait dans une boîte de
nuit avec Arthur et on repartait avec Paul .... la jeunesse avait besoin
d’un peu plus de liberté. Maintenant, elle est au pouvoir ... Ce succès,
fondé sur le scandale, fut extravagant.... charmant petit monstre.
J’étais lancée.
Autres hommages .... Elle a
créé un monde à la fois issu de notre temps désorienté et venu de la
vision d'un poète, qui se console comme il pouvait de n'avoir pas trouvé
ses ailes...la boîte de nuit que fut la seconde moitié du XXe siècle est
définitivement fermée
en
io-relation
....
individualisme, intelligentsia, mai 68,
libéralisation des moeurs, ensemble-HOMENTRANCHE, le mal, le diable, la tristesse,
l'absence de Nous , plaisirs, le vide ....
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...Charmant
petit monstre.... J’étais lancée.
Auteur:
Françoise Sagan
Source:
le Figaro de 24 septembre 2004
LE FIGARO. – Depuis votre accident
de voiture en 1957, vous avez incarné une fureur de vivre qui fait
maintenant partie de votre légende. Vous assumez ce rôle ?
Françoise SAGAN. – J’ai toujours
aimé tenter le diable, vivre au-dessus de mes moyens. Je dois tenir
ça d’une de mes grands-mères qui était d’origine russe. Evidemment, cela
m’a valu pas mal de déboires. Mais c’est seulement après mon accident de
voiture que j’ai compris que j’étais vulnérable. Tout récemment encore
je me suis sentie fichue. Opérée d’urgence, j’ai cru vraiment que
j’allais mourir ; pendant quatre heures, ce fut atroce. Je craignais que
l’on m’opère pour autre chose qu’une péritonite. C’était le diagnostic
des médecins, mais je m’attendais au pire et, dans ce cas, il valait
mieux que je ne me réveille pas. Eh bien je peux vous dire que la
mort n’a rien de romantique. C’est plat, très terne, ça fait horreur ;
c’est dramatiquement concret, minable...
Vous n’êtes plus autorisée à boire.
Les nuits d’alcool vous manquent-elles ?
Je me sens privée, par moments, d’une
espèce de laisser aller. C’est le côté aventure facile qui disparaît.
Après avoir bu trois whiskies, un homme me paraissait épatant, tandis
qu’à jeun il m’aurait semblé tout à fait moyen. C’était le grand charme
de l’alcool : on arrivait dans une boîte de nuit avec Arthur et on
repartait avec Paul. Chez Régine, il y avait une porte dérobée, près
du bar, qui permettait cet agréable tour de passe-passe. D’autre part,
l’alcool m’a toujours aidée pour écrire : ça donne confiance en soi.
Aujourd’hui, j’utilise d’autres excitants, oh, rien de bien inquiétant !
Je ne connais pas d’écrivains de ma génération qui ne prennent rien.
L’écriture, c’est votre meilleure
façon d’exister ?
C’est surtout un moyen d’équilibrer ma
vie farfelue. Mais c’est quelque chose de toujours difficile, de
toujours humiliant, car je n’arrive jamais à écrire un chef-d’oeuvre.
Chaque fois je crois que je vais y parvenir. Avec Le Lit défait,
mon dernier roman, j’ai senti que j’y arrivais. C’était un plaisir
immense de voir mes phrases refléter exactement le fond de ma pensée. Un
bonheur aussi terrible que l’humiliation de ne pas trouver le mot juste.
Sincèrement, j’ai maintenant l’impression d’avoir plus de talent que les
neuf-dixièmes des gens qui disent écrire mieux que moi. Mais je ne suis
pas Sartre, je n’ai pas écrit Les Mots.
Vous travaillez chaque jour ?
Oui, quand le livre est lancé. Sinon,
je peux rester des semaines à ne rien faire. Un été, je me souviens
avoir travaillé pratiquement sans interruption. Il n’avait pas plu
depuis très longtemps et, à l’instant même où j’achevais mon manuscrit,
un violent orage éclata sur Paris. Comme tout le monde attendait cette
pluie, je me suis dit que j’aurais dû finir plus tôt ce roman.
Vous n’avez pas vu là un signe du
ciel ?
Depuis mon passage aux Oiseaux, une
institution religieuse, je ne crois plus en Dieu. C’est à 14 ou 15 ans,
en lisant Camus, Sartre, Prévert, que j’ai perdu la foi. Mais ce qui
m’a complètement dégoûtée à cet âge, c’est le spectacle des malades à
Lourdes, où j’étais passée avec mes parents. Il y avait tous ces
pauvres gens qui attendaient un miracle et il ne s’est rien passé.
D’ailleurs, je ne me serais pas contentée d’un miracle : il m’en fallait
50 !
A quoi attribuez-vous
l’extraordinaire succès de Bonjour tristesse ?
Sa sortie a correspondu à un moment où
la jeunesse avait besoin d’un peu plus de liberté. Maintenant, elle
est au pouvoir. Les adolescents sont traités en adultes. Ils
existent pleinement dans une société faite pour eux. A l’époque, c’était
le contraire ; alors l’histoire de mon héroïne, Cécile, avait de quoi
choquer. Une fille de 17 ans qui fait l’amour par plaisir et ne tombe
pas enceinte, cela semblait une chose inouïe. Ayant à peu près l’âge de
Cécile, on me regarda avec ahurissement. Je devenais un véritable objet
de curiosité. Ce succès, fondé sur le scandale, fut extravagant.
François Mauriac, dans un article à la une du Figaro, parla de
charmant petit monstre. J’étais lancée.
texte hébergé
en 09/04
haut de page
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Sagan n'était pas tout à fait de son
temps, ce qui était la marque même de son temps...
le Figaro, 27 septembre 2004
....ce
coeur de petites filles qui battaient si fort à la vue d'un homme
séduisant était un coeur sans cause, comme sont parfois les avocats...
Elle demandait l'impossible, voilà qu'elle tombe surs sur notre temps, il
faut avouer que ce n'est pas de chance. Alors adieu l'infini, adieu les
douleurs héroïques et les rêves de voleurs de feu. On préfère le silence
comme avait fait Rimbaud....
...... Elle a créé un monde à la fois issu de notre temps désorienté et
venu de la vision d'un poète, qui se console comme il pouvait de n'avoir
pas trouvé ses ailes.... Elle était pas dupe de ses émotions de la
vitesse et de l'excès, mais quand le ciel est gris, mieux vaut se
griser soi-même ; on finit peut-être par y attraper quelques miettes de
cet absolu qui nous a échappé et par y côtoyer quelque ersatz d'éternité.
Renaud Matignon
RS ....excepté que Rimbaud s'est éteint dans l'infini de la
foi ...
la liberté du
« charmant petit monstre »
le Figaro, 27 septembre 2004
en ce mois de juin 1953 à quelques jours du baccalauréat... La jeune
Françoise croirait se, tout juste dix-huit ans se confient à sa meilleure
amie, Florence Malraux : « cet été, j'écrirait un livre, il aura du
succès, je gagnerai beaucoup d'argent et je m'achéterai une Jaguar.
... Cinquante ans après, presque jour pour jour après la parution de
bonjour tristesse, les jeux sont faits, ces jeux qu'on croyait
naïvement sans fin comme une nuit sans aube. Le casino est fermé, les
croupiers fatigués, le barman éreinté. L'annonce de la mort de Françoise
Sagan nous met une gueule de bois dont nous ne sommes pas prêts de nous
remettre : la boîte de nuit que fut la seconde moitié du XXe siècle est
définitivement fermée. La vie de Sagan nous rassurait. Elle cautionner
nos excès. Quant à ses livres, il nous délivraien du mal.
...
Anthony Palou
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