LA MONTÉE du prix du pétrole s'explique par la forte
demande émanant de plusieurs secteurs géographiques. Le premier
facteur expliquant cette hausse est l'expansion chinoise très
consommatrice d'énergie, mais elle n'est pas la seule en cause, la
croissance des Etats-Unis, du Japon et de l'Inde expliquent elle aussi
la forte progression de la demande en produits pétroliers. Les pays du
Moyen Orient avec les projets de développement du secteur
pétrochimique participent aussi à
cette tension sur le marché
pétrolier. Or l'offre ne suit pas et cela provoque mécaniquement une
flambée du prix du baril. Mais ceci n'explique pas toute l'ampleur de
la hausse, les tensions internationales avec l'Iran au sujet de l'arme
atomique contribuent aussi à l'explosion des cours du brut,
l'instabilité internationale et les incertitudes politiques s'y
ajoutent pour exercer des tensions sur le marché pétrolier. En 2002,
les analystes pensaient que le baril avait franchi un seuil historique
avec 45 $, ce prix aujourd'hui est pulvérisé à plus de 70 $ (en 1988,
il avait atteint son plancher à 15 $).
Les revenus de l'OPEP suivent en
conséquence, de 1998 à 2004 ils avaient été multipliés par 3, passant
de 108 milliards à 290 milliards de dollars. Cette progression se
poursuit de plus belle avec la poursuite de la montée du prix du baril
: en 2005, les revenus pétroliers ont atteints 800 milliards de
dollars ! Comment les pays de l'OPEP vont-ils employer ces revenus
colossaux ?
Ils ont déjà permis d'éponger les
dettes comme en Arabie Saoudite dont l'endettement public se montait
en 2000 à 100 % de son PIB. Les pays producteurs de pétrole
investissent prioritairement chez eux et en second lieu aux ÉtatsUnis.
Les pétrodollars financent ainsi le déficit américain et permettent à
ceux-ci d'acheter des entreprises européennes comme la bourse
paneuropéenne Euronext, Mercedes et d'autres. Le Bahreïn s'arrache à
prix d'or les professionnels de la finance dans le monde entier et
leurs salaires ont décuplé en quelques années, ce pays compte 366
établissements financiers, BNP Paribas et UBS ont d'ailleurs choisi
Manama pour fixer leurs sièges dans le Golfe.
LONDRES, CENTRE MONDIAL DE LA FINANCE ISLAMIQUE
?
LES CENTAINES de milliards de
dollars des revenus pétroliers hypnotisent les financiers
internationaux. Cela s'est traduit récemment
par la déclaration du ministre britannique des finances Gordon Brown
qui a souhaité le 13 juin dernier que la Grande-Bretagne devienne : «
la porte d'entrée de la finance et du commerce islamique » pour cela,
il souhaite « renforcer les liens commerciaux entre le Royaume-Uni et
les pays musulmans ». Il entend que Londres devienne « le centre
mondial de la finance islamique ». Les établissements financiers
britanniques ont déjà proposé des produits pas contraire à la charia.
La finance islamique pèserait 200 milliards de dollars, avec les
revenus pétroliers nous atteignons 1 000 milliards. Ces chiffres ont
de quoi faire tourner la tête à tous les financiers de la planète et
les stimuler à pratiquer la danse du ventre pour pouvoir gérer ne
serait ce qu'une partie de cette manne.
La France a inauguré depuis la fin
de la guerre d'Algérie cette collaboration économique avec les pays
arabes. Nous nous rendons compte aujourd'hui que les accords
commerciaux euro-arabes n'ont pas que des répercussions économiques
mais également des répercussions sur nos libertés et notre culture,
par le développement du communautarisme, ainsi que sur notre politique
étrangère.
LE NOUVEL APPEL DU MUEZZIN
LES DÉBATS du dernier forum
euro-arabe qui s'est tenu du 26 au 28 avril dernier à l'Institut du
monde arabe n'ont pas transpiré dans les médias. Les citoyens français
devraient tout de même être informés que le Saoudien Dr. Abudulaziz
Othman Altwaijiri a appelé « la communauté internationale à unir ses
efforts pour que l'Assemblée générale des Nations Unies vote une
résolution condamnant le mépris pour les religions et la
désacralisation des saintetés religieuses » en référence aux
soulèvements dus aux caricatures de Mahomet, ce qui se traduit pour
quelqu'un qui connaît l'islam par « les Occidentaux doivent respecter
la charia ». Cette affaire des caricatures et ses prolongements, comme
la députée néerlandaise Ayaan Hirsi Ali d'origine somalienne obligée
de quitter un pays pourtant démocratique où elle devenait encombrante,
n'augure rien de bon pour nos bonnes vieilles valeurs.
Les citoyens s'apercevront dans
quelque temps que les colossaux revenus pétroliers ne seront pas sans
conséquence sur leur vie quotidienne, car ils rendent les oreilles de
nos responsables politiques européens, hypnotisés par les milliards de
dollars et les fabuleux marchés potentiels que cela suppose, très
sensibles à l'appel du muezzin : il faut s'attendre de leur part à une
accentuation de leur collaboration pour faire de l'Europe un
territoire largement ouvert à l'islam.
Louis CHAGNON